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Festival de jazz : BadBadNotGood et Ghostface Killah : «oh, shit!» (PHOTOS)

BadBadNotGood et Ghostface Killah : «oh, shit!» (PHOTOS)
David Kirouac

BadBadNotGood, ce trio de jeunes Torontois formé à l’école de jazz, puis le vétéran rappeur Ghostface Killah (membre du vénéré groupe Wu-Tang Klan, il a aussi une carrière solo), forment une paire improbable depuis 2012. Pourtant, cet assemblage sonore fonctionne plutôt bien sur les planches, comme les Montréalais ont pu le constater samedi soir au Métropolis.

BadBadNotGood est arrivé sur scène avec un retard d’au moins 45 minutes… Certaines choses ne changent pas (hors de leur contrôle croyons-nous), tristement, mais cela n’allait pas ébranler ces deux milliers de spectateurs et plus qui s’étaient déplacés pour venir les voir. Vraiment?

Certes, bien des Montréalais et autres festivaliers connaissent le claviériste Matthew A. Tavares, le bassiste Chester Hansen et le batteur Alexander Sowinski. Et vice versa. Ils sont venus en ville à quelques reprises pour donner des spectacles, dont celui à Montréal en Lumière en 2013. Sans avoir peur de trop nous tromper, nous pouvons prétendre que ce groupe à fait sa place dans l’oreille du mélomane canadien depuis la parution de leurs trois albums entre 2011 et 2014 (BBNG, BBNG2 et III). Il faut dire que certaines de leurs collaborations avec des artistes comme Earl Sweatshirt, Tyler, Danny Brown et Frank Ocean ont aidé à augmenter la crédibilité et le rayonnement du travail de ce trio inconnu de tous il n’y a pas si longtemps.

«Shit»

Or, à constater le niveau d’écoute pathétique des gens pendant que s’exécutaient les trois gars au début de leur prestation introductive (sans le Killah), BadBadNotGood a encore du chemin à faire avant de convaincre l’auditeur moyen que son jazz fusion vaut la peine de la fermer pour une période d’au moins deux minutes consécutives. La situation dans ce Métropolis presque plein était carrément démoralisante. On y était pour se péter la face et raconter sa vie à ses potes ou bien pour entendre le matériel de musiciens somme toute fort talentueux? Encore plus décourageant, vraisemblablement ce phénomène « trouble-du-déficit-de-l’attention-aigu » n’est pas prêt de disparaître dans nos salles. Tout le monde, chaque jour, semble à sa manière le nourrir un peu plus, y compris dans les concerts offerts au Festival de jazz. Shit !

Trêve de lamentations, les gars ont fait ce qu’ils pouvaient et c’était loin d’être mauvais. Ils ont du talent, ça, c’est certain. Leur jazz fougueux teinté de hip-hop et de post-rock (malgré qu’il soit peut-être un peu trop cérébral pour ce genre de soirée misant surtout sur l’arrivée du « messie » Ghostface Killah) a créé çà et là de très beaux moments. Parmi les quelques morceaux instrumentaux offerts, notons celui envoyé en introduction (belle entrée en matière, mais impossible de trouver le titre de cette pièce très vitaminée), la contemplative Velvet (jusqu’au sprint qui arrive à mi-chemin), Putty Boy Strut (avec saxophoniste) et la nouvelle composition Four Shots qui, selon le batteur, est toujours en jachère.

BadBadNotGood est une proposition branchée qui fait bon chic bon genre. En effet, on a déjà entendu ce genre de jazz fusion injecté de fortes doses énergétiques. Comme nous disions plus haut, c’est bien, mais ce matériel n’était peut-être pas présenté dans un cadre idéal. Cette musique manque peut-être un peu de mélodies et de grooves en concert… Ils peuvent paraître geeks et un peu pris dans leur jazz, à l’occasion. Cela dit, ces jeunes musiciens ont bien du temps pour pondre des trucs qui pourront vraiment nous étonner. D’ici là, c’est déjà pas mal du tout.

«Oh, shit!»

Après une demi-heure de ce jazz excité, Ghostface Killah a fait son apparition au milieu d’une acclamation triomphale. Les musiciens de BadBadNotGood ont dorénavant adapté leur jeu pour la cause du rap. Leurs rythmes hip-hop, parfois un brin soul, se sont avérés très efficaces, dans l’ensemble. Leur travail transpose très bien le matériel de cet album fabriqué avec Ghostface Killah, Sour Soul, paru en février. Ceci et tout autre morceau d’ailleurs. En spectacle, leur présence bonifie vraiment de belle façon le travail du rappeur.

Casquette rouge, veston sportif, attitude nonchalante qui vient avec son lot de Yo classiques, sur scène, Ghostface correspond bien au chanteur américain type du genre hip-hop. Mais bon, on a vu bien plus extravagant et bien plus «cliché». Même que le rappeur de 45 ans a démontré un sens aiguisé de la performance. C’est un bon entertainer. Le niveau d’échange avec le public reste à hauteur très relative, mais il a démontré qu’il est allumé et drôle, ce qui est déjà pas mal… Définitivement, il sait faire avec une foule.

Bien que la performance ait été tapissée de petites débilités inoffensives et de tout un bazar de clichés associés au genre, Ghostface Killah a fait le travail. Certes, il a faussé sur quelques morceaux (il a carrément détruit l’un d’entre eux) et livré quelques pièces sans grande conviction, mais plusieurs passages étaient d’une étonnante efficacité. Dynamisé par le jeu de BadBadNotGood, le rendu a fait danser et chanter des centaines de spectateurs, qui semblaient s’amuser au maximum. Sur Daytona 500 (album Ironman sorti en 1996), Nutmeg ou encore la géniale et fédérative Rock N Roll (de Raekwon), il était en effet difficile de ne pas se déhancher.

« Oh, shit ! », lancera mille fois Ghostface Killah durant la soirée. « Oh, shit ! » est alors devenu une sorte de mantra, un message subliminal… Sans trop se forcer, on s’est laissé entraîner dans cette ambiance de party.

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