QUÉBEC - Véritable porte-étendard de la lutte féministe au Québec, Françoise David cède sa place de critique de la Condition féminine à sa collègue députée Manon Massé.
La décision est prise depuis plusieurs semaines chez Québec solidaire. Dès la fin de la relâche parlementaire, la députée de Sainte-Marie-Saint-Jacques occupera le devant de la scène dans ce dossier important pour la petite formation politique de gauche.
Le parti refuse toutefois d'y voir la préparation d'une relève pour ce caucus tenu à bout de bras par Amir Khadir et Françoise David. «La répartition des dossiers était déséquilibrée parmi les députés», explique Manon Massé.
L'automne dernier, une rumeur sur la colline parlementaire voulait que Françoise David, âgée de 67 ans, quitte ses fonctions de députée à l'été 2015. «Il n'en est absolument pas question», assure Manon Massé.
Pour l'instant, Françoise David n'a «pas pris de décision» quant à un éventuel nouveau mandat en 2018, précise un responsable des relations publiques chez Québec solidaire, Jérôme Bédard Wien. Mme David était injoignable durant la semaine de relâche.
Avant de fonder Option citoyenne, éventuellement fusionné avec l'Union des forces progressistes pour devenir Québec solidaire, Françoise David a dirigé la Fédération des femmes du Québec pendant sept ans.
Pour sa part, Manon Massé milite pour les droits des femmes depuis une trentaine d'années. Élue pour la première fois aux élections du 7 avril 2014, elle a participé aux côtés de Françoise David à l'organisation de la marche du Pain et des roses en 1995, puis à celle de la Marche mondiale des femmes en l'an 2000.
Dossiers chauds
Plusieurs dossiers chauds attendent Manon Massé à titre de nouvelle critique de la Condition féminine. Les parlementaires étudieront bientôt en commission parlementaire la question de la violence faite aux femmes, dans la foulée de la vague de dénonciation des agressions sexuelles non dénoncées, l'automne dernier. Un forum itinérant de trois jours suivra la commission parlementaire.
Pour Manon Massé, il faut que les parlementaires prennent conscience de la présence d'une «culture du viol» dans la société québécoise. En banalisant certains gestes inappropriés, on «entretient cette culture, on tient pour acquis que les femmes appartiennent à l'espace public, qu'elles appartiennent aux hommes», dit-elle.
Selon elle, le concept même de culture du viol est encore mal compris par la majorité des parlementaires à Québec. «Je ne suis pas certaine que les 124 autres députés diraient que, oui, il y a une culture du viol au Québec, dit-elle. Il y a encore de la conscientisation à faire.»
Québec solidaire dénoncera également les conséquences sur les femmes des compressions imposées par le gouvernement Couillard. Manon Massé souhaite notamment que le gouvernement procède à des analyses différenciées avant d'imposer ses mesures, afin d'en connaître l'impact sur les femmes.
L'austérité, plaide-t-elle, risque de nuire au rattrapage salarial dans les domaines traditionnellement féminins. «La santé, l'éducation, les garderies, ça c'est toutes des jobs qu'on faisait gratuitement avant, nous les femmes, lance Manon Massé. Ça fait seulement depuis les années 1960-1970 qu'on commence à avoir des salaires décents pour faire ce travail-là.»
L'arrivée de Manon Massé marque une rupture de ton avec Françoise David, généralement douce et diplomate. Manon Massé a longtemps œuvré dans les centres pour femmes et se décrit comme une femme de «terrain». «C'est évident que je suis un peu plus frondeuse que Françoise, concède Manon Massé. On ne vient pas de la même place.»
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