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Pour les habitants de Lougansk, la guerre se rapproche

Pour les habitants de Lougansk, la guerre se rapproche

A Lougansk, ville de près d'un demi-million d'habitants tenue par les séparatistes prorusses dans l'est de l'Ukraine que le gouvernement de Kiev promet d'encercler, la guerre s'est brusquement rapprochée, et les habitants ont peur.

Mardi, peu avant 14 heures, quatre obus de mortier tombent sur le quartier "Oktyabrsky", ensemble d'immeubles préfabriqués de huit étages, construit dans les années 1970 dans l'ouest de la ville.

"Regardez". Maria Maximovna, tend la main, montre un éclat de métal tordu. "Ca a traversé mon balcon, et toute la pièce. C'était brûlant. J'ai eu tellement peur". D'ailleurs, cette veuve de 65 ans en sursaute encore le lendemain, à chaque coup sourd des tirs d'artillerie qui résonnent encore régulièrement, notamment au nord de la ville.

Mardi, un des obus a traversé le toit d'un immeuble, les autres ont soufflé des vitres sur de nombreuses façades. Par chance, il n'y a eu que deux blessés légers.

Tir délibéré ou accident -aucun objectif militaire évident n'est visible à proximité- le bombardement a exaspéré la colère des habitants contre les autorités de Kiev, qui ont lancé une "opération antiterroriste" contre les séparatistes prorusses qui ont occupé depuis avril plusieurs villes de l'est et du sud-est du pays.

"Ceux qui nous tirent dessus, ils portent des croix gammées," assure Iouri, 59 ans, conducteur de bus à la retraite, reprenant le discours rebelle, qui taxe les loyalistes de "fascistes" ou "nazis". Comme la plupart des témoins, il préfère ne pas donner son nom de famille, de peur de représailles, assure-t-il. On lui demande quelle issue à la crise il voit, juste au moment où une nouvelle détonation retentit. "Ecoutez, le voilà l'avenir".

Comme beaucoup des gens du quartier, Tatiana, 56 ans, retraitée, vit là depuis 33 ans, quand les immeubles ont été livrés flambants neufs à leurs habitants. Elle était chez elle quand les obus sont tombés. Toutes ses vitres ont été soufflées. "J'ai eu si peur. Ils nous traitent de terroristes mais de quels terroristes? Des civils et des enfants, c'est tout ce qu'il y a ici".

Partout, des éclats de verre crissent sous les pas. Les habitants tentent de remettre un peu d'ordre, boucher les fenêtres béantes.

Tenant par la main une fillette aux couettes, Tatiana Nikolaïevna est en pleurs. "J'ai quatre petits-enfants, mon gendre est malade, alité. je n'ai pas touché ma retraite depuis deux mois. Dites à (président ukrainien Petro) Porochenko de nous laisser en paix".

En ce mercredi, Lougansk est comme déserte. Peu de circulation, les rares passants se pressent devant un des derniers distributeurs de billets à fonctionner.

Dans le quartier de Kamenibrodsky, dans les faubourgs nord de la ville, un check point séparatiste, au lieu dit "Métalliste", a été déserté. Seuls restent quelques blocs de béton sur la route, on ne voit plus un combattant dans la zone.

A quelques centaines de mètres, Evgueni, 54 ans, sa femme Olga 48 ans, et leur fils Oleg, 8 ans, rentrent chez eux, à pied. "Ils nous bombardent avec des avions, des canons," peste Olga. "Hier, une femme sortait du magasin, un obus de mortier est tombé. On l'enterre demain".

Est-ce qu'ils pensent partir? "Pour aller où? On n'a nulle part où aller," dit Evgueni. "Qu'ils nous bombardent, qu'ils nous tuent. La seule chose c'est notre enfant, on va le faire partir, il ne dort pas, il crie", dit Olga.

"Comment peut-on dire que nous sommes des terroristes, alors que la moitié des gens qui vivent ici sont Ukrainiens?", lâche Evgueni. "Tout ce que nous voulons c'est une fédération, mais ici il y a une extermination d'un peuple en cours, tout ça parce qu'on veut parler russe".

so/neo/bir

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