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Australie: démission de Julia Gillard, l'impopulaire premier ministre australienne

Australie: démission de Julia Gillard, l'impopulaire premier ministre australienne
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AUSTRALIE - L'excentrique Julia Gillard a démissionné mercredi 26 juin en fin de soirée. Désavouée mercredi 26 juin par son propre parti, cette Australienne est renommée pour sa combativité, son habileté à négocier et ses attaques féroces contre le chef de l'opposition. Mais cette femme, première à devenir chef du gouvernement en Australie, n'est jamais parvenue à être populaire.

Plus récemment, elle s'était faite connaître sur les autres continents en... tricotant pour le futur enfant de Kate et William ou en mettant en garde la population contre les zombies lors de "l'apocalypse" du 12 décembre dernier pour une émission humoristique.

Tantôt agressive, tantôt déstabilisante, tantôt ridicule, portrait d'une femme inclassable qui laissera sa trace dans le paysage politique australien.

Une superwoman de la politique trop froide pour devenir populaire

En 2007, Julia Gillard vient d'être nommée vice-premier ministre, ministre de l’Education et des Relations sociales. Tous les regards sont tournées vers celles que les médias surnomment "la femme la plus puissante du pays". Cette grande rouquine à la voix nasillarde est une ancienne avocate au caractère bien trempé. Pour accéder au pouvoir, elle pousse tranquillement dehors en juin 2010 le précédent premier ministre, Kevin Rudd, critiqué pour sa gestion autocratique, avant de prendre sa place.

Un geste qui avait surpris les Australiens. Le pays s'était tout à coup retrouvé dirigé par un premier ministre femme, athée, vivant sans être mariée avec son compagnon, sans enfant et parfaitement heureuse de ses choix. A la tête de l'Australie, sa philosophie est simple, “Le gouvernement doit intervenir pour améliorer la vie des gens”. Elle hisse “l’égalité des chances” comme principe.

Une fois installée à la tête du parti au pouvoir, et donc premier ministre, elle convoque des élections législatives, mais sans réussir à s'imposer après des Australiens: en août 2010, ils élisent pour la première fois depuis 70 ans un parlement sans majorité. Depuis, elle n'est jamais parvenue à séduire une majorité d'électeurs australiens, selon les sondages Nielsen, qui donnent les Travaillistes largement perdants lors des élections de septembre. Son ambition et son manque supposé d'émotions sans cesse pointés du doigt par l'opposition ont réussi à ternir durablement son image. En juillet 2011, sa cote de popularité est au plus bas, elle devient le premier ministre travailliste "le plus impopulaire" de l'histoire.

Une héroïne écolo en guerre contre le sexisme

Julia Gillard a cependant démontré ses qualités de négociation en parvenant à former à l'été 2010 un gouvernement de coalition, avec des Verts et des députés indépendants. Elle a fait passer une taxe carbone frappant les entreprises polluantes --son prédécesseur y avait échoué-- et a mis en échec deux tentatives de putsch interne par Kevin Rudd, en février 2012 et mars 2013, alors qu'à chaque fois la presse la donnait perdante.

Combative, dotée d'un humour froid, Julia Gillard ne manque jamais une occasion de railler la misogynie de Tony Abbott, le dirigeant du parti conservateur. En octobre 2012, devant le Parlement, elle avait vertement tancé M. Abbott, lors d'une tirade de 15 minutes prononcée sans note (voir la vidéo en VO ci-dessous), l'accusant, exemples à l'appui, de "sexisme" et de "misogynie". Sa prestation, qui mêlait l'ironie et la rage froide face à un dirigeant de l'opposition visiblement mal à l'aise, a été abondamment commentée en Australie et au-delà des frontières.

Tueuse par les mots et tricoteuse des kangourous

Elle a tenté d'adoucir son image --en tricotant dernièrement un kangourou pour le bébé de Kate et William, une initiative qui a provoqué quelques haussements de sourcil et des rires moqueurs--, mais ce son ses mots cruels qui l'ont surtout rendues célèbre. Elle a qualifié Tony Abbott de "larve pleurnicharde" et son collègue du Parti libéral Christopher Pyne de "caniche apprêté".

Autre sortie qui a étonné -le mot est faible- tous les dirigeants de la planète: lorsque Julia Gillard a mis en garde le plus sérieusement du monde la population contre les "zombies et bêtes démoniaques" pour la fin du monde:

"À mes chers compatriotes australiens qui sont encore vivants, la fin du monde approche, (comme) l'a prédit le calendrier maya. Que le coup final soit porté par des zombies dévoreurs de chair humaine, des bêtes démoniaques de l'enfer ou par le triomphe de la K-pop (la pop sud-coréenne, particuliérement apprécié des ados, ndlr), vous devez être persuadés d'une chose à mon sujet : je me battrai pour vous jusqu'à la toute fin. Au moins, cela veut dire que je n'aurai plus à faire 'Questions et Réponses' (une émission politique télévisée où les personnalités répondent aux questions d'auditeurs, ndlr). Bonne chance à vous tous".

Cette rousse coiffée au carré strict a essuyé de nombreuses attaques depuis qu'elle dirige le pays, dont plusieurs sexistes et injurieuses. Mais elle cite sa solidité comme une de ses principales qualités. "J'ai toujours eu une grande confiance en moi et je ne me laisse pas aisément marcher sur les pieds ou influencer par les autres", déclarait-elle en décembre dernier.

Et il en faut de la force de caractère pour ne pas se laisser marcher sur les pieds. En 2007, un élu conservateur avait provoqué un tollé en jugeant qu'une femme "délibérément stérile" ne pouvait conduire les affaires du pays. Dans une interview en 2008, elle avait abordé ce sujet en expliquant qu'elle était "pleine d'admiration pour les femmes qui réussissent à mener de front vie de famille et vie professionnelle" mais qu'elle "n'était pas sûre d'en être capable". Dernièrement, elle avait fait face à un animateur radio qui voulait la forcer à avouer que son compagnon était homosexuel "parce qu'il était coiffeur".

Dans le même genre, un dîner organisé le 28 mars 2013 à Brisbane dans l’Etat du Queensland par le Parti Libéral en vue de récolter des fonds proposait en plat principal "la caille de Julia Gillard frite à la mode Kentucky".Pour être sûrs que les 20 convives saisissent bien la subtilité de la référence à l’anatomie de la chef du gouvernement australien, le menu précisait : "Petits seins, énorme cuisses et une grande boite rouge".

À la défaveur d'un vote de confiance, Julia Gillard quitte la politique. C'est la fin de la "première premier ministre australien". Après avoir constaté sa défaite, elle s'est exprimée, les larmes aux yeux, assurant aux femmes qui lui succéderont : "cela sera plus facile pour la prochaine fois, et d'autant plus pour la suivante et encore davantage pour celle qui suivra". Il faut toujours conclure sur une note d'espoir.

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