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Mandela croyait en la puissance du sport

Mandela croyait en la puissance du sport

Nelson Mandela savait qu'il pouvait unir les peuples par le sport. Il a réussi à le faire tout juste après avoir accédé à la présidence.

Le boycottage des pays africains lors des Jeux olympiques de 1976 est encore dans les mémoires de ceux qui suivent l'actualité olympique.

Après les incidents aux Jeux de Mexico en 1968 et la tragédie des Jeux à Munich en 1972, le mouvement olympique souhaitait que les Jeux d'été à Montréal se déroulent sans incident politique.

Cet espoir s'est envolé quand le continent africain, à l'exception de la Côte d'Ivoire et du Sénégal, a résisté aux tractations diplomatiques et a décidé de retirer ses délégations. Environ 700 athlètes d'une trentaine de pays sont repartis chez eux.

Ce geste visait à contester la présence aux Jeux des athlètes de la Nouvelle-Zélande. Peu de temps auparavant, une équipe néo-zélandaise de rugby avait participé à une tournée en Afrique du Sud, pays dénoncé universellement et exclu des Olympiques pour sa politique de ségrégation raciale.

Du fond de sa cellule, Nelson Mandela, boxeur dans sa jeunesse et grand amateur de soccer, a appris de cette leçon. Il s'est promis de faire du sport un trait d'union entre les peuples.

« Il savait que, pour ses gardiens de prison, le rugby serait toujours un sujet de conversation. Cela rendait possible un contact. Il a donc appris tout ce qu'il pouvait sur ce sport, toutes les coulisses et ses moments-clés. Et c'est comme ça qu'on a commencé à échanger », a raconté un de ses anciens geôliers, Christo Brand, au journal The Telegraph.

Après 27 ans d'emprisonnement dans des conditions souvent très dures, Mandela a été relâché le 11 février 1990. Il a soutenu la réconciliation et la négociation avec le gouvernement du président Frederik de Klerk.

En 1993, il a reçu avec ce dernier le prix Nobel de la paix pour avoir conjointement et pacifiquement mis fin au régime d'apartheid et jeté les bases d'une nouvelle Afrique du Sud démocratique.

La transition a été difficile. Nelson Mandela et Frederik de Klerk ont évité une guerre civile entre les partisans et opposants de l'apartheid.

Le 9 mai 1994, Frederik de Klerk transmet ses pouvoirs à Nelson Mandela, qui devient le premier président noir de ce pays.

L'Afrique du Sud peine toutefois à sortir pleinement de la ségrégation raciale, et le nouveau président saisit l'occasion d'envoyer un message fort d'unité en soutenant la candidature de son pays pour la Coupe du monde de rugby de 1995. L'Afrique du Sud l'obtient.

C'est le premier événement d'envergure sur le sol national depuis la fin de sa mise au ban internationale.

Un geste a témoigné de la volonté de Nelson Mandela de passer par le sport pour toucher les gens, et les rapprocher.

L'audace du geste

Juste avant le coup d'envoi de la finale contre la Nouvelle-Zélande, Mandela est apparu vêtu du maillot de l'équipe des Springboks. Un geste jugé audacieux. Il a salué les joueurs sous les yeux des 62 000 spectateurs du stade, très majoritairement blancs.

« Nous n'avions aucune idée que ça allait se dérouler comme ça. Quand Nelson Mandela est apparu vêtu du maillot des Springboks, la foule a littéralement explosé. C'est l'expérience la plus stupéfiante que je n'ai jamais vécue dans un stade de rugby », a confié à l'agence AFP Laurie Mains, entraîneur des All Blacks, quelques mois avant la mort de Mandela.

Les analystes politiques n'ont pas cru à un geste purement politique. Nelson Mandela portait réellement en lui l'amour du sport.

« Ça a été une grande chance et un grand honneur de recevoir la coupe des mains de Nelson Mandela à la fin de la finale de la Coupe du monde à Johannesburg, créant une image emblématique de réussite nationale », a témoigné dans un communiqué François Pienaar, capitaine de l'équipe sud-africaine championne en 1995.

« Nelson Mandela était l'être le plus extraordinaire et le plus incroyable, non seulement parce qu'il a unifié son pays alors qu'une telle tâche semblait impossible, mais aussi parce que, par son humanité unique, il a inspiré des millions de gens dans le monde », a ajouté M. Pienaar.

L'histoire de cette rencontre et de ce moment d'histoire a été à l'origine du film Invictus, réalisé par Clint Eastwood en 2009.

« Sur le ring, le rang, l'âge, la couleur de la peau ou la richesse n'ont plus cours », a-t-il expliqué dans sa biographie, sur ses années de boxeur.

De la boxe, il gardera la faculté à encaisser les coups, tout en réfléchissant à celui qu'il portera plus tard, pour gagner le combat.

« Il nous a fait prendre conscience que nous sommes les protecteurs de nos frères, et que nos frères sont de toutes les couleurs », a dit Muhammad Ali, figure de proue de la lutte pour les droits civiques.

Le dernier geste public

En 2004, Nelson Mandela marque encore son attachement au sport, même s'il n'est déjà plus président. Il a joué un rôle dans l'attribution de la Coupe du monde 2010 de soccer à son pays.

Nelson Mandela devait assister à la cérémonie d'ouverture. Il n'y sera pas, marqué par la mort d'une arrière-petite-fille. Il fera par contre une courte apparition à la cérémonie de clôture, le 11 juillet 2010, sa dernière apparition publique.

« Il a eu l'intelligence d'utiliser le sport au profit de l'unité de l'Afrique du Sud, de la paix. Il disait que le sport pouvait changer le monde, qu'il pouvait faire renaître l'espoir là où ne régnait que le désespoir. Il a porté un message de concorde et de cohabitation », se souvient Hugo Porta, joueur de rugby argentin et ancien ambassadeur d'Argentine en Afrique du Sud de 1991 à 1995.

« Il restera comme une figure majeure de l'histoire de l'humanité. Le pape parle de miséricorde, Mandela en a été un exemple », a conclu l'ancien joueur de rugby.

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