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18 juin 1940: la mission oubliée pour évacuer la famille de Gaulle

18 juin 1940: la mission oubliée pour évacuer la famille de Gaulle

Le 18 juin 1940, au petit matin, un hydravion décolle du sud-ouest de l'Angleterre pour une mission des plus secrète: évacuer, face à l'avancée vers l'Ouest de l'armée allemande, la famille du général de Gaulle en résidence à Carantec, dans le Finistère.

Mais quelques heures seulement après son décollage, l'aéronef s'écrasa, pour une raison inconnue, dans un champ situé sur la petite commune bretonne de Ploudaniel.

A son bord, deux Australiens et deux Britanniques: le capitaine John Bell, 24 ans, et le sergent Charles Harris, 31 ans - les deux premiers morts australiens de la Seconde guerre mondiale -, ainsi que le caporal Bernard Nowell, 22 ans, et le capitaine Norman Hope, 37 ans, des services secrets britanniques.

Le même jour, Charles de Gaulle lançait de Londres son célèbre appel à la résistance.

Alors colonel, il avait pris part à la campagne militaire contre l'invasion allemande en mai 1940 avant d'être brièvement nommé le 6 juin sous-secrétaire d'Etat à la guerre.

Au moment où le maréchal Pétain négociait un armistice et instaurait un gouvernement qui allait collaborer avec l'occupant allemand, Charles de Gaulle rejoignait Londres, d'où il lançait sur les ondes de la BBC "l'appel du 18 juin", exhortant les Français à continuer le combat.

Il allait réunir sous son autorité les différents mouvements de résistance contre l'occupant allemand et permettre à la France de figurer parmi les vainqueurs de la guerre.

Marié à Yvonne Vendroux, il avait trois enfants, dont une petite trisomique, Anne, avec laquelle il se montrait particulièrement chaleureux.

Pour rendre hommage aux quatre soldats alliés morts en tenant de sauver la famille du chef de la France libre, une stèle a été érigée en 2013 à proximité des lieux de l'accident.

Une cérémonie inédite leur a été dédiée mercredi, en présence de deux délégations, l'une britannique, l'autre australienne, composées des descendants des aviateurs et d'officiers.

Les hymnes des trois pays ont été entonnés juste après le passage de deux Rafale au-dessus des quelque 200 personnes réunies pour l'occasion sous un soleil éclatant.

"Cette journée est formidable", assure Bruce Harris, le fils de Charles Harris. "Mais pendant 50 ou 60 ans il n'y a rien eu, aucune reconnaissance et rien ne nous a été dit à ma mère et à moi, ainsi qu'aux autres familles" de ce qui était arrivé, regrette-t-il.

"Ma mère n'a pas su pendant plusieurs années où mon père avait été enterré, et moi, enfant, j'attendais son retour à la maison", raconte l'homme de 76 ans, visiblement ému.

Les corps des quatre soldats furent inhumés le lendemain de l'accident au cimetière de Ploudaniel, où ils reposent toujours.

"L'avion est tombé là et j'ai vu trois corps", se souvient Etienne Pengam, 91 ans, voisin du champ où l'appareil s'est écrasé alors qu'il avait 17 ans. "Il y avait du brouillard, il a dû voler trop bas", avance-t-il.

"Ce jour est très spécial pour moi", témoigne également Philip Morgan, l'un des neveux du capitaine Hope, expliquant que son oncle se trouvait dans cet avion parce qu'il parlait couramment le français.

"Nous sommes très fiers de ce qu'il a fait, sa mission était vraiment spéciale", estime l'homme de 78 ans, élégamment vêtu, un panama sur la tête.

La mission, ordonnée par Winston Churchill, consistait à évacuer Yvonne de Gaulle et ses trois enfants de la localité de Carantec, où elle s'était réfugiée le 11 juin pour fuir les combats.

Mais ignorant tout de la mission qui devait l'évacuer par les airs, elle quitta Carantec le 18 juin dans l'après-midi pour rejoindre en voiture Brest, avant d'embarquer à bord d'un navire marchand qui accosta le lendemain matin à Falmouth, en Angleterre.

Les Britanniques n'ayant eu aucune nouvelle de l'hydravion et ignorant que la famille de Gaulle avait réussi à rejoindre saine et sauve l'Angleterre, envoyèrent le 19 juin une vedette lance-torpilles de la Royal Navy. Une fois sur place, ils apprirent le départ de la famille de Gaulle, mais n'obtinrent aucun renseignement sur l'hydravion, que personne n'avait vu.

"Il y a quelques années m'est venue l'idée de chercher quelle était l'histoire de cet avion, on disait qu'il était tombé là, qu'il avait une mission pour Mme de Gaulle, mais on n'avait aucune certitude", explique le maire de Ploudaniel, Joël Marchadour.

Désormais, une exposition permanente, inaugurée cette semaine au musée maritime de Carantec, retrace cette page d'histoire peu connue.

A la Libération, Charles de Gaulle a présidé un gouvernement provisoire, démissionné en 1946, avant que la république ne le rappelle en 1958 pour prendre la tête du pays fragilisé par la guerre de décolonisation en l'Algérie. Il sera président de 1958 à 69.

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