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Elections municipales de Moscou: le Kremlin fait table rase de l'opposition

Elections municipales de Moscou: le Kremlin fait table rase de l'opposition

Perquisitions, écoutes téléphoniques, menaces et affiches diffamantes: pour les opposants au Kremlin, se porter candidat à l'élection municipale de Moscou qui se tiendra en septembre ouvre un long chemin de croix, et beaucoup finissent par jeter l'éponge.

Dotée de 35 sièges, l'assemblée (Mosgordouma) municipale de Moscou, entité politique quasi décorative et privée de tout véritable pouvoir de décision, est censée s'occuper des problèmes de la capitale aux 11 millions d'habitants, avec pour budget annuel une enveloppe de près de 37 milliards d'euros.

Pour les opposants au gouvernement, c'est la vitrine politique idéale. Mais seuls deux de la vingtaine des candidats indépendants qui souhaitaient se présenter à l'élection de septembre ont pu réunir à temps les documents nécessaires avant la date limite de vendredi.

Elu en 2012 pour un troisième mandat par moins de la moitié de la population, le président Vladimir Poutine, même s'il est devenu beaucoup plus populaire après le rattachement de la Crimée à la Russie en mars, semble vouloir accroître encore son emprise sur la société russe. Même la Douma de Moscou apparaitrait comme une menace au Kremlin qui souhaite en renforcer le contrôle.

"C'est de la peur. (Les autorités) doivent montrer qu'elles peuvent écraser n'importe qui", lance Nikolaï Liaskine, proche de l'opposant Alexeï Navalny, et qui dit avoir échoué à se présenter comme candidat parce que constamment harcelé.

Accusé d'avoir détourné des fonds destinés à la campagne de M. Navalny pour l'élection municipale de Moscou l'an dernier, M. Liaskine assure avoir retrouvé dans sa voiture un dispositif d'écoute et de traçage.

Ses rendez-vous de campagne, raconte-t-il encore, sont sans cesse émaillés d'incidents provoqués par des personnes "qui hurlent contre les meurtres en Ukraine orientale", où les prorusses affrontent les forces gouvernementales.

"Ce qui a changé (depuis que Vladimir Poutine est président, ndlr), c'est que les gens ont cessé de croire qu'il est possible de changer", explique l'opposant.

Car, plus que de l'hostilité, c'est surtout une apathie générale de la part des Moscovites à laquelle se heurtent les candidats à l'élection municipale. D'autant plus que le héraut des manifestations de masse en 2011, Alexeï Navalny, a été assigné à résidence, une condamnation destinée selon l'opposition à le couper d'une éventuelle base électorale.

Comme M. Liaskine, la candidate Olga Romanova a reçu des menaces et a vu des affiches l'accusant d'être une "fasciste" financée par le parti ukrainien ultranationaliste Pravy Sektor, banni et diabolisé en Russie.

Elle aussi n'a pas pu compléter son dossier de candidature, à cause de changements législatifs tardifs qui ont obligé les candidats à réunir environ 5.000 signatures, conformes à celles des passeports, dans leur quartier.

"C'était le but du régime: construire une très haute barrière", souligne Alexeï Makarkine, analyste politique du Centre des technologies politiques. "L'opposition est affaiblie, elle est en déclin, beaucoup de personnes sont déçues par elle".

"Il y a eu un changement d'humeur. Les gens ont peur d'inscrire leurs noms en faveur de l'opposition, peur d'être licenciés, convoqués par la police, peur de la guerre et de l'instabilité", ajoute l'analyste. "C'est une peur qui nous revient de l'époque soviétique".

"Personne ne veut être la cinquième colonne", conclut-il, en référence au terme utilisé par Vladimir Poutine pour décrire la dissidence intérieure lors d'un discours historique en mars alors que la Russie et les Occidentaux connaissaient leur plus vif affrontement depuis la fin de la guerre froide.

La volonté des Russes de protester contre le gouvernement a atteint un plus bas historique en dix ans, selon un rapport publié vendredi par le centre indépendant russe de sondages Levada.

81% des Russes estiment que des protestations politiques dans leur ville sont peu probables, le plus haut taux enregistré par le centre Levada en 17 ans. 9% seulement se disent prêts à y participer dans leur quartier.

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