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Turquie: Erdogan avance à grands pas vers la présidence

Turquie: Erdogan avance à grands pas vers la présidence

Scandale de corruption, écoutes téléphoniques ou contestation populaire, rien n'aura empêché le Premier ministre islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan de se détourner de son objectif de parvenir cet été au poste de premier président élu par le peuple en Turquie.

Avec 45% des voix obtenues aux élections municipales du 30 mars malgré une campagne semée d'embûches pour ses ambitions, l'homme fort du pays se voit à la magistrature suprême, d'autant qu'il a déjà averti qu'il entendait bel et bien jouir de tous les pouvoirs à sa disposition.

"J'entends utiliser toutes les prérogatives du président", a-t-il récemment affirmé, laissant entendre qu'il rompra avec la tradition d'un régime parlementaire primo-ministériel et d'un chef de l'Etat aux pouvoirs limités à un système de facto semi-présidentiel.

L'élection présidentielle se déroulera pour la première fois au suffrage universel direct, les 10 et 24 août, et M. Erdogan est le candidat le mieux placé pour l'instant.

Le Premier ministre qui a échoué à faire modifier la Constitution pour imposer un système présidentiel, a appelé de ses voeux un président qui "transpire, court et fait courir", soit un président qui contrôle l'exécutif et force la main au gouvernement, de l'avis des observateurs.

Mais le président actuel Abdullah Gül, possible présidentiable et compagnon de route politique de M. Erdogan, a d'ores et déjà refusé d'être le Medvedev de celui-ci, s'opposant à toute échange de poste à la Poutine, comme en Russie, souvent avancée.

"La formule n'est pas adaptée à la Turquie", a déclaré M. Gül, affirmant ne pas avoir de "projet politique dans les conditions actuelles".

"Gül refuse d'être un chef de gouvernement docile, ce que souhaiterait Erdogan pour avoir les mains libres afin de continuer à diriger la Turquie" qu'il gouverne sans partage depuis 2002, commente Serkan Demirtas, chef de bureau du journal Hürriyet Daily News.

Le chroniqueur politique estime que les deux hommes ne s'engageront pourtant pas dans un bras de fer, potentiellement nuisible au Parti gouvernemental de la justice du développement (AKP) qu'ils avaient fondé ensemble en 2001 et propulsé au pouvoir l'an suivant.

Toutefois M. Gül s'est à plusieurs reprises démarqué ces derniers temps de M. Erdogan, prônant la modération face à la montée de la contestation contre l'"autoritarisme" du Premier ministre et de ses sorties très violentes contre ses détracteurs, parmi lesquels les fidèles de l'imam Fethullah Gülen.

Le Premier ministre accuse ces derniers d'avoir constitué un "Etat parallèle" et de comploter contre lui.

Mais les deux hommes s'efforcent de démentir toute rivalité ou possible confrontation. "Il n'y aura absolument aucun conflit entre moi et le président" a de nouveau tranché mercredi M. Erdogan, interrogé par la presse.

D'autres noms de futurs Premier ministres sont cités dans la presse, notamment les vice-Premier ministres actuels, Bülent Arinç et Ali Babacan, des fidèles de M. Erdogan leader incontesté de l'AKP, qui, selon les règles de sa formation, ne peut briguer un quatrième mandat à la tête du gouvernement aux législatives de 2015.

"La candidature de M. Erdogan ne fait plus de doute, reste à savoir quand elle sera officiellement annoncée", souligne M. Demirtas.

Lors d'une allocution mardi au Parlement, M. Erdogan a expliqué que des "consultations sont menées au sein de l'AKP" pour déterminer le candidat du parti au scrutin, qui devra être connu à la fin mai.

Pendant ce temps, le Premier ministre a prévu de se rendre le mois prochain en Europe pour faire campagne auprès des nombreux électeurs turcs expatriés.

L'opposition turque est quant à elle irritée par le fait que le débat sur le futur président se déroule seulement dans le camp AKP, sans véritable discussion au sein de l'opinion publique.

"Le pouvoir agit comme si le prochain président ne représentera que l'AKP. Et les 55% qui n'ont pas voté pour Erdogan (aux municipales), on en fait quoi", a déclaré à l'AFP Sezgin Tanrikulu, vice-président de la principale force d'opposition au Parlement, le parti républicain du peuple, dénonçant une "manoeuvre de régime de parti unique".

BA/abk

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