Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Peu d'espoir de fin rapide du conflit au Soudan du Sud malgré le récent accord (analystes)

Peu d'espoir de fin rapide du conflit au Soudan du Sud malgré le récent accord (analystes)

La fin du conflit au Soudan du Sud, promise par l'accord signé vendredi à Addis Abeba, est encore loin, estiment les analystes, les chefs des deux camps rivaux restant dans une logique militaire et n'ayant qu'un contrôle relatif sur leurs troupes.

Comme le précédent cessez-le-feu, péniblement conclu le 23 janvier, la promesse d'un arrêt des hostilités contenue dans cet "Accord pour mettre fin à la crise au Soudan du Sud", signé vendredi par le président Salva Kiir et par son ancien vice-président Riek Machar, n'aura pas tenue longtemps.

Dès dimanche, le gouvernement et le camp de M. Machar - qui a pris la tête d'une rébellion mi-décembre après avoir été accusé de tentative de coup d'Etat - se reprochaient mutuellement d'avoir repris le combat.

"Sans un contrôle efficace, mis en place sur le champ, ce cessez-le-feu n'avait pas la moindre chance", constate Eric Reeves, professeur au Smith College aux Etats-Unis et spécialiste de longue date du pays.

Les observateurs doutent depuis longtemps de la sincérité de MM. Kiir et Machar à chercher une issue politique au conflit, né de leur rivalité à la tête du régime et sur laquelle se sont greffées de vieilles rancunes entre Dinka et Nuer, les deux principales ethnies du jeune pays, dont ils sont respectivement issus.

Mais ils doutent aussi de leur autorité réelle sur les troupes qui leur sont acquises, agglomérat de soldats ou mutins, auxquels s'ajoutent divers supplétifs - miliciens locaux et membres de groupes armés venus du Soudan voisin.

"Les deux parties pensent qu'elles peuvent l'emporter militairement", estime un diplomate occidental en poste dans la région.

Selon lui, MM. Kiir et Machar "sont prisonniers des logiques des années 1980 et 1990", époques où ils étaient des chefs de la SPLA, la rébellion sudiste qui affronta Khartoum entre 1983 et 2005, conflit qui a débouché en juillet 2011 sur l'indépendance du Soudan du Sud: "une seule chose intéresse Kiir, rester au pouvoir; une seule chose intéresse Machar, renverser Kiir".

Dans les années 1990, M. Machar fit sécession de la SPLA, dominée par les Dinka, après avoir échoué à en prendre le contrôle. Il mit un temps ses troupes nuer au service de Khartoum, avant de réintégrer progressivement à partir de 2000 la SPLA, qui est désormais au pouvoir à Juba.

Mais ces dernières semaines, les deux dirigeants ont été sous intense pression internationale, l'ONU et les Etats-Unis avertissant des risques de "famine" et de "génocide" au Soudan du Sud. Et après avoir menacé MM. Kiir et Machar de sanctions ciblées, Washington a pris des premières mesures contre deux de leurs généraux.

"La pression internationale à leur égard est un facteur déterminant" qui les a poussés à signer l'accord à Addis Abeba, selon Andy Atta-Asamoah, de l'Institut pour les Etudes de sécurité (ISS).

Leur rencontre dans la capitale éthiopienne "ressemblait à un mariage forcé", analyse Macharia Munene, professeur à l'Université internationale des Etats-Unis (USIU) à Nairobi.

"Je veux croire que tant Kiir que Machar étaient sincères en signant cet accord, mais (...) il est clair qu'ils n'ont pas un contrôle total de leurs troupes", a estimé M. Munene. M. Reeves souligne aussi que la géographie du pays "vaste et quasiment sans réseau de communication ou routier" n'arrange rien.

Tant M. Kiir que M. Machar sont "entourés de jusqu'au-boutistes et enfermés dans la logique de la solution militaire", explique le diplomate occidental. "La seule solution semble être de retirer les deux hommes de l'équation et de mettre en place un gouvernement de transition", a-t-il ajouté appelant à "une stratégie de sortie, qui sauve la face de Kiir et de Machar".

Le principe d'un tel gouvernement de transition figure dans l'accord signé vendredi, mais sans aucun détail, notamment sur la participation ou non des deux dirigeants.

Les combats et les massacres et atrocités à caractère ethnique contre les civils qui les accompagnent ont déjà fait plusieurs milliers, voire des dizaines de milliers de morts et chassé de chez eux plus d'1,2 million de Sud-Soudanais.

Le conflit "a le potentiel pour durer encore des mois voire des années", avertit ce diplomate, "un côté va avancer, puis l'autre (...) et ainsi de suite (...) aucun camp n'a les capacités de porter un coup fatal à l'autre".

bur-pjm/ayv/sba/de

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.