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Richard Nixon: les propos antisémites des dernières bandes secrètes rendus publics

Les secrets de Nixon déclassifiés: âmes sensibles s'abstenir
AFP

C'est la saison des déclassifications des grands mystères des Etats-Unis. Après quelques révélations sur la mythique "Zone 51", et sur le rôle de la CIA en Iran, voilà que les dernières conversations téléphoniques de l'ancien président Richard Nixon ont été publiées.

La bibliothèque Nixon aux Archives nationales ne les a pas encore toutes examinées: avis aux amateurs. Parmi les sujets abordés: la guerre du Vietnam, l'URSS, le scandale du Watergate... mais aussi la haine des juifs et des noirs.

Véritable trésor historique, cette collection de bandes achèvent de consacrer Richard Nixon comme un président paranoïaque, dont le vocabulaire fleuri est légendaire. Les enregistrements couvrent la période du 9 avril au 12 juillet 1973, soit au plus fort de l'affaire du Watergate, qui entraîna sa démission un an plus tard.

Environ 700 heures d'enregistrements n'avaient pas été déclassifiées, notamment pour des motifs de sécurité nationale. Ces 340 heures sont les dernières. Comme pour en souligner le caractère sulfureux, le président avait préféré démissionner en 1974, plutôt que de les livrer à la justice...

Des déclarations antisémites à couper le souffle

Surmené, le président ne mâche pas ses mots, et imagine des complots partout. Le 19 avril, a repéré The Atlantic Wire, il décroche son téléphone pour joindre Henry Kissinger, son secrétaire d'Etat. Nixon craint alors de voir "les juifs" saboter un sommet imminent avec l'URSS, ce qu'il promet de leur faire payer. "Laissez-moi vous dire Henry, ça va être la pire chose qu'il va arriver aux juifs dans l’histoire américaine". Plus loin il rajoute: "Je vais rejeter la faute sur eux, et je vais le faire publiquement à 9 heures du soir devant 80 millions de personnes". Kissinger, pourtant juif, lui répond: "Je suis entièrement d’accord".

Richard Nixon avait l'habitude d'exprimer son antisémisme auprès de ses proches collaborateurs. Dans un coup de fil à Robert Ziegler, son porte-parole, il fait part de son désir de virer son avocat Leonard Garment: "Que Dieu maudisse son âme juive!". Le 12 juillet, il discute des futures nominations judiciaires avec son chef d'Etat-major Al Haig: "Pas de juifs, c'est clair? Nous en avons assez", a relevé NBC.

Richard Nixon, élu en 1968 et réélu en 1972, avait mis en place un système secret d'enregistrement de ses conversations et appels téléphoniques à l'intérieur de la Maison Blanche, dont le Bureau ovale équipé de sept micros. Même la résidence de Camp David avait été mise sous écoute. Nixon voulait ainsi constituer des archives personnelles et exhaustives de tous ses entretiens, dans un but historique.

D'autres bandes similaires dévoilées en 2004 et 2010

D'autres extraits antisémites avaient été rendus public en 2010, décrites dans le New York Times. "Les juifs ont juste une personnalité très agressive, mordante et exécrable" ; "Le truc, c'est l'insécurité. L'insécurité latente. La plupart des juifs ne sont pas sûrs d'eux. Et c'est pour ça qu'ils ont besoin de prouver des choses". En 2004, les archives nationales avaient aussi dévoilé de nombreux mémos et transcriptions où l'on avait pu lire les opinions homophobes du président, et ses propos comparant "les nègres" à "des chiens".

Les noirs en prennent encore pour leur grade dans la nouvelle livraison. Dans une réunion du 14 juin 1973, il déclare auprès de sa conseillère Anne Armstrong qu'ils ne peuvent pas diriger la Jamaïque. "Les noirs en sont incapables. Nulle part, et ils ne seront pas en mesure de le faire avant une centaine d'année, peut-être même pas dans mille... Connaissez-vous un 'pays noir' qui a été bien géré?"

D'autres enregistrements, comme ceux avec Leonid Breijnev, permettent par ailleurs de rentrer dans l'intimité des deux hommes les plus puissants de leur époque. Après avoir justifié l'absence de son épouse, malade, le Russe remercie son hôte de son invitation dans sa maison personnelle en Californie, nommée "Casa Pacifica". "Au début, j'avais des doutes sur cette visite", explique Brejnev, selon une retranscription de l'historien Luke Nichter sur son site nixontapes.org. Mais "je suis très heureux d'y aller, et je pense que ce symbolisme deviendra réalité".

Au cœur de l'histoire de la Guerre froide

"Nous dirigeons les deux pays les plus puissants et, bien que nous ayons naturellement des point de vue différents dans les négociations, il est essentiel que ces deux pays travaillent ensemble, quand c'est possible", confie plus tard Nixon. "Si nous décidons de travailler ensemble, nous pouvons changer le monde".

Pendant cette période de détente dans la Guerre froide, les enregistrements soulignent le rôle pro-Chine joué par Nixon. Dans un entretien en mai 1973 avec l'émissaire américain à Pékin, David Bruce, Nixon souligne la finesse des dirigeants chinois, et son admiration pour le Premier ministre Chou Enlai. "J'estime que la relation sino-américaine est vraiment la clé de la paix dans le monde", affirme-t-il. "Souvenez-vous toujours que les Russes sont leurs ennemis mortels (...) Les Chinois doivent savoir qu'ils ont un grand ami ici".

"C'est un moment très intéressant dans l'histoire américaine", explique à CBS Ken Hughes, un chercheur du programme chargé de décortiquer les bandes. "Les enregistrements offrent une vue relativement brute de la présidence. Nous n'en avons jamais eu avant et probablement jamais plus dans le futur". Bien qu'il vienne à peine de se lancer dans le déchiffrage, Ken Hughes distille déjà des faits accablants: "Nixon a retardé le retour des troupes du Vietnam pour remporter les élections de 1972".

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