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Ces maudits gauchistes nombrilistes...

Ces étudiants, ces maudits gauchistes que vous accusiez d'être des bébés gâtés nombrilistes lors du printemps 2012, se mobilisent activement et solidairement pour les travailleurs, les citoyens, les familles... pour vous. Est-ce si étonnant, et ce malgré votre attitude indigne?
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Quelle surprise, les étudiants, avant même que la grève se soit officiellement mise en branle dans les diverses facultés, se sont fait varloper par les chroniqueux de ce monde! Gloire aux sophismes, aux raisonnements fallacieux, aux diatribes, aux vitupérations exagérées et sans fondement...

Cette « grève bidon », pour reprendre le titre de presse d'un grand philosophe de la pensée moderne, devrait sans aucun doute mener à du gros « love » pour nos caribous forestiers, car, après tout, l'inutilité de ce genre de mouvement est éloquente. En gros, le message de ces grands penseurs médiatiques contemporains est clair : FARMEZ-la, retourner à l'école et soyez des étudiants. Point à la ligne.

Pourtant, n'est-ce pas ce qu'ils font en prenant la rue et en se faisant critiquer à gauche, à droite, en haut, en bas? Car, ces mêmes étudiants, à qui on commande de retourner étudier, ne sont-ils pas en train de démontrer l'incohérence et l'illogisme des critiques qui leurs sont adressées? Et oui... ce sont ces mêmes étudiants - ceux qui sont pourtant, chaque jour, confrontés, voire poussés à réfléchir aux grands concepts et principes sociétaux comme la démocratie, la justice et les injustices, la responsabilité, les droits et les devoirs citoyens, les inégalités, etc. - qui se font carrément dire, sans gêne, qu'ils devraient se la fermer et retourner à leur vie quotidienne. Comment ne pas y voir un paradoxe grossier lorsque l'on sait que le travail des étudiants, intellectuels et universitaires est, d'une part, de marier la théorie à la pratique et, d'autre part, de comprendre la société et, conséquemment, de s'élever contre la malhonnêteté et la bêtise?

C'est d'ailleurs ce qu'ils ont fait en 2012 et c'est ce qu'ils font encore aujourd'hui, mais cette fois dans une optique beaucoup plus large de contestation sociale. Chers Québécois et chères Québécoises, ce sont ces mêmes étudiants que vous invectivez, que vous critiquez à tout rompre qui sont sur la place publique, en première ligne, à défendre vos intérêts individuels et collectifs. Oui, ce sont eux qui sont à l'avant-scène pour marteler un message de justice sociale et tenir tête aux mesures d'austérité d'un gouvernement suranné et corrompu. Autrement dit, ce sont eux, encore une fois, qui sont dehors à se geler le « truffiot », plaidant votre cause comme citoyen et comme travailleur.

N'avez-vous rien compris? S'ils ont quitté les classes et investi la rue, ce n'est pas pour défendre uniquement leurs intérêts estudiantins, mais plutôt pour dénoncer une situation globale qui est défavorable à l'ensemble des partis de la société, c'est-à-dire vous les travailleurs de la santé, de l'éducation ; vous les cols blancs, les cols bleus ; vous les policiers et les pompiers... vous la classe moyenne québécoise!

Ces étudiants, ces maudits gauchistes que vous accusiez d'être des bébés gâtés nombrilistes lors du printemps 2012, se mobilisent activement et solidairement pour les travailleurs, les citoyens, les familles... pour vous. Est-ce si étonnant, et ce malgré votre attitude indigne? Pendant qu'ils se font matraquer, harceler, intimider, critiquer - parce qu'ils ont osé être ce qu'ils sont : des étudiants qui réfléchissent et qui contestent l'absurdité des nos politiques et politiciens - vous êtes tranquillement assis dans votre salon à regarder Carey Price multiplier les miracles, en vous disant tout bonnement que tout va bien, mis à part ces @%$#& d'étudiants qui bloquent les rues du centre-ville. Ah, j'avais oublié... parce qu'après tout mon Marcel, le samedi après-midi tu as ta petite routine hebdomadaire d'aller faire un tour de char sur le boulevard Maisonneuve (sic).

Allô, la terre appelle Marcel! Malheureusement, Marcel est occupé à faire un tour d'auto ou encore à se divertir plutôt qu'à s'informer, à comprendre, à réfléchir sur ce qui se passe dans la société... Carey, Carey, Carey! Attention, je ne dénigre pas les amateurs de sports, et encore moins ceux du Canadiens de Montréal (je suis moi-même un partisan), loin de là. Cela dit, je pense candidement qu'au-delà du simple divertissement populaire, il importe de faire un minimum d'efforts intellectuels pour comprendre la réalité qui nous entoure, ne serait-ce que pour ne pas être entièrement démuni devant les contextes et situations.

Mais, revenons à nos moutons (sans jeu de mots douteux)... Donc, mon cher Marcel, après les avoir traités de nombrilistes en 2012, voilà que tu les accuses dorénavant de sortir dans la rue inutilement parce qu'ils ne sont pas « directement » affectés par les mesures gouvernementales. Please! Est-ce possible d'être moins cohérent, parce qu'honnêtement j'en doute...

De toute façon, je n'en peux plus de toute cette morosité, de tout cet immobilisme populaire... Il me reste donc qu'une seule chose à vous dire: restez donc assis paisiblement dans votre divan pendant qu'on saccage les régions, qu'on détruit le système de santé, qu'on favorise le projet de pipeline de TransCanada, qu'on passe au tordeur les régimes de retraite, qu'on prévoit augmenter la TVQ, qu'on coupe abusivement dans les services, qu'on perd des milliers d'emplois annuellement, qu'on continue à graisser la patte des copains, qu'on réduit les services aux étudiants, même ceux en difficultés, qu'on passe la tronçonneuse dans les subventions à la recherche universitaire, qu'on demande des concessions à tout le monde, sauf aux plus riches, aux entreprises et aux banques. C'est ça, serrez-vous la ceinture et restez assis pénard pendant que le fédéral fait passer ces projets moyenâgeux comme C-51, tout en encourageant les bons vieux Canadiens à se procurer un gun pour se faire justice eux-mêmes.

Chers concitoyens, vous pouvez dormir tranquille, vous pouvez être sans crainte... nos gouvernements - ceux qui nous espionnent, pigent allègrement dans nos poches de plus en plus vides, détruisent les acquis de la Révolution tranquille pour lesquels nos parents se sont battus corps et âme, ravagent nos écosystèmes et notre environnement, mettent à mort les outils régionaux de développement et nous mentent en pleine face - ont les choses bien en mains. De toute manière, le printemps ce n'est pas pour se réveiller collectivement et pour contester l'irrationalité des décisions politiques, mais pour écouter les séries de la coupe Stanley. Les Habs en 7!

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