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France/financement libyen: quand Sarkozy s'inquiétait de la fidélité du patron du renseignement

France/financement libyen: quand Sarkozy s'inquiétait de la fidélité du patron du renseignement

Pressant, agacé, inquiet: l'ex-président français Nicolas Sarkozy se préoccupait en juin 2013 auprès de son plus proche collaborateur de l'avancée d'une enquête sur les accusations de financement par la Libye de sa campagne présidentielle de 2007, selon des retranscriptions d'écoutes téléphoniques consultées par l'AFP.

L'ancien président ne sait alors pas que les juges ont placé sur écoute son directeur de cabinet, Michel Gaudin, membre de sa garde rapprochée depuis son passage au ministère de l'Intérieur.

Ancien directeur général de la police nationale, ex-préfet de police de Paris, Michel Gaudin semble se considérer à l'abri des "grandes oreilles" de la justice, à en croire ses appels à Nicolas Sarkozy, qu'il a suivi après la défaite de 2012 dans son nouveau QG parisien. Des échanges consultés par l'AFP et dont Le Monde a publié jeudi les retranscriptions.

Les enquêteurs y entendent celui qui fut leur patron s'entretenir avec son directeur de cabinet à la préfecture de police Jean-Louis Fiamenghi, parti dans le privé après l'alternance.

Le 21 juin 2013, celui-ci explique qu'un cadre dirigeant du groupe européen EADS, bon connaisseur de l'Afrique, dispose d'informations susceptibles de l'intéresser via un fonctionnaire de l'Intérieur. "Des trucs intéressants", "un peu pointus", dit Jean-Louis Fiamenghi.

Or la veille, la chaîne France 2 a diffusé une interview de l'interprète de Mouammar Kadhafi, Moftah Missouri, qui répète les accusations de financement occulte de la campagne victorieuse de 2007.

Michel Gaudin appelle le patron de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) Patrick Calvar, qui a la particularité de ne pas être un "Sarko-flic" même s'il entretient des relations cordiales avec plusieurs représentants de ce cercle.

L'échange est urbain. Michel Gaudin assure ne pas vouloir le mettre en difficulté mais explique avoir reçu une information selon laquelle la DCRI aurait entendu Moftah Missouri.

Surpris, Patrick Calvar dit qu'il n'est pas au courant, promet une "rapide vérification" qui sera faite dans l'heure. Il raccroche... et ne donne pas suite.

Entendu comme témoin par les juges le 28 mars, le policier relèvera n'avoir "fourni aucune information" au préfet Gaudin. Sa promesse de vérifications n'était qu'une "solution d'esquive, diplomatique" pour éconduire en douceur son interlocuteur.

C'est d'ailleurs l'interprétation qui pointe au QG de Nicolas Sarkozy. Le 24 juin, l'ex-président et Michel Gaudin s'inquiètent: ce silence ne serait-il pas le signe que la DCRI a bien entendu Missouri?

L'ex-chef de l'Etat, qui conserve des relais dans la hiérarchie policière, s'enquiert de savoir si Patrick Calvar lui est "fidèle", de ses liens avec son prédécesseur Bernard Squarcini, un proche. Michel Gaudin le rassure: "on l'a beaucoup aidé".

Nicolas Sarkozy explique avoir appelé directement Patrick Calvar, s'être montré pressant, sans obtenir plus d'information.

Tout comme deux autres proches, Claude Guéant et Brice Hortefeux, l'ex-président sera aussi placé sur écoute par les juges, le 3 septembre 2013.

Ses conversations avec son avocat depuis un téléphone enregistré au nom de Paul Bismuth ont conduit à une information judiciaire le 26 février pour trafic d'influence et violation du secret de l'instruction: les deux hommes ont-ils sollicité un haut magistrat à la Cour de cassation pour obtenir illégalement des informations sur l'affaire d'abus de faiblesse présumé de la milliardaire Liliane Bettencourt ?

Un échange téléphonique entre Brice Hortefeux et l'ancien patron de la police judiciaire parisienne Christian Flaesch a conduit, lui, au limogeage de ce dernier en décembre. Le policier semblait indiquer à son ancien ministre comment préparer une audition.

Derrière le fils du dictateur déchu, Seif al-Islam, plusieurs anciens dignitaires libyens ont affirmé que Mouammar Kadhafi avait financé la campagne de Nicolas Sarkozy. D'autres ont démenti.

Selon une source proche du dossier, les juges tentent de trouver trace d'éventuels mouvements financiers. Sans apporter de document, un témoin leur a décrit en mars les circuits usuellement empruntés par les fonds libyens aboutissant en France sous Mouammar Kadhafi, a ajouté cette source.

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