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Tunisie et corruption du régime Ben Ali: les pires doutes sont confirmés

L'étude révélée jeudi par la Banque mondiale confirme, corrélations mathématiques à l'appui, que le clan Ben Ali manipulait les lois et les réglementations en sa faveur, si bien qu'en 2010, il s'accaparait à lui seul... 21 % des profits de tout le secteur privé tunisien.
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Quelle étude à point nommé nous a livrée la Banque mondiale, le jeudi 27 mars, sur la corruption en Tunisie sous le régime Ben Ali! Dans un papier scientifique au titre accrocheur, «All in the Family: State Capture in Tunisia», trois chercheurs de l'institution basée à Washington confirment la corruption et les avantages indus que se donnait le clan Ben Ali dans la Tunisie pré-révolutionnaire.

Même si l'étude apporte la preuve sur ce qu'on savait tous, soit que la Tunisie était devenue un terreau dont les affaires les plus lucratives atterrissaient dans le petit clan familial du président, elle met des chiffres et toute la rigueur de la science sur cette corruption.

Elle révèle en effet, corrélations mathématiques à l'appui, que le clan Ben Ali manipulait les lois et les réglementations en sa faveur, si bien qu'en 2010, il s'accaparait à lui seul... 21 % des profits de tout le secteur privé tunisien.

Sans vergogne, le clan Ben Ali parasitait de plus en plus l'économie du pays: il investissait dans des secteurs lucratifs, qu'il protégeait ensuite de toute concurrence, grâce entre autres à des décrets présidentiels. Pas moins de 220 entreprises étaient ainsi sous leur coupole, pour une valeur de plus de 13 milliards de dollars, soit le quart du PNB tunisien en 2011 : du capitalisme de copinage, comme l'écrit la Banque mondiale (crony capitalism).

La supposée « ouverture » aux investisseurs dont se vantait tant la Tunisie était en somme un « mirage », disent les auteurs de l'étude. Ce mirage explique notamment pourquoi la diplomatie canadienne, pas dupe des manœuvres du régime, déployait peu d'efforts en Tunisie, et envisageait même de fermer son ambassade.

L'étude de la Banque mondiale est d'autant plus indiquée que les rumeurs d'enrichissement facile et illicite ont largement contribué au ras-le-bol révolutionnaire. Un ras-le-bol grandement dirigé contre la famille Ben Ali, mais, peut-être plus encore, contre la famille de sa deuxième femme, les Trabelsi, dont les maisons ont été complètement saccagées sous la rage populaire durant les jours suivants la Révolution tunisienne du 14 janvier 2011.

Belhassen, le parrain du régime, à l'abri, parmi nous

Parlant des Trabelsi : on n'a plus de nouvelles, du tout, du parrain présumé de ce régime de copinage, Belhassen Trabelsi, beau-frère du président, qui a fui de nuit vers Montréal suite à la révolution de jasmin, il y a de cela déjà plus de trois ans.

Son nom est bien sûr cité dans l'étude de la Banque mondiale, qui rappelle sa vaste emprise notamment dans la cimenterie, le sucre, le secteur aérien. Ah que Belhassen devait se trouver malin de faire tant de pognon. Qu'il devait se sentir tout léger à faire la grosse vie, avec ses frères, ses sœurs et sa belle-famille Ben Ali ! Savait-il que sa famille était, toutes classes confondues, honnie par la population tunisienne ? On peu en douter tant dorée était la bulle dans lequel il vivait, au sein d'une dictature caricaturale, qui ressemblait à la Corée du Nord, notamment en matière de culte de la personnalité et de liberté d'expression.

Notre nouveau résident d'origine tunisienne profite de la protection d'un État de droit, le Canada, pays avec des règles de bonne gouvernance qu'il a pourtant largement piétinées dans son pays, venant chez nous protéger sa peau avec de l'argent acquis grâce à son copinage avec son beau-frère Ben Ali.

Que lui arrive-t-il ? Bien difficile de le savoir.

Restera-t-il ici aussi longtemps que le Rwandais Léon Mugesera, qui a vécu... 17 ans parmi nous, au Québec, avant d'être finalement expulsé dans son pays afin d'y être jugé pour ses actes présumés génocidaires ? Belhassen semble bien parti pour cela. Comme quoi notre système juridique, certes enviable, car indépendant, mais aux procédures combien longues, complexes, protège aussi, hélas, les personnages au passé douteux.

Avis aux profiteurs magouillant autour des dirigeants des États corrompus. Un seul petit pied posé à même notre sol et vous pourrez respirer en toute tranquillité : les avocasseries canadiennes vous mettront longtemps à l'abri, dans le plus paisible anonymat.

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