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Ukraine : la Russie incontournable pour une médiation internationale (experts)

Ukraine : la Russie incontournable pour une médiation internationale (experts)

Le déchaînement de violences à Kiev porte un coup sérieux à la possibilité d'un compromis politique en Ukraine, tous les espoirs reposant sur une médiation internationale qui a peu de chance de succès sans implication de la Russie, selon des experts.

Avec près de 70 morts en trois jours dans la capitale ukrainienne, la crise née de la volte-face du président Viktor Ianoukovitch, qui a préféré un rapprochement avec Moscou plutôt qu'un accord de libre-échange avec l'Union européenne, semble avoir atteint un point de non-retour.

"Il y a un risque que la situation devienne incontrôlable et se transforme en guerre civile", estime Ognian Mintchev, directeur de l'Institut d'études régionales et internationales, à Sofia.

"Cela ne pourra être évité que par une démission de Ianoukovitch et une élection présidentielle anticipée", poursuit-il.

Pour Gerhard Mangott, spécialiste de l'Europe orientale et de la Russie à l'Université d'Innsbruck, en Autriche, "des deux côtés, les forces radicales ont pris le dessus".

D'un côté, vu les violences, "il est impensable que le Maïdan (place du centre de Kiev occupée par les opposants) donne son accord pour des discussions" avec un président "qui a du sang sur les mains", explique-t-il.

De l'autre, Viktor Ianoukovitch "ne peut plus faire marche arrière, il a tellement attisé la violence qu'il est difficilement pensable qu'il ne soit pas poursuivi par la justice s'il quitte la présidence", poursuit-il.

Cet expert écarte l'idée d'une "guerre civile", car "il n'y a pas de combats entre différents groupes de population, mais un affrontement entre une partie de la population ukrainienne et l'Etat". Il voit cependant le risque d'un "processus de désintégration du pays", avec des administrations occupées par l'opposition dans l'ouest ou des rassemblements pro-russes dans certaines régions comme la Crimée.

Ces foyers de tensions régionaux ont réveillé les craintes d'un éclatement de l'Ukraine, pays aux portes de l'UE mais berceau de la Russie, ancienne république soviétique où une partie de la population parle russe au quotidien mais où la domination de Moscou reste vécue comme une humiliation dans nombre de régions.

Les pays occidentaux (UE et Etats-Unis) et la Russie n'ont eu de cesse depuis le début de la crise de s'accuser mutuellement d'ingérence et de pressions destinées à renforcer leur zone d'influence.

Le pouvoir ukrainien se trouve acculé entre la menace de sanctions occidentales visant les dirigeants et les milieux financiers qui leur sont associés, et le risque de faillite et d'effondrement économique s'il tourne le dos à Moscou.

Après s'être détournée de Bruxelles, l'Ukraine a obtenu un prêt russe de 15 milliards de dollars et une baisse du prix du gaz importé représentant plusieurs milliards de dollars par an.

Mais Moscou, qui ne cesse de dénoncer un mouvement mené par des "radicaux", des "extrémistes" voire des "néonazis", n'a versé que trois milliards de dollars et dit maintenant attendre un retour au calme avant de poursuivre son aide.

"Les stratèges politiques du Kremlin ont semble-t-il tout fait pour que la Russie devienne le seul espoir du pouvoir ukrainien. Il est désormais très probable que ce rêve se réalise", écrit jeudi le journal libéral russe Vedomosti.

Le quotidien appelle les autorités russes à organiser "une conférence internationale" sur l'Ukraine.

Moscou a semblé esquissé un pas dans cette direction jeudi en annonçant l'envoi d'un médiateur sur place: Vladimir Loukine, délégué aux droits de l'homme du Kremlin. Les Russes restent sur une position très ferme, le chef du gouvernement, Dmitri Medvedev, ayant expliqué que son pays ne coopèrerait qu'avec un pouvoir sur lequel on ne "s'essuie pas les pieds".

"Une médiation commune UE-Russie pourrait se montrer décisive pour régler la crise", estime Lilit Gevorgyan, économiste de la société d'analyse IHS Global Insight, à Londres.

"Une feuille de route commune prévoyant la fin immédiate de la violence des deux côtés pourrait aboutir à la formation d'un gouvernement de technocrates puis une élection présidentielle sous haute surveillance", poursuit l'expert, relevant que "pacifier l'Ukraine pourrait constituer une nouvelle victoire diplomatique pour le président russe Vladimir Poutine".

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