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Élections fédérales 2015: Et si nous avions un autre système électoral?

Et si nous avions un autre système électoral?
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Les sondages actuels se contredisent quant à savoir qui est premier, deuxième ou troisième, et les plus récentes projections montrent une course à trois encore plus serrée qu’auparavant. Cela résulte cependant de notre système électoral — un système qui peut de temps à autre donner des résultats inattendus, par exemple un parti se retrouvant avec plus de sièges malgré un nombre inférieur de votes.

Justin Trudeau a déjà promis de chercher à le réformer, et il favorise le système du vote alternatif. Thomas Mulcair, en phase avec la tradition du NPD, souhaite quant à lui instaurer la représentation proportionnelle. C’est également le cas d’Elizabeth May. Stephen Harper s’oppose à toute réforme.

Si nous avions la représentation proportionnelle, il serait très facile de faire des prévisions. Un parti obtenant 30 % des voix se retrouverait avec approximativement 30 % pour cent des sièges (tout dépendant de la nature du système en place).

Un système plus compliqué pour les prévisions est celui du vote alternatif. Dans le cadre de ce système, les électeurs donnent un rang aux partis ou candidats au moment de voter. On compte les premiers choix, et celui qui se retrouve avec plus de 50 % des voix l’emporte. Si personne n’est élu sur le coup, le candidat au dernier rang est éliminé et ses votes sont redistribués en fonction des choix alternatifs des électeurs. On continue jusqu’à ce qu’un candidat franchisse la barre des 50 %.

Ce système a été proposé au Royaume-Uni, il y a quatre ans, mais son adoption a été rejetée lors d’un référendum.

De quelle façon un tel système affecterait-il le résultat de la présente campagne électorale? Afin de répondre à cette question, nous avons tenu compte des deuxièmes choix précisés lors des sondages réalisés par Ekos et Léger. Tous deux donnent des résultats similaires, les néo-démocrates constituant largement le deuxième choix des libéraux, et vice versa. En moyenne, 55 % des électeurs libéraux présentent le NPD comme leur deuxième choix, et 45 % des électeurs qui favorisent le NDP voteraient pour les libéraux s’ils ne pouvaient faire autrement.

Quant à eux, les conservateurs préféreraient en grande partie s’abstenir — 55 % des électeurs conservateurs ont dit ne pas avoir d’autre choix.

Nous avons utilisé les deuxièmes choix désignés par les électeurs sondés, et dans chaque circonscription où aucun candidat n’obtenait plus de 50 % des voix, nous avons éliminé le candidat au dernier rang puis redistribué ses votes. Nous avons procédé de la sorte jusqu’à ce nous ayons obtenu un candidat avec plus de 50 % des voix dans chacune des circonscriptions. Les résultats se trouvent ci-dessous.

Comme vous pouvez le constater, les conservateurs se retrouveraient avec beaucoup moins de sièges. Le fait qu’à peine quelque 10 % des électeurs libéraux ou néo-démocrates aient le Parti conservateur comme deuxième choix nuit à cette formation quand on procède à tel calcul. Le système du vote alternatif donne la victoire au parti que les électeurs voient comme une alternative à leur premier choix. Il a tendance à favoriser une formation perçue comme plus au centre.

Le grand gagnant serait en ce moment le Parti libéral, qui se hisserait de la troisième place à la deuxième pour lutter pour la victoire finale.

Nous n’avons pas procédé à une telle simulation en ce qui a trait au poste de premier ministre, mais il est juste de dire que Thomas Mulcair et Justin Trudeau auraient tous deux une chance de succéder à Stephen Harper.

Le gagnant a changé dans 45 des 338 circonscriptions. Même si très peu de candidats semblent actuellement en voie de remporter plus de 50 % des votes — seulement 116 pour être précis — le nouveau système ne modifierait les résultats que dans environ une circonscription sur six.

Il est important de retenir qu’il ne s’agit-là que d’une simulation, et que si le scrutin du 19 octobre avait lieu en vertu d’un autre système (comme celui du vote alternatif), la dynamique pourrait bien être différente. En particulier, nous supposons ici que les gens voteraient de la même façon si le système en place était celui du vote alternatif. Il s’agit cependant d’une supposition de taille, et il est facile d’imaginer que certains électeurs feraient un choix différent. Par exemple, les gens qui cherchent actuellement à voter de façon stratégique (c’est-à-dire ne pas voter pour leur premier choix afin que leur vote «compte») n’auraient pas besoin de le faire. Néanmoins, compte tenu des informations dont nous disposons, nous pouvons difficilement faire mieux.

S’il y a une chose qui n’a pas changé depuis le début de la présente campagne, c’est l’impossibilité d’une majorité pour un parti ou un autre. Passer au système du vote alternatif ne changerait rien au «problème». Il est difficile de dire si la Chambre des communes serait plus stable avec le système du vote alternatif qu’avec celui actuellement en place. Il faudrait encore que les libéraux et les néo-démocrates travaillent main dans la main.

Cet article ne devrait pas être vu comme un appui au système du vote alternatif. Il ne s’agit que d’un exercice visant à démontrer ce qui arriverait avec un tel système. Certaines provinces (Ontario, Colombie-Britannique) ont cherché à modifier leur système électoral, en vain.

Un récent sondage d’Insight West montre que les Canadiens sont fortement divisés à ce sujet. Et la question de la réforme électorale est loin d’être l’une des plus importantes.

Avec un électorat aussi divisé que l’est le nôtre en ce moment, le système en place pourrait bien donner un résultat qui ne plaira pas à la majorité des Canadiens, le 19 octobre. En étudiant les données présentées ici, il est facile de comprendre pourquoi Trudeau et Mulcair seraient en faveur d’une réforme électorale, à l’opposé de Stephen Harper.

Toutefois, nous espérons que les différents chefs de parti ne favorisent pas un système électoral plutôt qu’un autre en fonction de leurs chances de l’emporter.

Bryan Breguet a un baccalauréat ès sciences en économie de la politique et une maîtrise ès sciences en économie de l’Université de Montréal. Il a fondé en 2010 TooCloseToCall.ca où il fournit des analyses et projections électorales. Il a collaboré avec le National Post, Le Journal de Montréal et l’Actualité.

Cet article initialement publié sur le Huffington Post Canada a été traduit de l’anglais par Philippe Zeller.

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