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Dans le Nord du Cameroun, la "guerre" contre Boko Haram a commencé

Dans le Nord du Cameroun, la "guerre" contre Boko Haram a commencé

"Descendez tous. Tenez vos affaires en mains car nous allons procéder à une fouille". Le long d'une route défoncée et poussiéreuse, un militaire passe en revue les passagers d'un car exténués par des heures de voyage dans l'extrême Nord du Cameroun.

"Nous sommes partout dans la région", assure le soldat posté dans les environs de Dabanga, localité de la région de l'Extrême-Nord frontalière du Nigeria où la famille française Moulin-Fournier avait été enlevée en 2013 par les islamistes du groupe armé nigérian Boko Haram.

Fouille des voitures, vérification des pièces d'identité des passagers: "nous recherchons des armes, des munitions, de la drogue", explique le militaire.

Casque vissé sur la tête, gilet pare-balles bien serré autour du corps, il arrête systématiquement tous les véhicules circulant sur l'axe Maroua-Kousseri. A quelques mètres de là, un fusil mitrailleur posé à l'arrière d'un pick-up se veut dissuasif.

Le Cameroun a déployé ces derniers jours un impressionnant dispositif militaire dans l'Extrême-Nord, devenu la cible d'attaques sanglantes et d'enlèvements d'Occidentaux répétés, mais aussi une plaque tournante du trafic d'armes destiné à Boko Haram.

Au total, près de 3.000 soldats et gendarmes doivent être mobilisés dans les prochaines semaines. Déjà, le long des principaux axes comme sur les routes secondaires, de petits groupes de militaires patrouillent à bord de blindés, tandis que des avions de combats et des hélicoptères sillonnent le ciel.

Ce déploiement intervient deux semaines après un sommet à Paris, qui a réuni plusieurs chefs d'Etat voisins du Nigeria dont le Camerounais Paul Biya, pour lutter ensemble contre Boko Haram, qualifié de "menace majeure" pour la région.

La rencontre a débouché sur l'adoption d'un plan de "guerre" commun, alors que le Cameroun faisait jusque-là figure de maillon faible, accusé de passivité face aux agissements des islamistes nigérians sur son propre sol.

"Jusqu'à présent, le Cameroun évitait une confrontation frontale avec Boko Haram", mais désormais, "les militaires ont le droit d'ouvrir le feu face à des suspects qui ne respectent par les sommations", souligne un officier de policier de la région qui tient lui aussi à rester anonyme.

"Il faut s'attendre à des victimes dans cette guerre", prévient-il, alors les attaques se sont multipliées ces dernières semaines.

Ainsi, le 17 mai, un soldat camerounais a été tué et 10 Chinois enlevés sur un chantier de construction lors d'une violente attaque attribuée à Boko Haram, créant la pychose dans la ville de Waza (extrême nord du Cameroun).

Des islamistes ont également détruit début mai la ville frontalière nigériane de Gamboru Ngala, où ils sont arrivés par dizaines à bord de véhicules blindés, tirant sur les habitants qui ont fui au Cameroun voisin. Selon plusieurs sources locales, l'attaque a fait au moins 300 morts.

Dans les villes frontalières les plus sensibles comme Fotokol, Dabanga, ou Amchidé, on croise désormais des dizaines de soldats du Bataillon d'intervention rapide (BIR), une unité d'élite de l'armée camerounaise spécialisée dans la lutte contre le terrorisme.

"L'idée c'est de créer des bases fixes avec des effectifs costauds prêts à réagir en cas d'attaque", explique sous couvert d'anonymat un responsable de la gendarmerie impliquée dans les opérations de terrain dans les environs de Fotokol (zone du lac Tchad).

Objectif de l'opération: "fermer la route aux terroristes et tenir la frontière pour que les Boko Haram acculés (par l'armée) au Nigeria ne se réfugient pas ici", assure ce gendarme pour qui les "données sont en train de changer".

Jeudi, une trentaine de Nigérians en situation irrégulière suspectés d'appartenir à Boko Haram ont été interpellés et remis aux autorités nigérianes, signe que le Cameroun ne reste plus inactif.

Autre point positif pour l'armée camerounaise: la libération dimanche de trois otages occidentaux enlevés dans le nord du pays début avril, les prêtres italiens Giampaolo Marta et Gianantonio Allegri et la religieuse canadienne Gilberte Bussier.

Les enlèvements n'ont pas été renvendiqués, mais les forces de sécurité camerounaises les ont rapidement attribués à Boko Haram.

Dans la nuit de samedi à dimanche, les militaires camerounais sont allés les récupérer dans les environs de Limani, une localité nigériane proche de la frontière, selon une source au sein de l'armée.

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