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La saga entourant la quenelle de Dieudonné a donné lieu à une multitude de propos innocents, voire ignorants et les écarts sémantiques ont été nombreux. Évidemment, je parle ici de l'utilisation erronée du mot «antisémitisme». En effet, le terme «antisémite» est outrageusement employé à tort par les journalistes, les chroniqueurs, parfois même les intellectuels, ce qui conduit les citoyens à l'utiliser de manière tout aussi inexacte.
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Toute cette saga entourant la quenelle a donné lieu à une multitude de propos innocents, voire ignorants. Depuis le début de ce que les médias ont nommé le scandale Dieudonné, les écarts sémantiques ont été nombreux. Évidemment, je parle ici de l'utilisation erronée du mot «antisémitisme». En effet, le terme «antisémite» est outrageusement employé à tort par les journalistes, les chroniqueurs, parfois même les intellectuels, ce qui en somme conduit les citoyens à l'utiliser de manière tout aussi inexacte. Ainsi, c'est la société dans son ensemble qui emploie le mot «antisémite» de façon bancale et incorrecte.

Cette situation ne date cependant pas d'hier. L'antisémitisme, mot inventé et utilisé initialement par le Juif autrichien Moritz Steinschneider (1860), fut en peu de temps dénaturé par l'allemand Wilhelm Marr (1879). Dans la conception initiale de Steinschneider, l'antisémitisme servait à caractériser les défauts (défaillances) spirituo-culturels chez l'ensemble des peuples sémites (nous y reviendrons). Or, par le biais d'un procédé intellectuel et surtout une politique malhonnête, les Juifs et leurs alliés occidentaux ont petit à petit altéré la base conceptuelle du mot pour réussir à l'associer captieusement à une idéologie politique qui promeut l'antijudaïsme et éventuellement l'antisionisme. Selon cette vision, quiconque s'interrogerait à haute voix sur certaines actions juives (colonies, mur de la honte, actions militaires, etc.) ou encore qui oserait remettre en doute la pertinence (ou légitimité) juive en Israël serait immédiatement accusé d'être antisémite. Pourtant, rien ne serait plus faux, car ces termes ne sont en aucun cas assimilables.

Mais, qu'est-ce que l'antisémitisme? Tel qu'il est véhiculé et présenté aujourd'hui, c'est un concept fourre-tout que nous ne cherchons guère à examiner ou vouloir comprendre davantage. Non, nous tenons pour acquis, comme société et comme individu, que nous connaissons le contenu du concept, sa signification, son origine, son utilisation, etc. Cette attitude arrogante n'est peut-être après tout que le reflet d'une surtaxation vicieuse et viciée du terme. Nul doute que de simplement mettre son nez, pour en savoir davantage, dans l'étymologie ou l'histoire du mot serait suffisant pour se faire traiter d'antisémite; et, bien honnêtement, qui veut se faire taxer d'antisémitisme, qui veut être associé à un mot possédant une telle lourdeur de sens? La perception populaire est si forte, l'imaginaire - imprégné par la diffusion massive de discours et d'images traitant des horreurs nazies, en y associant les termes «antisémite» et «antisémitisme» - est tellement conditionné que quiconque est associé à l'antisémitisme devient coupable d'une grave dérive politico-religieuse qu'il faut dénoncer, punir et exorciser publiquement pour le bien et l'harmonie inter-peuple. Il est donc tentant pour la plupart de fermer les yeux, les oreilles et surtout la bouche.

Donc, je le répète, qu'est-ce que l'antisémitisme? Nous estimons que pour bien comprendre un mot, il est souvent judicieux de le partitionner. Dans ce cas précis, antisémitisme est composé du préfixe «anti» et du mot «sémitisme». Donc la vraie question est: qu'est-ce que le sémitisme? Le terme vient du mot «sémite» qui fait référence aux Sémites, représentant l'ensemble des peuples ayant utilisé (ou utilisant) les langues sémitiques, parmi lesquelles figurent l'arabe et l'hébreu. Originellement réservé à la philologie, le terme sémite s'est, par extension, transposé dans le domaine de l'ethnographie et conséquemment à la notion de race (ethnie), d'où l'expression la race sémite.

Autrement dit, le terme sémite est donc essentiellement une question ethnique reliée intrinsèquement à la linguistique. Donc, logiquement, l'antisémitisme serait le fait d'être contre le sémitisme, soit contre la race sémite qui regroupe à la fois des Juifs qui parlent hébreu et des musulmans ou des chrétiens qui parlent arabe. Pour être plus clair, l'antisémitisme est, en somme, une forme de racisme ethno-linguistique très large, voire qui marie religion, langue et origine ethnique.

D'accord, mais la haine des Juifs dans tout ça ? Au-delà des mots, il y a l'art des mots, celui de leur utilisation et de leur compréhension juste et légitime. Ainsi, une personne qui appellerait un chien «un chat» se ferait hors de tout doute indiquer une faute, laquelle devrait être corrigée. Dans cet ordre d'idées, pourquoi l'usurpation du terme antisémitisme n'est-elle pas dénoncée? Je laisse cette question ouverte...

Somme toute, nous avons tort d'associer automatiquement l'antisémitisme à la haine contre les Juifs. Les termes pour désigner une aversion à l'égard des Juifs sont multiples. Par exemple, l'antijudaïsme (religion), l'antisionisme (conception territoriale), l'anti-israélisme (nationalité) ou même la judéophobie (peur des Juifs) représentent tous des termes plus précis et plus adéquat que l'antisémitisme. J'ose ainsi dire clairement que l'usurpation du mot «antisémite» doit cesser, que l'art des mots doit prévaloir, et ce au risque de me faire taxer d'antisémitisme à mon tour!

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