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Tunisie: insulte et menace font dérailler les débats à la Constituante

Tunisie: insulte et menace font dérailler les débats à la Constituante

Les débats à la Constituante tunisienne sur l'adoption de la Constitution étaient suspendus dimanche, un élu de gauche ayant assuré avoir reçu des menaces de mort après qu'un député du parti islamiste Ennahda l'a qualifié d'ennemi de l'islam.

"Combien faut-il encore de sang pour comprendre qu'on est unis (dans l'islam)? Je te dis que je suis musulman, que mon père, ma mère, mon grand-père et mon peuple sont musulmans", a lancé dans l'hémicycle Mongi Rahoui, de la coalition de gauche Front populaire, à l'adresse du député islamiste Habib Ellouze.

"Ce qui a été dit hier (samedi) par ce cheikh, comme quoi (...) j'étais l'ennemi de l'islam, a conduit à des menaces de morts contre moi", a-t-il dit.

Le ministère de l'Intérieur a indiqué dans un communiqué avoir reçu des informations sur des menaces contre M. Rahoui et deux autres personnes circulant sur Facebook.

"Le ministère a pris toutes les précautions sécuritaires pour assurer la sécurité des parties et ouvert une enquête pour déterminer le sérieux des menaces", selon le communiqué.

Habib Ellouze, de la frange la plus dure d'Ennahda et habitué aux propos polémiques sur l'opposition et les femmes, a dans un premier temps affirmé que ses propos à une radio avaient été sortis de leur contexte, avant de présenter ses excuses à M. Rahoui et à l'Assemblée nationale constituante (ANC).

Selon un enregistrement disponible en ligne, il a dit à la radio Saraha-FM que M. Rahoui était "connu pour son animosité pour l'islam".

Son parti, Ennahda a à plusieurs reprises condamné ces déclarations dimanche.

Pour l'opposition, les propos en question ont fait de l'élu une cible, alors que deux opposants de gauche ont été assassinés en 2013, crimes attribués à la mouvance jihadiste.

Les détracteurs d'Ennahda jugent d'ailleurs les islamistes au pouvoir responsables, au moins par leur laxisme, de l'essor de ces groupes salafistes.

Des députés de l'opposition ont dès lors réclamé que soit à nouveau examiné un amendement au projet de Constitution, rejeté samedi, qui prévoit de rendre passible de poursuites pénales les accusations d'apostasie.

Des négociations sont en cours sur le sujet depuis le début d'après-midi. Le vote article par article de la Constitution n'avait lui pas repris à 18H30 GMT (19H30 locale).

L'examen du projet de Constitution, lancé vendredi dans un climat chaotique, a été régulièrement suspendu par des accusations et des disputes entre députés.

La Constituante a approuvé le préambule et 15 des 19 articles du premier chapitre consacré aux "dispositions générales" de la loi Fondamentale.

Les votes de samedi ont notamment consacré la liberté de conscience, l'islam comme religion d'Etat et rejeté l'islam comme source de droit.

Un total de 146 articles et quelque 250 amendements doivent être étudiés pour permettre l'adoption de la Loi fondamentale avant le 14 janvier, 3e anniversaire de la révolution qui marqua le début du Printemps arabe.

Les élus étaient censés consacrer leur dimanche au reste du 1er chapitre avant d'attaquer l'examen des "Droits et Libertés".

Selon l'ordre du jour, ils auraient dû aussi s'atteler à la formation de l'instance électorale qui sera chargée d'organiser les prochains scrutins courant 2014.

L'adoption de la Constitution et la formation d'une loi et commission électorales sont les clefs de voûte d'un accord entre opposants et Ennahda pour résoudre une profonde crise déclenchée par l'assassinat le 25 juillet du député de gauche Mohamed Brahmi, le deuxième meurtre en 2013 attribué à la mouvance jihadiste.

A l'issue de ce processus, Ennahda s'est engagé à céder la place à un gouvernement d'indépendants dirigé par l'actuel ministre de l'Industrie, Mohamed Jomaâ.

Le principal médiateur de la crise politique, le syndicat UGTT, a exigé que le Premier ministre islamiste Ali Larayedh démissionne au plus tard le 9 janvier.

Une rencontre entre les médiateurs de la crise et MM. Larayedh et Jomaâ doit avoir lieu lundi.

Élue en octobre 2011, la Constituante devait achever sa mission en un an, mais le processus a été ralenti par un climat politique délétère, l'essor de groupes jihadistes armés et des conflits sociaux.

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