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Présidentielle en Ukraine: dans les régions séparatistes, les électeurs se demandent où voter

Présidentielle en Ukraine: dans les régions séparatistes, les électeurs se demandent où voter

Combien de kilomètres Olexandre Mossiïtchouk devra-il parcourir dimanche pour trouver un bureau de vote ouvert ? "Nous sommes prêts à faire deux ou trois heures de route", dit ce pasteur de Makiïvka, dans l'Est aux mains des séparatistes qui pourraient perturber la présidentielle.

"Il y aura de gros problèmes", le jour de l'élection, prophétise cet habitant d'une ville de la banlieue de Donetsk, l'un des bastions de l'insurrection armée pro-russe qui depuis un mois défie le pouvoir à Kiev. "Je sais que nos chers séparatistes veulent arrêter les élections. Je vais tenter par tous les moyens de voter mais je ne sais ni où ni comment", affirme-t-il.

Comme Olexandre, une partie des électeurs reste déterminée à voter malgré le danger et l'incertitude sur l'organisation du scrutin dans l'Est.

"Même si c'est risqué, j'irai voter, c'est mon droit. Je veux que notre pays soit uni et souverain", explique Pavlo Koussovlev, cadre de 27 ans à Donetsk et père de deux enfants.

A une semaine du scrutin qui doit décider du nouveau visage qui succèdera au président déchu Viktor Ianoukovitch, la Commission électorale à Kiev a tiré la sonnette d'alarme. Faute de sécurité, dans plusieurs parties des régions de Donetsk et de Lougansk, près de 2 millions d'électeurs pourraient être privés de vote.

Alexandre Borodaï, le très mystérieux consultant russe devenu "Premier ministre" de la "République populaire de Donetsk", a prévenu: "il n'y aura pas d'élection à Donetsk, aucune".

Pour l'instant personne ne peut dire en effet à quel endroit dans la région il sera possible de déposer son bulletin dans l'urne, ni si la sécurité des votants sera assurée. Pas même les responsables chargés de l'organisation du scrutin.

"Je ne suis pas capable de protéger 3,5 millions de votants", se désole Serguiï Tkachenko, l'un des responsables de la commission électorale de la région de Donetsk. "Si les élections n'ont pas lieu à Donetsk, le cauchemar se poursuivra durant les années à venir".

Comment préparer des élections quand vos locaux sont saisis, le matériel détruit et les membres des commissions menacés ?, demande M. Tkachenko.

"La vie des membres des commissions électorales est en danger. Ils ont très peur et doivent se cacher", affirme cet homme qui vit, lui-même, à l'hôtel et dont la famille a été évacuée de la région.

D'après un dernier sondage, seuls un tiers des électeurs de l'Est seraient prêts à participer au scrutin alors que plus de 70% d'entre eux avaient participé à la dernière présidentielle de 2010, remportée par Viktor Ianoukovitch, originaire de la région.

"Dans cette situation, nous avons évidemment peur d'aller voter, nous avons peur de vivre", raconte Alla Moskalets, qui estime toutefois que "c'est le dernier espoir avant la guerre civile".

Sans quitter des yeux sa fille qui joue dans la salle d'à côté, elle ajoute: "Je vais aller voter parce que je pense que le pays est impuissant en ce moment. L'élection d'un président permettra, avec un peu de chance, de rétablir l'ordre dans le pays".

"Je suis prête à aller m'enregistrer ailleurs", affirme-t-elle mais "sortir de la ville est dangereux à cause des postes de contrôle qui sont aux mains de gens armés qui peuvent arrêter le moindre véhicule sans fournir d'explications".

La délocalisation hors de la région pourrait en effet être le seul moyen d'être sûr de voter, concède M. Tkachenko. "Les électeurs peuvent avant le 19 mai, date de clôture des listes électorales, s'enregistrer dans un bureau dans un lieu sûr, en dehors de la région", explique-t-il.

Mais il faut revenir le dimanche pour voter au même endroit. Et "au final, rien ne garantit qu'il sera possible de quitter la ville, encerclée par les rebelles, le jour de l'élection!", reconnaît, désespéré, Serguiï Tkachenko.

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