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La descente aux enfers se poursuit pour les vins de moins de 10$

À ma connaissance et sauf erreur, aucun nouveau produit de 10,95$ ou moins n'a été ajouté jusqu'à présent à la SAQ. Si c'est le cas, notre monopole d'état ne m'en a pas avisé tel que je lui en avais fait la demande. Cette catégorie de produits continue de fondre comme neige au soleil dans l'indifférence générale, surtout et ironiquement depuis le 10 janvier dernier, date où l'on avait pourtant déclaré vouloir en augmenter le nombre.
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À la suite de mon billet du 9 janvier dernier où je prédisais à moyen terme la disparition des vins vendus pour moins de 10$ à la SAQ, dès le lendemain, soit le 10 janvier, le monopole a déclaré publiquement qu'il n'avait pas l'intention de les faire disparaître et qu'il était même pour ajouter dès cette année, de 5 à 10 vins qui seraient vendus 10,95$ ou moins.

J'avais écrit, dans ma chronique du 16 janvier, dernier que je suivrais la réalisation de cette modeste promesse au cours de l'année, mettant en pratique le bon vieil adage «Faites confiance, mais vérifiez!» J'en profitais pour aussi mentionner:

Espérons que l'on ne se contentera pas d'éliminer en grand nombre les vins de la catégorie des vins vendus en bas de 10,00$ et d'augmenter celle des vins vendus entre 10,00$ et 10,95$ pour affirmer que la promesse a été respectée. Ne jouons pas sur les mots et encore moins avec les chiffres. En quelque part, il faut que les bottines suivent les babines.

10 mois (308 jours!) plus tard où en sommes-nous exactement?

À ma connaissance et sauf erreur, aucun nouveau produit de 10,95$ ou moins n'a été ajouté jusqu'à présent. Si c'est le cas, notre monopole d'état ne m'en a pas avisé tel que je lui en avais fait la demande. Malheureusement entre-temps, cette catégorie de produits continue de fondre comme neige au soleil dans l'indifférence générale, surtout et ironiquement depuis le 10 janvier dernier, date où l'on avait pourtant déclaré vouloir en augmenter le nombre.

La SAQ continue plutôt d'appliquer envers et contre tous sa suicidaire ''solution finale" visant à éliminer complètement ses vins d'entrée de gamme.

Un gros merci à la boîte de graphisme FFunction d'avoir si bien réussi à rendre attrayant et amusant un tableau de chiffres!

En passant de 63 vins en janvier 2013 à moins de 30 aujourd'hui, nous avons donc une diminution de plus de 50% pour cette catégorie de vins depuis le début de l'année! Une chance que l'on a affirmé publiquement ne pas avoir l'intention de les éliminer car sinon le génocide aurait sans aucun doute été complet.

Puisque le répertoire de la SAQ compte plus de 10 000 vins, ces 30 vins ne représentent que 0,03% des vins offerts au Québec. 3 dixièmes de 1%! Je vous rappelle qu'une étude de l'International Wine and Spirit Research de Londres (IWSR), réalisée en 2012 a recensé que 91% des tous les vins vendus dans le monde (format de 750 ml) coûtent moins de 10$.

En toute honnêteté, je sais que la Société des Alcools a procédé au cours de l'année à un appel d'offres pour sélectionner 5 ou 6 produits de 10,95$ et moins qui devraient arriver (finalement!) sur les tablettes vers la fin de février 2014, soit 13 mois après en avoir fait l'annonce.

La SAQ ajoutera donc bel et bien 5-6 produits. Mais ce qu'elle ne vous avait pas dit, ce que pendant qu'elle ajouterait 6 produits, elle en éliminerait plus de 33! Une peccadille.

Cette valse-hésitation est pire qu'un tango. Avec notre monopole, c'est un pas vers l'avant et six vers l'arrière. Lorsque la population a écouté la déclaration de la SAQ en janvier dernier à la télévision, je ne crois pas que celle-ci aurait pu se douter un seul instant de ce qui était pour se produire en dix mois à peine. Avouez qu'on vous a bien eu! Encore une fois.

On peut tout de même dire que la SAQ a rempli une partie de son engagement. Elle avait promis de changer la situation et ce fut bel et bien le cas. En effet, la situation est maintenant deux fois pire qu'avant. Et ce n'est pas moi qui le dit mais les chiffres qui parlent d'eux-mêmes.

Le Québec sera donc bientôt l'un des seuls endroits sur la planète (société distincte quand tu nous tiens) où il sera impossible d'acheter un petit pinard pour moins de 10$. Bien sûr, cela doit être le monde entier qui est dans l'erreur et nous qui avons compris quelque chose d'extraordinaire qui échappe encore à plus de 99% de la population mondiale.

J'aurais bien aimé, croyez-le ou non, pouvoir vous dire aujourd'hui que je m'étais complètement trompé en janvier dernier quand je vous avais prédit que les vins de moins de 10$ allaient disparaître du répertoire de la SAQ. J'aurais cent fois préféré devoir admettre que la SAQ avait non seulement préservé le nombre de ces vins mais avait aussi respecté son engagement en augmentant le nombre. Malheureusement, comme vous venez de le constater, tel n'est pas le cas.

Vous avez sans doute remarqué que l'un des arguments préférés de notre monopole d'État pour expliquer la baisse assez drastique des vins de moins de 10$ de son répertoire est que l'inflation et les hausses de diverses taxes ont fait augmenter les prix au cours des dernières années et que certains vins ont donc changé de catégorie de prix. C'est tout à fait normal et sachez que je comprends cela.

En revanche, ce que la population ne comprend pas (et moi non plus), c'est pourquoi la SAQ ne va pas en chercher de nouveaux pour les remplacer et garder ainsi le nombre de la gamme intact. Il existe pourtant de part le monde des dizaines de milliers de bons produits qui représentent de parfaits candidats de remplacement potentiels.

Le dessein du monopole est évident. Faire disparaître ces produits abordables qui ont pour principal défaut de prendre la place sur les tablettes de magasins des nouveaux produits de 18$-20-24$ que l'on désire vous forcer à acheter.

Pourquoi est-ce que je vous parle de vous imposer des vins de 18$-20-24$? Tout simplement parce que la situation des vins vendus au Québec entre 10$ et 15$ s'est, elle aussi, grandement détériorée. Un coup parti pourquoi s'arrêterait-on en si bon chemin?

Marc-André Gagnon rapporte ceci sur son site internet vinquebec.com :

Nous constatons aussi que toute la catégorie des vins à moins de 15 $ diminue aussi constamment. Le nombre de vins de moins de 15 $ a ainsi diminué de 28 % depuis le début de l'année, passant de 895 à 641....

Ce n'est pas cette semaine qu'on approchera de l'objectif, car sur les 77 nouveaux vins, il n'y en a aucun à moins de 16 $!

Je vous rappelle que le nombre de vins figurant au répertoire de la SAQ dépasse 10 000. Les 641 vins qui restent à la SAQ (en format 750 ml) de moins de 15$ représentent à peine 6.4% de l'ensemble. Encore beaucoup trop, semble-t-il, pour notre monopole car presque tous ses nouveaux produits sont au-dessus de 16$.

Il serait tellement plus simple pour la Société des Alcools du Québec de nous dire tout simplement la vérité. Quelque chose comme:

Suite aux exigences de profits de plus en plus élevées du gouvernement du Québec, nous n'avons pas d'autres choix que d'éliminer les vins d'entrée de gamme de notre répertoire. Notre seuil est dorénavant fixé à 15$.

Au moins, cela serait clair. Décision guère plus acceptable selon mon point de vue, mais au moins plus transparente. L'intelligence des contribuables serait ainsi respectée.

Je le redis et le répète (car dans la vie, il vaut mieux se répéter que de se contredire), cette stratégie est contre-productive à moyen et long terme. J'ai qualifié celle-ci au début de mon billet de suicidaire et pour cause. Je ne connais aucune industrie dans le monde (même un monopole) qui est devenu de plus en plus florissante en éliminant elle-même ses produits les moins chers. On fait plus d'argent au début mais quand on atteint le point de rupture, on en fait de moins en moins par la suite.

C'est comme vouloir faire monter les clients un escalier qui compte huit marches mais auquel on aurait enlevé les trois premières. Beaucoup ne feront pas le saut.

Sans en être l'unique cause, je crois tout de même que ceci explique la baisse depuis bientôt un an des ventes en volume de vin au Québec, ainsi que les profits qui commencent à diminuer au lieu d'augmenter comme par le passé. Attention, mur droit devant!

On aura beau empiler promotion sur promotion de toutes sortes comme on le fait depuis juin dernier pour mousser les ventes, cela risque de ne pas être suffisant. Ce que les gens veulent ce ne sont pas des vins corrects et "ordinaires" à 18$ offerts deux fois par année pendant 10 jours à 2$ de rabais, mais de vrais bons vins sur lesquels on n'appliquerait pas une majoration excessive de 130%, et qui serait ainsi vendus à 14$ à l'année longue. Si simple pourtant.

Comme vous le voyez, je n'ai rien contre le milliard de dollars de dividendes versés au gouvernement. J'essaie même de le préserver, voire de l'augmenter. Mais en servant bien les intérêts des consommateurs toutefois, pas en les surexploitant! (Et si quelqu'un commente à la fin de ce billet que je ne fais que prôner la privatisation de la SAQ, promettez-moi de lui écrire pour lui demander de lire ce billet au complet S.V.P.)

La croissance future de la Société des Alcools reposera forcément sur un nombre de plus en plus grand de clients qui consommeront davantage de ses produits, et non pas sur un nombre de plus en plus petit de personnes qui achèteront des vins de plus en plus chers.

Il est fort probable que très bientôt le service des relations publiques de la SAQ, par l'entremise d'un communiqué, vous expliquera que la baisse de leurs ventes et de leurs profits est due à des causes externes et hors de leur contrôle, comme les changements climatiques ou le vieillissement de la population.

L'erreur principale que font les membres de la haute direction de la Société des Alcools du Québec est de croire que puisque qu'ils ont le monopole de la vente du vin, les consommateurs continueront d'affluer dans les succursales peu importe les prix de vente des produits et peu importe la qualité des vins offerts.

On a tellement répété ad nauseam à la population que ce n'était pas grave si les prix de vins au Québec étaient très élevés puisqu'il ne s'agissait pas d'un bien essentiel que les gens ont fini par se dire qu'effectivement, à ces prix et pour cette qualité, ils pouvaient très bien s'en passer! Et c'est ce que de plus en plus de gens malheureusement font. C'est l'histoire de l'arroseur arrosé.

C'est dommage car lorsque le lien de confiance se brise entre une entreprise et ses clients, il faut beaucoup de temps pour le rebâtir.

Suggestions de vins de la semaine :

Vin mousseux

Crémant de Bourgogne, Caves Bailly Lapierre, Cuvée Pinot Noir, France (voir ici)

Vins rouges

Fontal Crianza, Bodegas Fontana, Castilla-La Mancha, 2010, Espagne (voir ici)

Shiraz, Vineyard Select, McLaren Vale, Angove family, 2011, Australie (voir ici)

Guidalberto, Tenuta San Guido, Toscana, 2011, Italie (voir ici)

Bonnes dégustations!

Pour vos commentaires et suggestions en privé, écrivez à: clubdgv@gmail.com

Le blogue personnel d'Yves Mailloux: Club des Dégustateurs de Grands Vins

À VOIR AUSSI:

Domaine de Fourn, Blanquette de Limoux, 2011, France, 19,45$

12 vins parfaits pour la cuisine réconfortante

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