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Kasparov tenu en échec par un allié excentrique de Poutine à la tête de la Fide

Kasparov tenu en échec par un allié excentrique de Poutine à la tête de la Fide

La légende Garry Kasparov a échoué lundi dans sa tentative de s'emparer des rênes de la plus haute instance des échecs face au sortant, un allié excentrique du président russe Vladimir Poutine qui dit avoir été un jour enlevé par des extra-terrestres.

Candidat à la présidence de la Fédération internationale des échecs (Fide), Kasparov, l'un des meilleurs joueurs de tous les temps, a perdu par un score sans appel: sur 175 délégations, seules 61 ont soutenu l'ex-champion du monde, aujourd'hui âgé de 51 ans, en marge de l'Olympiade d'échecs à Tromsoe, dans le nord de la Norvège.

Indéracinable depuis 1995, le président sortant, le Russe Kirsan Ilioumjinov, a recueilli 110 suffrages, ce qui lui permet de rempiler pour quatre ans supplémentaires. Quatre bulletins ont été déclarés invalides.

Âgé de 52 ans, M. Ilioumjinov est un richissime bouddhiste qui a longtemps présidé la république russe de Kalmoukie.

Appuyé de manière à peine voilée par le Kremlin, il affirme être entré en contact en 1997 avec des extra-terrestres en combinaison jaune qui l'auraient transporté dans l'espace et avec lesquels il aurait pu communiquer par télépathie.

A la tête de la Fide, il s'est aussi distingué par ses liens avec des despotes comme Saddam Hussein et Mouammar Kadhafi, jouant même une partie d'échecs ultra-médiatisée contre ce dernier en juin 2011 en pleins bombardements de la Libye par l'Otan.

"Je vais oeuvrer pour les échecs et je veux consacrer toute ma vie à la Fide", a déclaré, dans un première réaction, celui qui se disait prêt à prendre sa retraite l'an dernier.

C'était avant que Kasparov n'annonce sa candidature.

La défaite est encore plus large qu'attendu. En 2010, une autre vedette des échecs, le Russe Anatoli Karpov, alors soutenu par son ancien rival Kasparov, s'était incliné face au même Ilioumjinov par 95 votes contre 55.

"Une défaite écrasante", a commenté lundi le grand maître international britannique Nigel Short, un allié du vaincu.

Pour l'emporter, M. Kasparov avait promis l'injection dans la discipline traditionnellement relativement désargentée des échecs de 10 millions de dollars par un sponsor, membre de son équipe.

Populaire parmi les "petites" fédérations nationales, dont la voix porte autant que celle des grosses fédérations occidentales acquises à son rival, M. Ilioumjinov avait immédiatement renchéri en sortant quelque 20,5 millions de dollars de son chapeau.

Lors d'un point de presse, il a peiné à préciser la provenance de ces fonds, semblant y inclure des budgets déjà existants.

Conduite sur un ton acrimonieux, la campagne précédant l'élection a été marquée par des accusations de corruption, de pressions et d'irrégularités de part et d'autre.

Opposant notoire du président Poutine, M. Kasparov a aussi essayé de donner à la campagne une tournure politique en insistant sur le fait que M. Ilioumjinov, ex-président de la république russe de Kalmoukie, passe pour être l'homme du Kremlin.

"Quand j'entends Ilioumjinov parler de démocratie, ça me rappelle Vladimir Poutine qui parle de paix", a-t-il déclaré avant le vote à la chaîne TV2 Nyhetskanalen.

Si le président Poutine n'a pas donné son appui officiel, la Russie a multiplié les gestes témoignant de son soutien à M. Ilioumjinov, qui vit à Moscou.

M. Kasparov a quant à lui obtenu la nationalité croate et est établi à New York, d'où il accuse notamment les autorités russes de dériver vers "le fascisme" et de s'ingérer dans la crise en Ukraine.

Au sein de la Fide, "l'Ouest a une attitude souvent arrogante et veut donner des leçons", a analysé Bachar Kouatly, présent à Tromsoe et qui fut en 1989 le premier grand maître international français.

"On a tendance à incriminer les petits pays, à dire que c'est de la corruption, mais il n'y a pas que ça: les Occidentaux sont ethnocentriques et manquent d'autocritique", a déclaré à l'AFP M. Kouatly, lui-même candidat malheureux à la présidence de la Fide dans les années 1990.

phy/amp/plh

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