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Canada: un an après la tragédie ferroviaire, le train siffle à nouveau à Lac-Mégantic

Canada: un an après la tragédie ferroviaire, le train siffle à nouveau à Lac-Mégantic

Un an après l'explosion meurtrière d'un convoi de wagons-citernes, les locomotives sifflent à nouveau dans la bourgade québécoise défigurée de Lac-Mégantic, où la population souhaite les bannir à jamais.

Pour le moment, seul du bois transite par rail sur les ruines de la zone de 2 km2 dévastée, mais cela suffit à épouvanter les habitants de cette ville de 6.000 habitants qui vivent désormais dans un immense chantier.

"Les gens détestent ça", confie Édith, gérante d'une épicerie située à une cinquantaine de mètres du virage où le convoi de 72 wagons chargés de pétrole brut a déraillé aux petites heures du 6 juillet dernier.

Sous la violence de l'impact, la pire catastrophe ferroviaire au Canada, un gigantesque brasier avait mis près de deux jours à être circonscrit, et sept des 47 victimes n'ont jamais pu être identifiées.

Si pour le moment le transport de matières dangereuses est interdit dans Lac-Mégantic, les habitants sont convaincus que "ce ne sera pas long avant que les wagons noirs reviennent", affirme de guerre lasse la commerçante.

Son échoppe, comme l'Église qui y fait face, a été épargnée miraculeusement par le brasier. Et depuis la tragédie, elle constate jour après jour le désespoir de ses clients, fatigués par la reconstruction fastidieuse et les indemnisations d'assurance qui se font attendre.

Son mari Jocelyn résume l'ambiguïté qui tiraille les habitants: "S'il n'y avait plus de train, on serait une ville fantôme". Car les quelques industries locales dépendent du transport ferroviaire pour exporter leurs produits forestiers.

De ce fait, les voies ferrées figurent parmi les premières infrastructures reconstruites depuis le drame, au début de l'hiver.

Autour des rails flambant neufs, des bulldozers retournent encore la terre qui a été contaminée jusqu'à sept mètres de profondeur par ce pétrole de schiste en provenance des champs du Dakota du Nord, au nord des États-Unis, et destiné à une raffinerie de la côte atlantique canadienne.

Mais des rues commerçantes qui bordaient jadis le lac, il ne reste plus rien. Trente bâtiments ont été carbonisés, et autant sont en attente de démolition. Toute la végétation a disparu et seuls quelques arbres jouxtant les limites de cette zone dévastée survivent encore, à moitié calcinés.

Quelques magasins, et notamment le bar où ont péri une majorité des victimes, finissent d'être rebâtis à un jet de pierre du centre-ville anéanti, en attendant que la municipalité adopte un plan de reconstruction global.

Elle a lancé pour cela de multiples consultations publiques, même auprès des élèves de maternelle. "Pour une ville de cette taille, c'est du jamais vu", de l'avis d'une urbaniste impliquée.

Lors d'une séance tenue un soir de juin, quelque 350 habitants étaient ainsi appelés à commenter les avant-projets de réaménagement qui prévoient notamment la construction d'un grand hôtel, d'une "forêt urbaine" et d'une place publique au bord du lac.

Très souvent, la question de la voie ferrée est revenue: sur le plan présenté, le train continue à traverser la ville. "Ca va rester une plaie si on ne la bouge pas", estime Marcel Philippon, un retraité qui juge "très ambitieux" le projet des urbanistes.

La municipalité doit adopter "un plan d'action" tiré de ces recommandations à la fin de l'année, mais personne ici n'ose présager de l'avenir de la voie ferrée. La voie de contournement à construire n'est que de neuf kilomètres, mais il en coûterait entre 50 et 150 millions de dollars, selon les premières estimations.

Le chemin de fer ayant été privatisé, ni le propriétaire américain, ni les autorités québécoises ne semblent décidés à assumer ces coûts seuls.

Pourtant, note Rémi Tremblay, le rédacteur en chef de l'Écho de Frontenac, le journal local, établir une voie de contournement "c'est à peu près la seule chose qui fait consensus".

sab/jl/are

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