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Sous le gouvernement Harper, le Prix Thérèse-Casgrain est remplacé par le Prix du premier ministre

Sous Harper, le Prix Thérèse-Casgrain n'est plus
PC

OTTAWA - Le gouvernement Harper a dépensé des millions de dollars pour commémorer la Guerre de 1812 et d'autres épisodes de l'histoire du Canada mais au passage, il a effacé au moins un élément parmi les plus inspirants.

Le nom de Thérèse Casgrain, une icône du féminisme et une héroïne du Québec décédée en 1981, a été retiré en catimini d'un honneur national, pour être remplacé par le premier ministre lui-même.

Le Prix Thérèse-Casgrain du bénévolat, créé en 1982 par le gouvernement libéral de Pierre Elliott Trudeau, a honoré des militants canadiens comme June Callwood jusqu'à ce qu'il soit aboli — sans que cela soit annoncé — par le gouvernement Harper en 2010.

Une photo de Mme Casgrain et de sa médaille éponyme sur les billets de 50$ a également été retirée, en 2012, pour faire place à l'image d'un briseur de glace, dans le cadre d'une nouvelle série de billets. Une photo d'un groupe de femmes surnommé les «Célèbres cinq» a aussi été enlevée de la même coupure.

«Ce fut très difficile pour la famille de voir cet honneur disparaître soudainement, a reconnu Michèle Nadeau, la petite-fille de Mme Casgrain, dans une entrevue. Ce fut une grande déception.»

En 2010, le ministère des Ressources humaines et Développement des compétences Canada, qui supervisait l'honneur immortalisant Mme Casgrain, a reçu la directive de créer un Prix du premier ministre pour le bénévolat, devant être décerné chaque année dans le cadre d'une cérémonie présidée par Stephen Harper.

Mme Casgrain s'est battue pour le droit de vote des femmes au Québec, qu'elles ont finalement obtenu en 1940. Elle est aussi devenue la première femme à diriger un parti politique au Canada, alors qu'elle s'est retrouvée à la tête du Parti social démocratique au Québec (un ancêtre du NPD), avant d'être nommée au Sénat par M. Trudeau en 1970.

Selon un porte-parole d'Emploi et Développement social Canada, le ministère qui a succédé aux Ressources humaines, le Prix Thérèse-Casgrain a fait l'objet d'une révision à la suite du discours du Trône, à l'automne 2010, lors duquel un projet visant à créer un nouveau prix pour les bénévoles avait été annoncé.

«Des discussions ont eu lieu avec la Fondation Casgrain, et il a été décidé que Ressources humaines et Développement des compétences Canada mette fin ... au programme, plutôt que de le réorienter et de le relancer», a précisé Pierre Nolet dans un courriel.

«Il n'y a eu aucune annonce publique de sa disparition. L'esprit et les objectifs du Prix Thérèse-Casgrain du bénévolat ont été maintenus dans deux catégories nationales du PPMB (Prix du premier ministre pour le bénévolat», a ajouté M. Nolet.

Cependant, Mme Nadeau affirme que sa famille et la Fondation Thérèse-Casgrain, établie à Montréal et qu'elle dirige, n'ont pas été consultées sur l'avenir du Prix.

«Nous avons été informées qu'une sorte de révision interne avait été effectuée par le ministère des Ressources humaines, et il a décidé de (le) discontinuer. Mais nous n'avons jamais été consultées.»

«En résumé, nous avons été avisées qu'à un certain moment donné, l'hommage serait discontinué. ... Les membres de la famille, les petits-enfants, les arrière-petits-enfants, étaient plutôt choqués.»

Inauguré en 2011, le Prix du premier ministre du bénévolat permet de récompenser 17 Canadiens de tous les coins du pays, chaque année. En 2014, la cérémonie a eu lieu le 27 février à Toronto, et M. Harper a lui-même présenté une médaille et un certificat à chacun des lauréats, en plus de se faire photographier avec eux.

Le Prix Casgrain avait été abandonné une première fois, par le gouvernement progressiste-conservateur de Brian Mulroney en 1990, avant d'être relancé en 2001 par les libéraux de Jean Chrétien.

Deux membres de la Fondation Thérèse-Casgrain siégeaient au sein du comité de sélection pour les deux prix présentés chaque année, mais le ministère des Ressources humaines était responsable de tout le volet administratif. Presque tout le même groupe de fonctionnaires gère maintenant le Prix du premier ministre.

Le ministère a donné à la famille Casgrain deux colis commémoratifs portant sur le Prix Thérèse-Casgrain et ses 31 lauréats, après sa disparition, incluant un livre et une copie de la médaille.

Une étude d'un groupe témoin, commandée par le gouvernement fédéral vers la fin de 2010, avait par ailleurs fait ressortir beaucoup de résistance à l'idée qu'un prix remis à des bénévoles soit nommé en l'honneur du premier ministre.

«Ils (les participants) étaient mal à l'aise avec la possibilité, à cause de la référence au 'premier ministre', que les prix soient perçus comme étant politiques de par leur nature», précisait le rapport de Harris-Decima.

«Des organisations sans but lucratif étaient particulièrement soucieuses par rapport à cette question.» Peu de participants considéraient que les termes «premier ministre» ajoutaient une notion de prestige.

Ces honneurs s'ajoutent à un autre prix fédéral récompensant des bénévoles, le Prix du Gouverneur général pour l'entraide, remis annuellement à des groupes et individus depuis 1995.

D'autres éléments de l'histoire du Canada n'ont pas été célébrés au cours des dernières années, dont les 25e et 30e anniversaires de la Charte des droits et libertés, entérinée en 1982 pendant le règne de Pierre Elliott Trudeau.

En 2012, M. Harper a laissé sous-entendre que des «divisions» entourant le rapatriement de la constitution expliquaient pourquoi le gouvernement n'a pas souligné le 30e anniversaire, faisant référence au fait que la province de Québec n'a pas paraphé l'entente.

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