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PLQ et publicité négative : le mépris génétique du créateur

Ce gouvernement comprend le droit d'auteur que comme il comprend le droit à l'éducation : redéfini selon ses intérêts du moment. Pourquoi se plaindraient-ils de ce commentaire? Il est faux que c'était nos propres images, mais il est vrai que ce sont leurs propres comportements...
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Le Parti libéral du Québec a disposé à sa guise d'images mises en ligne par un citoyen et sur lesquelles figure Pauline Marois participant à une manifestation au rythme des casseroles. Le parti de Jean Charest a fait une sélection et un montage de certaines images, leur a appliqué une texture, les a rendues monochromes, les a ralenties, et a ajouté le logo du PLQ à la fin de l'exercice.

Le droit d'auteur est un domaine en constante évolution, et la révolution des technologies de l'information, au premier chef Internet, sont venus en bousculer les pratiques et l'application des règles. Certains principes fondamentaux n'en sont pas déboulonnés pour autant.

D'une part, le créateur d'une œuvre - au sens large : musique, texte, dessin, peinture ou sculpture, cinéma, danse, photographie... - est le seul propriétaire des droits réservés à l'auteur. C'est le droit d'auteur, le copyright. Si la création est collective, des ententes régissent le partage et la co-propriété de l'œuvre, et toute une industrie, l'édition, s'est construite sur l'achat et la gestion de droits d'auteurs dès lors que le potentiel commercial d'une création lui semble le justifier. L'encadrement légal et économique de ce phénomène aux frontières floues est complexe et animé de débats d'érudits dont les créateurs font souvent les frais.

Lorsque le type qui nous sert de premier ministre affirme que les images usurpées étaient du domaine public - libres de droit selon certaines règles - il étale son ignorance. La présence d'une création sur Internet ne la libère pas de l'autorité du droit d'auteur. La difficulté de faire valoir ce droit crée cette confusion, et la puissante industrie des télécommunications en fait parfois ses choux gras. Il le sait.

Ainsi, le Parti libéral du Québec s'en emparé illégalement d'images et les a reproduites, utilisées et diffusées à son bénéfice. Il s'agit sans équivoque d'une violation du droit d'auteur dont monsieur Séguin est le seul propriétaire. En modifiant les images et en leur conférant une intention qui n'est pas celle du créateur, le PLQ viole en plus le droit moral de l'auteur. On ne peut pas, en vertu de la loi, aussi libéralement associer une œuvre à une intention différente, contraire ou odieuse aux yeux de son créateur.

Bien sûr, comme plusieurs l'ont mentionné, monsieur Séguin peut ne pas avoir les moyens de faire valoir son droit. C'est un vice du système dont des industries entières se gavent. De même, les difficultés technologiques font en sorte que les petits voleurs se revendiquent d'une liberté bien étonnante en copiant, volant et commercialisant des contenus « disponibles » sur Internet. Ce sont des pirates qui minent un des moteurs de notre système économique : la propriété intellectuelle. Le droit d'exploitation commerciale d'une création originale.

Enfin, on a prétendu, stupidement dirais-je, que la publicité n'était pas négative puisqu'elle mettait en ligne des images de Pauline Marois sans y ajouter de commentaires. Marshall McLuhan eut souri. Le médium est le message. Le simple fait que le PLQ, avant même de les avoir trafiquées, reprenne à son compte des images où figure Pauline Marois est porteur d'une intention négative.

Tous ça vient d'un gouvernement et d'un parti qui n'envisagent pas d'avenir à leur chef au-delà du mois de septembre s'il ne déclenche pas d'élections. Dès lors, l'improvisation fait foi de tout. Rappelons-nous toutefois que la ministre de la Culture de ce gouvernement insultait gravement les créateurs québécois il y a quelques semaines à peine, les associant avec hargne à « la violence et l'intimidation ». Rappelons-nous que ce gouvernement a regardé sans broncher la loi C-11 être votée par le Parlement du Canada alors qu'elle pose des menaces extrêmement graves aux créateurs, aux entreprises culturelles et en particulier à l'édition littéraire du Québec. Rappelons-nous enfin que c'est gêné, sans trop comprendre et le regard fuyant que ce même gouvernement Charest est incapable de nous assurer que le Canada protégera toute la complexité de la névralgique exception culturelle dans la négociation élastique d'un traité de libre-échange entre le Canada et l'Union européenne. Une exception culturelle qui est l'objet d'un traité international, et qui est née ici, au Québec.

De façon générale, le bilan du gouvernement de Jean Charest est un recul historique à de nombreux égards pour le Québec. Si la dilapidation de nos ressources naturelles et la soumission aux lobbys des hydrocarbures, l'honteuse provocation d'un affrontement avec toute une jeunesse et tout ce que le Québec a de progressif ou les reculs systématiques du français ont fait les manchettes, il y a des enjeux qui ne sont pas moins importants, n'ont été que trop peu abordés, et sous la lorgnette des libéraux ne sont dignes que de mépris.

Ce gouvernement comprend le droit d'auteur que comme il comprend le droit à l'éducation : redéfini selon ses intérêts du moment. Pourquoi se plaindraient-ils de ce commentaire? Il est faux que c'était nos propres images, mais il est vrai que ce sont leurs propres comportements...

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