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"Ocupa Carnaval": la manifestation s'immisce dans les festivités à Rio

"Ocupa Carnaval": la manifestation s'immisce dans les festivités à Rio

Entre slogans anti-Mondial et anti-police militaire, une manifestation festive s'est invitée dans le Carnaval de rue de Rio de Janeiro, reprenant les codes et les slogans politiques nés lors du soulèvement social de juin dernier au Brésil.

Quoi de mieux que le très populaire et médiatisé Carnaval de Rio pour prolonger la lutte ? C'est ce que se sont dit les groupes sociaux et politiques formés lors de la fronde à la Coupe des Confédérations 2013, protestant pêle-mêle contre la hausse des tarifs dans les transports, la corruption de la classe politique, le coût faramineux des investissements pour la Coupe du monde 2014, et pour l'amélioration des services publics de base.

Cette manif' carnavalesque était mijotée depuis janvier chaque semaine sur une petite place du quartier de Flamengo. Jeudi soir, rendez-vous est pris sur la praça Quinze, dans le centre de la ville. Des centaines de militants, activistes et sympathisants se retrouvent dans la bonne humeur, y compris des jeunes hommes masqués de T-shirts à la manière des anarchistes du Black Bloc, les plus radicaux, habituellement toujours prompts à l'affrontement avec les forces de l'ordre, ce qui a quasiment systématiquement fait dégénérer en violences les manifestations depuis juin.

Mais ce jeudi soir, les dizaines de policiers militaires qui encadrent la manif' festive, sans doute un record dans l'histoire du Carnaval (quand les autres "blocs" ne sont surveillés que par des gardes municipaux), n'auront pas à répandre de gaz lacrymogènes ni à dispenser des coups de matraques en réponse aux pierres de jeunes révoltés.

Car le Carnaval, c'est la fête, et pas question pour quiconque de la troubler! Seuls les chants et les percussions casseront les oreilles des riverains.

L'atmosphère est bon enfant, sous les auspices d'un manifeste à tonalité libertaire: "A bas les barrières qui transforment la ville en grand magasin, où le profit prévaut sur la vie, où l'argent est plus libre que les personnes. Tant qu'ils capitaliseront la réalité, nous socialiserons le rêve! Vive l'énergie de la rébellion".

De nombreux manifestants arborent des plumes amérindiennes en guise de couvre-chef. "C'est en référence à (Pedro Alvares) Cabral, qui a découvert le Brésil, et à Sergio Cabral", actuel gouverneur de Rio et figure honnie des protestataires depuis juin dernier, explique à l'AFP Tomas Ramos (30 ans), activiste des droits de l'homme.

L'aspect ludique du Carnaval est illustré par une pieuvre géante en plastique déployée au milieu du regroupement. "Le pouvoir au peuple!", scandent les manifestants, en jouant sur la proximité phonétique entre "povo" (peuple) et "polvo" (pieuvre).

Tout a été scénographié par le "carnavalesco", le metteur en scène, Julio Barroso (46 ans), vêtu de noir, longues tresses et plumes multicolores sur la tête. "L'idée, c'est de profiter du Carnaval pour protester contre Cabral et Paes", le maire de Rio, confie-t-il à l'AFP en tête de cortège, tout affairé à le guider et le canaliser.

Les chants parodient les "marchinhas", des rengaines populaires de carnaval, pour se moquer avec humour des édiles, remémorer les épisodes de juin dernier et ses suites ou marteler: "Il n'y aura pas de Coupe !"

"Nous voulons utiliser le Carnaval comme plate-forme, parce que nous ne voulons pas de la Coupe, nous voulons un standard Fifa pour la santé et l'éducation", souligne Renata Dias, une actrice de 23 ans.

Les manifestants donnent aussi de la voix contre la police militaire, notamment devant un de ses quartiers généraux à Cinelândia, en plein coeur de Rio. Des chants véhéments suivis par des images projetées sur un mur et sur les fameux Arcs de Lapa où l'on voit le gouverneur de Rio grimé en Hitler aux cris de "Cabral est un dictateur!"

La "manifestivité" se reproduira dans les jours à venir, assurent les uns et les autres. Dans le même esprit ?

ybl/pal/ih

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