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Ukraine: trois semaines pour apprendre la guerre avant le départ pour l'Est

Ukraine: trois semaines pour apprendre la guerre avant le départ pour l'Est

Une détonation assourdissante retentit et un nuage de fumée s'élève du canon du lance-roquettes. En périphérie de Kiev, les volontaires ukrainiens du "bataillon Donbass" se préparent en accéléré à combattre les séparatistes dans l'Est, dont ils sont en majorité originaire.

Le portail de tôle du camp du ministère de l'Intérieur, à Novi Petrivtsi, s'ouvre dans un grincement et une trentaine d'hommes en sortent en petites foulées, certains en treillis militaire, d'autres torse nu, criant pour s'encourager: "Gloire à l'Ukraine!"

Une quinzaine de minutes plus tard, ils repassent en chemin inverse. Une partie du groupe peine à suivre la cadence. L'entraînement vient de commencer pour ces engagés et le temps presse.

Leur formation ne durera que trois semaines avant le départ sur le front pour soutenir l'armée ou les forces spéciales du ministère de l'Intérieur, à la peine depuis près de deux mois contre les insurgés prorusses des régions de Donetsk et Lougansk.

"Il n'y a que les idiots qui n'ont pas peur. Bien sûr que tout le monde a peur", reconnaît un engagé de 49 ans qui se présente comme Roni, casque et uniforme flambant neufs et dont le visage est caché par un passe-montagne, comme tous ses compagnons.

Mais "tout le monde est prêt au combat", assure ce médecin de formation, qui s'entraîne à tirer à la mitrailleuse dans un terrain boueux. A ses côtés, d'autres combattants tirent au lance-roquettes vers des objectifs à plusieurs centaines de mètres.

Roni dit s'être engagé après le rattachement de la Crimée à la Russie pour pouvoir "regarder dans les yeux" son fils. Il a d'abord cherché à intégrer les forces régulières pour "payer sa dette à (sa) patrie, qui n'a pas voulu" et a trouvé le numéro de téléphone du "bataillon Donbass", qu'il a intégré.

Cette unité, qui porte le nom du bassin minier actuellement en proie à la rébellion, a été créée il y a à peine quelques semaines par un ancien militaire et entrepreneur de 38 ans, Semen Sementchenko. Ce dernier a réuni des volontaires par un appel sur Facebook dans la région russophone de Dnipropetrovsk, voisine de celle de Donetsk.

Il s'agissait alors d'un groupement sans aucun lien avec les autorités, financé selon lui par des dons publics, et composé en majorité de représentants des régions de l'Est.

Depuis, le bataillon a fini par rejoindre les rangs de la Garde nationale formée par les autorités pro-occidentales à l'aide de volontaires, souvent issus de la contestation qui a renversé le président Viktor Ianoukovitch et qui souhaitaient poursuivre la lutte.

L'objectif n'a pas changé: montrer que les hommes du Donbass ne s'engagent pas que du côté prorusse. Si le recrutement s'est élargi aux autres régions, la majorité des 360 combattants viennent de l'Est, et il faut le faire savoir.

"C'est un mensonge de dire que le Donbass s'est soulevé contre Kiev", tempête M. Sementchenko en faisant visiter le camp d'entraînement à un groupe de journalistes.

Comme ses hommes, M. Sementchenko porte en permanence un passe-montagne noir, y compris lorsqu'il est invité au journal télévisé.

"Notre objectif prioritaire: aider à défendre la frontière, c'est à dire l'identification et l'élimination des groupes de terroristes", assure-t-il.

Au programme des trois semaines de formation: apprentissage de la discipline militaire (l'alcool est interdit), mise en forme physique, entraînement à l'utilisation des armes lourdes.

Pour cela, le bataillon dispose d'un équipement neuf --armes, uniformes, gilets pare-balles, lunettes de protection-- en partie de fabrication américaine, tranchant avec l'apparence parfois miséreuse des soldats de l'armée régulière, en manque criant de financement.

"Nous avons tout acheté nous-mêmes", assure M. Sementchenko. "Nous avons l'aide des oligarques, nous bénéficions de l'aide de certains entrepreneurs mais surtout de la population", poursuit-il, balayant de la main les soupçons selon lesquels ils défendent certains intérêts privés.

Trois semaines suffisent-elles à former des combattants capables de s'opposer à une insurrection de plus en plus violente, à laquelle se sont ralliés des hommes armés tchétchènes, selon les Etats-Unis?

"On fait ce qu'on peut", répond Fil, entre deux séances de tirs à l'arme automatique. "Préparez-vous à notre arrivée" dans l'Est, prévient-il, "et nous le libèrerons des séparatistes".

gmo/neo/abk

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