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Micheline Lanctôt, une ambassadrice qui n'a pas la langue dans sa poche (ENTREVUE)

Micheline Lanctôt, une ambassadrice qui n'a pas la langue dans sa poche (ENTREVUE)
Ismaël Houdassine

Nommée première ambassadrice de la salle de cinéma Excentris en septembre dernier, la comédienne et réalisatrice Micheline Lanctôt n'a jamais pratiqué la langue de bois. Dans une entrevue qu'elle a accordée au Huffington Post Québec, elle plaide pour une politique culturelle concertée et constate aussi le peu d'engagements de son milieu à défendre l'industrie cinématographique.

Assise dans le petit café à l'arrière de l'Excentris, Micheline Lanctôt en a long à raconter sur notre cinéma. Lorsqu'on a annoncé la fin de la mythique salle de cinéma de la rue Saint-Laurent il y a près de deux ans, la réalisatrice est montée aux barricades. Et elle a été la seule.

«Je me demande encore aujourd'hui pourquoi j'ai été la seule cinéaste à dénoncer la fermeture? Avec le producteur Louis Dussault (K-Films), j'ai été l'unique personne à prendre la parole. Ça n'a pas de bon sens. À l'association des réalisateurs, je n'ai pas eu de réponse», affirme la réalisatrice de Sonatine, Lion d'argent à Venise en 1984.

Pour elle, l'Excentris est un endroit où la culture québécoise, mais aussi internationale peut s'épanouir. Sa fermeture aurait eu un impact néfaste, selon elle.

«C'est important d'avoir ce genre d'endroit. Imaginez le nombre de films d'importances que nous n'aurions jamais eu accès à Montréal! Le cinéma, ça nous permet d'avoir une fenêtre sur l'identité des autres pays. Maintenant, on connaît la Suède à cause d'Ikea, mais avant c'était grâce à Ingmar Bergman. Autres temps, autres mœurs», se désole-t-elle.

Pendant quelques mois, l'Excentris a fermé. Elle espère donc que le public reviendra en salles rapidement.

«Je sais qu'Excentris connait maintenant une meilleure année. Ça reprend graduellement. Mais je suis positive. Et puis, c'est bien mieux de voir un film sur grand écran. On partage une expérience avec les autres. Dernièrement, j'ai vu Tree of life sur ma télévision. Mais je me suis dit que j'aurais sûrement aimé davantage le lyrisme du film si je l'avais vu au cinéma», assure-t-elle.

Peu de solidarité entre les réalisateurs

Ce mutisme qui a suivi la fermeture de l'Excentris, la cinéaste le remarque d'ailleurs depuis plusieurs années dans le milieu, surtout chez les réalisateurs. Plus personne ne prend position sur les grands sujets qui touchent la culture ou le cinéma.

«C'est peut-être parce que nous sommes en compétition pour obtenir le financement pour nos films. Je trouve ça malheureux, on a besoin d'une action commune. En ce sens, je crois que les acteurs sont plus solidaires en ce moment. Par contre, il n'en existe aucune entre les réalisateurs», avance-t-elle.

Pourtant, la culture a besoin plus que jamais d'une action concertée aux dires de la cinéaste qui constate peu d'engouement pour le sujet que ce soit à Québec ou à Ottawa.

«Ce qui est triste, c'est qu'on nous voit encore comme des "quêteux". Alors que c'est maintenant prouvé que la culture peut aussi rapporter. C'est une industrie importante avec de véritables retombées», insiste-t-elle.

Une politique culturelle

Du même souffle, elle comprend les réticences des gouvernements à investir plus massivement en culture.

«Ça rapporte, mais il n'y a pas de garanties. C'est à haut risque, on ne sait pas si le film va trouver son public. On a des troupes de théâtre qui font des succès, mais ce n'est pas systématique. Ça angoisse beaucoup ceux qui accordent les subventions», dit-elle.

Selon la comédienne qui a joué un des rôles les plus marquants du cinéma québécois dans La vraie nature de Bernadette de Gilles Carle, le Québec a besoin d'une politique culturelle bien définie.

Mais elle constate que les ministres de la culture successifs ont parfois du mal à se faire entendre par le Conseil du trésor qui tient les cordons de la bourse.

«En ce moment, j'ai l'impression qu'on n'a pas un plan global. On donne des miettes à la SODEC, on donne des miettes ailleurs. Ça prendrait une politique ferme», conclut-elle.

Excentris : cinemaexcentris.com

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