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Port du turban : la fédération québécoise annoncera sa décision dans 10 jours

Port du turban : la fédération québécoise annoncera sa décision dans 10 jours

La Fédération du soccer du Québec (FSC) a pris une décision concernant le port de turban, de patka et de keski par les jeunes joueurs, mais elle ne l'annoncera pas avant 10 jours.

Une réunion d'urgence avait lieu mardi soir, au lendemain de l'annonce d'une suspension imposée par l'Association canadienne de soccer (ACS) en raison de cette décision.

Les membres de la fédération ont décidé de ne pas révéler la teneur des discussions, même si des sources ont confirmé à La Presse Canadienne qu'une décision avait été prise.

Marois à la défense de la FSC

Plus tôt mardi, la première ministre Pauline Marois s'était rangé derrière la FSC, et estime qué l'ACS avait outrepassé son mandat. La Fédération québécoise est « autonome » , a le droit d'établir « ses propres règlements » et « n'est pas assujettie » à l'association canadienne, a fait valoir Mme Marois lors d'un court point de presse à l'Assemblée nationale.

Elle a ajouté qu'elle appuyait les « orientations » de l'organisme québécois, qui a soulevé la controverse au pays avec sa décision.

Interrogés dans les couloirs de l'Assemblée nationale, la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport, Marie Malavoy, et le ministre qui pilote le dossier de la Charte des valeurs québécoises, Bernard Drainville, ont abondé dans le même sens.

« Je souhaite vraiment que l'association canadienne nous laisse tranquilles et nous laisse prendre nos décisions parce que ce sont les jeunes qui risquent d'en souffrir à très court terme », a déclaré la ministre Malavoy.

Québec divisé

À Québec, le Parti libéral du Québec et Québec solidaire ont également réagi.

Le chef de l'opposition officielle, Jean-Marc Fournier, dit croire que la FSQ a agi « de bonne foi » en bannissant les joueurs qui portent des turbans, mais il priorise l'accès au jeu pour tous les jeunes sikhs.

« Je respecte la fédération québécoise comme je respecte l'association canadienne, mais je ne suis pas du même point de vue. Je pense que tout le monde devrait pouvoir jouer », a-t-il dit.

Quant au député Amir Khadir, de Québec solidaire, il croit que l'approche entre les intérêts du gouvernement et les groupes religieux doit être équilibrée.

« La situation est problématique à cause du fait que les politiciens n'ont pas pris leurs responsabilités », a-t-il plaidé.

L'histoire a des échos jusqu'à Ottawa, où le ministre de l'Immigration, Jason Kenney, et le chef du Parti libéral du Canada, Justin Trudeau, ont applaudi la décision de l'ACS.

L'accessibilité avant tout

Le président de l'Impact de Montréal, Joey Saputo, a également réagi en disant « qu'on ne devrait pas empêcher un enfant de jouer au soccer au niveau mineur parce qu'il porte un turban ». Il précise toutefois qu'il « comprend la décision de la FSQ qui a été prise selon un règlement de la FIFA, qui laissait place à interprétation ».

« L'Association canadienne de soccer a fait une recommandation et n'a pas statué précisément sa position auprès des fédérations provinciales. Par ailleurs, la décision de l'Association canadienne de suspendre la fédération est donc nettement exagérée. Toutes les instances en cause doivent trouver un terrain d'entente pour le bien du sport », peut-on lire dans un communiqué publié sur le site de l'Impact.

Un ancien entraîneur de soccer sikh se dit déçu de la tournure des événements, estimant que la situation n'aurait pas dû prendre une telle ampleur et que la fédération québécoise devrait simplement changer son fusil d'épaule.

Conséquences possibles

La décision de l'ACS, prise lundi soir, pourrait affecter la façon dont le Québec obtient la permission de participer à certaines compétitions nationales ou interprovinciales, ou encore en matière du choix des arbitres. La suspension pourrait également avoir des conséquences sur certaines subventions ou programmes de formation. Pour l'instant, aucune mesure concrète n'a été annoncée.

L'ancien joueur de l'Impact de Montréal et analyste de soccer Patrick Leduc explique que les joueurs québécois pourraient être privés de championnats canadiens en raison de cette suspension de la fédération. « Toutes les équipes québécoises seraient barrées de participer à un tel championnat canadien », illustre M. Leduc, faisant référence aux compétitions qui se tiennent au cours de l'été.

M. Leduc estime que deux possibilités s'offrent à la FSQ, soit revenir sur sa décision et rentrer dans le rang canadien ou maintenir sa décision et se dissocier de la fédération canadienne. La fédération québécoise devrait ainsi s'organiser avec les cotisations de ses membres.

Une question d'accessibilité

Le président de l'ACS, Victor Montagliani, a indiqué que son organisme a demandé, jeudi dernier, à la FSQ d'infirmer sa décision. Il a ajouté que « l'inaction de la Fédération forçait (l'ACS) à prendre des mesures afin d'assurer que le soccer demeure accessible au plus grand nombre de Canadiens ».

Pour l'ACS, le Québec doit cesser de faire bande à part et permettre le port du turban sur les terrains de soccer, comme le fait déjà le reste du Canada. Elle affirme que la suspension ne sera levée que lorsque la FSQ aura obtempéré.

L'ACS rejette ainsi l'argument sécuritaire évoqué par la FSQ lorsqu'elle a décidé d'interdire le port du turban. La suspension de la FSQ au Canada est d'autant plus surprenante qu'elle s'appuie sur la réglementation de la Fédération internationale de football association (FIFA). La FIFA détaille les pièces d'équipement permises sur le terrain de soccer et le turban ne se retrouve pas sur cette liste.

L'ACS rappelle que la consigne d'autoriser le port du turban, du patka et du keski a été transmise le 11 avril 2013 à tous ses membres provinciaux et territoriaux et est depuis « appliquée avec succès à travers le Canada ».