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Fauve, le calme après le blizzard (ENTREVUE/VIDÉOS)

Fauve, le calme après le blizzard
Courtoisie

Ils ont fait du chemin depuis qu’ils scandaient «nique sa mère le blizzard». C’était en 2014, Fauve exorcisait ses angoisses dans Vieux Frères Partie 1. Un an plus tard, le collectif d’anonymes a foulé pas mal de scènes et vient de donner une deuxième partie à ce disque. On y parle toujours d’amour, de baise, d’ivresse, de solitude, d’ennui, de métro, de souvenirs… un journal intime lu à haute voix avec un débit de parole filant à toute allure. Leur musique s’est enrichie, les textes s’éclaircissent et les enragés disent s’être apaisés. On s’est entretenu au téléphone avec Fauve entre deux répétitions d’une longue tournée qui s’achèvera cet été.

Comment se passe votre retour sur scène? La tournée de Vieux Frère Partie 1 a été particulièrement intense, vous vous sentez d’attaque pour cette nouvelle aventure?

Oui et même impatient. On a la perspective de jouer jusqu’à la fin de l’été, chaque date est très différente, il y aura des concerts dans des salles intimistes, d’autres dans des plus grosses. La rotation entre les salles, laisse le choix au public, rien ne se ressemble. Quand on joue dans les grosses salles, on débarque avec notre matériel, on investit les lieux, on ramène un baby foot, notre bouffe, des photos…

Quel était l’état d’esprit du collectif au moment de composer Frères de sang – Partie 2?

On comptait sur un disque plus riche, plus creusé, plus varié. On fonctionne de manière très instinctive. On n’a jamais fait de brouillon, par exemple pour notre premier album, on a découvert le sampling alors on a essayé. Et puis les influences, chacun les apporte, on a un fan de Fela Kuti qui voulait des rythmes différents… ça donne une chanson avec des percussions. Il y avait l’envie de faire un disque plus rock, de grossir le trait, de faire plus de contraste. On discute beaucoup avant de commencer à jouer, on échange nos idées et c’est souvent les plus folles qui triomphent. On peut être incohérent parfois si on parle de style à proprement parlé, il y a des ballades, du hip hop, du rock, du noise. On garde une homogénéité dans des textes francs et libres.

Vous aviez annoncé un disque plus lumineux, la fin du blizzard, pourtant il y a encore beaucoup de rigidité, de dureté dans ce disque. Vous êtes rattrapé par votre anxiété?

C’est vrai qu’on imaginait le disque plus joyeux. Mais il y a des moments heureux et ils le sont davantage. Il est surtout à notre image, plus apaisé: on se rend compte aussi qu’il y a plein de choses qui changent et d’autres non, ça aurait été un peu niais de faire un disque révérencieux. Les sources d’anxiété ont changé aussi: le thème métro-boulot-dodo était présent il y a deux ans, ca serait hypocrite d’en parler maintenant.

Et Paris dans tout ca? La ville est très présente dans vos chansons, vécue de l’intérieur et comme la responsable de quelques idées sombres…

Paris cristallise un peu tout ça: quand tu n’es pas bien il n’y a rien pour t’aider, pas de liberté de mouvement. Mais une fois de plus, il y a un apaisement, maintenant lorsque nous sommes sur les routes de France on prend du plaisir à rentrer. On entend cet adoucissement dans Juillet par exemple il y a plus de plénitude, c’est même plutôt joli.

Vous vous présentez comme un collectif auquel participe une trentaine de personnes. Comment vous vous organisez?

Pour cette tournée on accueille une sixième personne et pour l’album il y a le noyau dur et des gravitations qui vont se mobiliser. Tout le monde ne participe pas à tout c’est impossible. On est une bande de potes et on touche à plusieurs disciplines. Fauve fonctionne par projet sur la base de l’envie et du besoin : «si on faisait un fanzine ? Qui embarque ?», voilà comment on fonctionne.

Vous tenez à jouer dans des petites salles, vous divulguez des chansons sur Internet, vous ne faites pas d’affichage, vous restez anonyme, et à côté de ça vous vendez 100 000 albums, est-ce que tout ca reste compatible ?

C’est un choix. On essaye de s’adapter et c’est pour ça qu’on a monté les Nuits Fauves, on veut garder l’essence de ce qui est important pour nous. L’avantage c’est qu’on a besoin de personne pour nous diriger, pas de manager, pas de label. Après la sortie du 1er EP on a eu beaucoup de belles propositions et puis on a réfléchi. On l’a sorti seuls, par défaut, on a pris plaisir et on a vu qu’on était capable donc on a voulu continuer dans cette voie, on est fier du projet Fauve autonome. Les grosses voitures ne nous intéressent pas.

Si on retourne en 2013, au bout de cinq titre parus c’était déjà l’explosion, vous étiez attendu?

Pas une seule seconde on y a pensé au début. Mettez-vous à notre place à l’époque où on faisait ça, on sort des textes sombres et crus, on s’attendait à ce qu’on nous le reproche, d’être vus comme les rabat-joie de service. On a vraiment eu chaud au moment de présenter le projet. Dire si on était attendu… on ne peut pas répondre à cette question mais on a eu peur.

J’ai lu un commentaire sur YouTube qui disait : «FAUVE, c’est les séances de psy qu’on n’a pas eu», c’est ça la clé de votre succès?

On nous l’a déjà dit. On ne met aucun filtre, on extériorise, tous ces mots crus sont un passage direct de notre pensée à l’écrit d’où un sentiment d’identification pour notre public. C’est d’ailleurs pour ça qu’on écrit en français. Mais on fait notre propre psychothérapie, une thérapie de groupe, d’un point de vue égoïste, personnel.

Il y a chez vous cette grande révolte. Un journaliste d’ici vous a récemment affilié à de la contreculture, vous vous reconnaissez là-dedans?

On n’est pas anti système ni en colère contre quelque chose. On n’a pas de revendication particulière, on n’est même pas dans une démarche artistique précise... Fauve n’a pas été pensé dans l‘opposition. Plein de choses nous excitent, plein de choses nous révoltent, mais nous sommes dans une démarche sensible, pas politique.

Vous serez en tournée jusqu’à la fin de l’été, et après?

On fera une pause car on en a besoin, on ne veut rien prévoir. On avait tous des projets avant que l’on voudrait reprendre. On veut creuser un peu l’aspect vidéo qui jusque-là est mis au service de la musique. Plein de choses nous intéressent… un court-métrage, pourquoi pas faire de la musique de films. Pour être honnête, on a prévu de rien prévoir.

Un passage à Montréal?

On est en négociations, on aimerait revenir. Ce qui est très agréable ici, c’est le soutien au projet sans l’hystérie et ce buzz parfois flippant. Montréal est une ville cool, bienveillante, conviviale. Et puis c’est aussi là, avec Paris, où on a fait le plus de concerts finalement.

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