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Le narco le plus recherché du Mexique, un bienfaiteur dans sa bourgade

Le narco le plus recherché du Mexique, un bienfaiteur dans sa bourgade

Le narcotrafiquant Servando Gomez, alias "La Tuta", est actuellement l'homme le plus recherché du Mexique, mais cet ancien instituteur est surtout vu dans sa bourgade de l'ouest du pays comme un généreux pourvoyeur d'argent, de cadeaux et de fêtes.

Personne ne peut dire exactement la dernière fois que ce "capo" du cartel des Chevaliers Templiers a été vu à Arteaga, localité de quelque 22.000 habitants nichée dans une zone montagneuse de l'Etat troublé du Michoacan. Mais son aura y demeure intacte.

Ailleurs, Servando Gomez est un fugitif, recherché à la fois par les forces de sécurité fédérales et par les milices d'autodéfense. Ils fouillent les grottes et les forêts de la région pour tenter de porter un coup décisif à son groupe criminel, aux abois après l'arrestation ou la mort de plusieurs de ses chefs.

Car si dans son village Gomez était apprécié pour sa générosité - fêtes, cadeaux ou argent en espèces pour ceux qui en avaient besoin - son cartel aux allures de secte religieuse avait fini par semer la terreur dans une grande partie du Michoacan.

Les enlèvements, rackets, viols ou assassinats des Templiers ont fini par provoquer la naissance d'une véritable résistance armée avec la multiplication début 2013 de milices d'autodéfense visant à annihiler les Templiers.

Servando Gomez a ses racines à Artega, située à deux heures de la côte du Pacifique, au bout d'une longue route escarpée.

Sa mère y possède un ranch où on élève des coqs de combat. A l'entrée du cimetière, on ne peut manquer le somptueux caveau de famille où son père repose. Une de ses ex-épouses habite une maison rose.

Certains disent que "La Tuta", 48 ans, est venu pour la dernière fois à Arteaga il y a cinq ans. D'autres jurent l'y avoir vu l'an dernier. Mais les gens savent que, même absent, c'est lui qui y finance de grandes festivités pour la fête des mères ou d'autres occasions.

En découpant des tranches de viande sur son stand de "tacos", Miguel Angel, 21 ans, se souvient que le "capo" avait prévu de construire une maison de retraite.

"Les gens le respectaient. Il n'a jamais provoqué le moindre trouble dans sa ville. Il aidait les gens sur le plan financier. Il envoyait des cadeaux aux enfants pour Noël", se souvient-il.

Contrairement à d'autres barons de la drogue, Servando Gomez, une casquette de baseball constamment vissée sur la tête, était plutôt du genre ouvert, le verbe abondant. On le voyait encore en janvier dans des interviews vidéos défier les autorités. Mais depuis, il a complètement disparu, probablement caché dans les zones montagneuses.

"Il peut survivre là haut. Il y connaît bien du monde", explique un policier.

Les autorités ont tué ou arrêté les trois autres leaders des Chevaliers Templiers cette année. Servando Gomez est la dernière cible au sein d'un cartel qui contrôlait il y a encore peu cette riche région agricole.

Les milices d'autodéfense, dont le mouvement vient en partie d'être intégré au sein d'une nouvelle "police rurale" sous le contrôle des autorités, avaient fini par investir Arteaga le 22 avril.

Mais beaucoup d'habitants ne se satisfont pas de la présence des milices, les accusant de faire irruption dans les maisons et de voler.

"Les gens pensent qu'ils ne sont qu'un groupe criminel de plus et qu'il peut y avoir un affrontement avec les Chevaliers Templiers à n'importe quel moment", confie un commerçant.

Le ranch de la mère de Servando Gomez, Teresa, se trouve au bout d'une route poussiéreuse, près du cimetière. Mais celle-ci a quitté la ville pour suivre un traitement médical ailleurs, assure Rosalaba Barragan, la gardienne du lieu.

Lors d'une visite de journalistes de l'AFP, on pouvait voir paître paisiblement une douzaine de vaches, non loin d'une trentaine de coqs enfermés dans des cages. Ces volatiles peuvent atteindre près de 200 euros pièce sur le marché.

Le combat de coqs semble être une passion familiale. Deux coqs en train de combattre sont représentés sur la porte vitrée d'entrée du caveau de famille.

Mme Barragan souligne que les parents de Servando Gomez ont pris leurs distances avec lui. Mais selon elle, des gens de la localité ont contacté sa mère pour lui exprimer leur reconnaissance.

"Les gens sont contents parce qu'il les aide", dit-elle. "Ils l'ont remerciée pour ce que fait son fils".

lth/jcb/ag

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