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Murmures dissidents dans la nouvelle Crimée russe

Murmures dissidents dans la nouvelle Crimée russe

Dans l'obscurité nocturne de Simféropol, le visage d'Anastassia de dessine sous le faisceau lumineux d'un lampadaire. Cette blonde de 30 ans, qui regarde furtivement d'un côté et de l'autre de la rue, est l'une des rares Criméennes opposées à la mainmise de Moscou.

Sa voix timide se fond dans celles des passants et le bruit de la circulation.

"Il ne va pas y avoir de démocratie ici. Pas avec Poutine au pouvoir", murmure la jeune femme, qui vit dans un immeuble de la triste banlieue ouest de Simféropol, la capitale de la Crimée.

"J'aimerais bien partir, mais je n'arrive pas à vendre mon appartement. Qu'est ce que je vais devenir ? Je n'ai pas suffisamment d'argent", s'alarme cette mère de deux enfants.

Le gouvernement ukrainien estime qu'environ 25.000 personnes, comme Anastassia, veulent quitter la Crimée depuis que la région comptant deux millions d'habitants est devenue russe.

Certains sont déjà partis, avec leurs amis et leurs familles, dans d'autres parties du pays.

Le gouvernement a mis en place une ligne téléphonique pour ceux qui fuient la Crimée, pour les aider à chercher un emploi, car beaucoup peuvent craindre les difficultés liées au changement de ville et de vie.

Avant le référendum controversé du 16 mars, qui a scellé le sort de la Crimée, quelques manifestations isolées favorables à l'Ukraine avaient été organisées dans la péninsule.

Elles ont disparu depuis. Les troupes russes et les milices pro-Moscou surveillent la région.

Anastassia ne s'est jamais intéressée à la politique. Mais l'ukrainien est sa langue maternelle et elle n'apprécie pas vraiment l'idée de se réveiller avec une nouvelle nationalité.

Les deux millions d'habitants de la péninsule, ouverte sur la mer Noire, deviendront automatiquement citoyens russes dans moins d'un mois, sauf s'ils manifestent leur intention de rester Ukrainiens.

"Je ne veux pas de passeport russe, je veux garder l'ukrainien ! Mais j'ai peur de ce qui se passera si je refuse la nationalité russe", explique Anastassia.

Elle et ses amis "ne parlent plus ukrainien en public". "Vivre ici est devenu effrayant. Ils disent que nous sommes tous radicaux", lâche-t-elle.

Selon la Russie et les Criméens pro-Moscou, le gouvernement ukrainien est dominé par les ultra-nationalistes, qui cherchent à discriminer les russophones, argument utilisé pour justifier la prise de contrôle de la péninsule par Moscou.

"Quelle discrimination ? Il n'y a jamais eu quoi que ce soit de ce type ici. C'est juste ce qu'ils disent à la télévision", assure Anastassia.

L'un des premiers actes des nouveaux dirigeants soutenus par Moscou a été de remplacer les chaînes des télévisions ukrainiennes par les programmes russes.

Selon Anastassia, la couverture russe de la Crimée n'est pas objective, tout comme sont partisans les députés de Moscou, qui ont approuvé sans discussion la proposition du président russe Vladimir Poutine de ramener la Crimée dans le giron russe.

"Il ont voté anonymement ! Drôle de démocratie", dit-elle.

La nouvelle réalité politique de la Crimée a divisé sa famille. Ses parents, ukrainiens, sont en faveur de "la stabilité" et ils espèrent que la Russie améliorera leur vie, explique-t-elle incrédule.

"Ils disent que leurs pensions vont augmenter et ils veulent que leur statue de Lénine reste en place."

dt-zap/via/abk

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