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L'Afghanistan choisit son nouveau président pour tourner la page Karzaï

L'Afghanistan choisit son nouveau président pour tourner la page Karzaï

Les Afghans se rendent samedi aux urnes pour élire leur nouveau président après treize ans de règne de Hamid Karzaï et d'une intervention militaire menée par les Américains qui ont profondément transformé le pays, sans parvenir en revanche à vaincre, ni même à rallier, les insurgés talibans.

Cette échéance politique, la toute première passation du pouvoir d'un président démocratiquement élu à un autre, est considérée comme un test majeur pour la stabilité du pays et la solidité de ses institutions, alors que le retrait des forces de l'Otan d'ici la fin 2014 fait craindre une flambée de violences.

La bonne tenue du scrutin sera également révélateur des progrès accomplis dans le pays depuis la fin du régime des talibans, chassés du pouvoir en 2001 dans la foulée du 11-Septembre par une coalition militaire dirigée par les Américains.

Chassés, mais pas vaincus: les talibans restent les artisans d'une violente insurrection et près de 3.000 civils ont encore péri dans le conflit en 2013 (+7% par rapport à 2012), selon l'ONU.

Au cours des treize dernières années, les Occidentaux ont déployé des moyens militaires exceptionnels et investi des centaines de milliards de dollars pour extraire tant bien que mal ce pays du marasme économique et culturel dans lequel l'avaient plongé les talibans.

Les droits des femmes ont progressé, les villes se sont développées où une société jeune et dynamique entraîne le pays vers l'avant, même si les campagnes restent pauvres, la corruption endémique et que la culture du pavot à opium prospère.

Treize ans au cours desquels l'Afghanistan n'a connu qu'un seul dirigeant: Hamid Karzaï, installé au pouvoir fin 2001 par les Occidentaux, élu une première fois en 2004, puis réélu en 2009 lors d'un scrutin chaotique marqué par une faible participation (environ 30%), des fraudes massives et des violences. Après deux mandats, ce dirigeant habile, colérique et charismatique, doit se retirer, la Constitution lui interdisant de se présenter une troisième fois.

Samedi, pour le premier tour du scrutin, les Afghans auront le choix entre huit candidats, dont trois favoris clairs, tous anciens ministres de M. Karzaï: Zalmai Rassoul, considéré comme le candidat du pouvoir sortant, Ashraf Ghani, un économiste réputé, et Abdullah Abdullah, opposant arrivé en seconde position lors de la présidentielle de 2009.

Mais, bien plus qu'un choix de personne, ce scrutin fait face à de nombreuses inconnues, à commencer par la violence des rebelles talibans qui ont promis de le "perturber" à tout prix, y compris en attaquant les bureaux de vote.

S'ils n'ont pas réussi à faire dérailler la campagne, les insurgés n'en pas moins semé la mort, comme le 20 mars où ils ont à la fois tué 10 policiers à Jalalabad (est), puis neuf autres personnes, dont quatre étrangers, en attaquant l'hôtel Serena à Kaboul. Puis six autres policiers mercredi, au dernier jour de la campagne, lors d'un attentat contre le ministère de l'Intérieur.

Ces violences pourraient avoir un impact direct sur la participation, et plus généralement sur la crédibilité du scrutin, estime Abdul Waheed Wafa, un expert de l'université de Kaboul.

"Si dans les villes les gens sont déterminés à aller voter, la situation est différente dans les zones rurales du sud et de l'est, où les talibans sont puissants, et où la participation pourrait être faible", souligne-t-il.

En prévision de ce scrutin à haut risque, un dispositif exceptionnel de sécurité est prévu pour protéger les quelque 6.000 bureaux de vote.

Autre écueil majeur: la fraude et l'influence que pourraient avoir sur le scrutin aussi bien les acteurs intérieurs - chefs locaux, candidats voire le pouvoir sortant - que les puissances étrangères ayant des intérêts stratégiques dans le pays, comme les États-Unis, l'Iran ou le Pakistan.

Même si le pays n'est plus dans la situation dans laquelle il se trouvait en 2009, note Thijs Berman, chef d'une mission de l'Union européenne mandatée pour contrôler l'élection.

"Il y a des garde-fous qu'il n'y avait pas avant, comme les bulletins numérotés. Il y a aussi beaucoup plus d'observateurs expérimentés, et des observateurs des candidats", dit-il.

Mais les violences ont entraîné le départ d'équipes internationales chargées de surveiller le bon déroulement des élections.

"Si le résultat de cette élection devait être faussé, le processus démocratique et l'appareil gouvernemental en sortiraient profondément endommagés, et les progrès réalisés au cours de treize dernières années menacés", met en garde l'expert Ahmad Saeedi.

Les premiers résultats du premier tour ne seront pas connus avant le 24 avril, avant un probable deuxième tour le 28 mai. A condition que les candidats recalés acceptent le résultat des urnes.

"La légitimité de l'élection est entre les mains des perdants", avance Graeme Smith, expert de l'International Crisis Group (ICG) à Kaboul. "La manière dont ils réagiront déterminera l'impact de cette élection sur la stabilité du pays".

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