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Le racisme institutionnel au Parti libéral du Québec

Les politiques culturelles bienveillantes et la «laïcité ouverte» camouflent mal, pour qui veut le voir, le racisme institutionnel qui prévaut au PLQ.
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À pareille date l'an dernier, la journaliste Aurélie Lanctôt dévoilait une vérité qui ne dérange pas suffisamment: Les libéraux n'aiment pas les femmes. Or, maintenant que le premier ministre du Québec se permet d'accuser les un et les autres de néofascisme, il convient de briser un secret encore mieux gardé : les libéraux n'aiment pas les minorités non plus. En se donnant la peine d'examiner l'héritage du PLQ jusqu'ici, on ne peut qu'en arriver à la conclusion que ce parti, au pouvoir plus de 140 mois au cours des 160 derniers, ne mérite aucunement l'immunité dont il jouit en la matière. Puisqu'il faut, semble-t-il, éveiller bien des consciences, ne mâchons pas les mots: le racisme est bien présent au Parti libéral du Québec.

D'abord, combien y a-t-il de minorités visibles au sein du cabinet Couillard? Une sur vingt-sept, deux en comptant Carlos Leitao. Parmi le dernier cabinet Charest, il y en avait deux et dans son premier cabinet, un seul. Au sein du caucus libéral actuel, il y en a entre trois et cinq sur soixante-dix, selon la définition adoptée. Des vingt-six députés libéraux de Montréal et de Laval par ailleurs, on n'en compte aucun aux origines maghrébines ou proche-orientales. Cette représentation est non seulement inappropriée, mais insultante considérant le fait que les communautés immigrantes et les minorités visibles forment un électorat très largement libéral. De plus, ce qui s'applique aux minorités s'applique aussi aux Autochtones qui n'ont de représentant ni au caucus, ni au cabinet du Parti du «Plan Nord». L'asymétrie criante entre sa rhétorique puis la composition de son membrariat, de son électorat et de ses cabinets fait du PLQ, au mieux, un parti hypocrite, ingrat et replié sur lui-même.

Les libéraux semblent qui plus est se satisfaire du fait que les minorités et les Autochtones soient largement surreprésentés parmi les travailleurs surqualifiés, au statut précaire et à la piètre rémunération. Lorsque le ministre des Finances soutient que le salaire minimum actuel est «approprié» et «à l'intérieur de ce qui est souhaitable», c'est d'abord à eux qu'il s'adresse. Pour notre grand argentier, il est «souhaitable» qu'un demi-million de Québécois et parmi eux un nombre disproportionné d'immigrants et de minorités visibles soient maintenus sous le seuil de pauvreté. De là à dire qu'ils ne valent pas mieux, il n'y a qu'un pas. D'ailleurs, outre quelques mesures superficielles et nombre de discours creux, qu'ont fait les libéraux depuis 2003 pour régler durablement les problèmes de reconnaissance des diplômes étrangers et de discrimination à l'emploi? À plusieurs égards, la situation est aujourd'hui pire qu'elle ne l'était il y a treize ans.

Les politiques culturelles bienveillantes et la «laïcité ouverte» camouflent mal, pour qui veut le voir, le racisme institutionnel qui prévaut au PLQ.

Les mesures d'austérité adoptées par le PLQ en disent également long. En plus des femmes, quelles cohortes démographiques auront été, relativement, les plus touchées par les dizaines de millions de dollars en compressions à l'aide sociale? Par les centaines de millions de dollars en coupures budgétaires et de postes aux Commissions scolaires de Laval et de Montréal, ces dernières comptants parmi les employeurs modèles en matière d'inclusion? Par l'élimination du quart des cours «Québec 101», destinés à l'intégration socio-économique des immigrants? Par la hausse des frais de scolarité universitaires pour étudiants étrangers? Par la réduction généralisée des services de francisation? Il ne s'agit là que d'un bilan récent, mais chacun sait à quel point la liste serait longue si elle remontait à 2003. Les «réinvestissements» électoralistes annoncés d'ici 2018, c'est évident, ne pourront effacer le mal qui a été fait.

Que dire maintenant du tort énorme que cause, sans scrupules et au profit d'une multinationale championne de l'évitement fiscal, le gouvernement libéral aux travailleurs de l'industrie du taxi? Au Québec, 90% de ces travailleurs sont issus de l'immigration et des minorités. À Montréal, c'est 92%. Tout bonnement, comme si ces gens aussi ne valaient pas mieux que le seuil de pauvreté, on leur fait perdre les économies d'une vie. Le Devoir en évoquait un exemple concret récemment : Guerol Philistin, Haïtien arrivé au Québec en 1988, a payé son permis de taxi 160 000$ en 2003. Or, alors que la valeur de ce permis ne cesse de décroître, M. Philistin doit désormais se contenter, en raison d'une concurrence déloyale endossée par l'État, de revenus atteignant à peine le salaire minimum. Les libéraux auraient sciemment voulu appauvrir le plus grand nombre possible d'immigrants et de minorités visibles qu'ils ne s'y seraient pris autrement.

Les politiques culturelles bienveillantes et la «laïcité ouverte» camouflent mal, pour qui veut le voir, le racisme institutionnel qui prévaut au PLQ. Même sur ces questions d'ailleurs, son jupon discriminatoire dépasse. La perpétuelle fausse naïveté libérale à l'égard des écoles religieuses en est un bon exemple. Oserait-on réintroduire et subventionner, dans certaines régions du Québec encore sensiblement pieuses, l'enseignement intensif du catéchisme sous prétexte de la préservation de nos «traditions culturelles»? Bien sûr que non, et force est donc de constater que les Yonanan Lowen de ce monde ne valent effectivement pas, aux yeux des Libéraux, les efforts de laïcisation et de déconfessionnalisation consentis au profit de la majorité. L'argument libéral se résume ainsi : il est légitime de nier à certaines minorités le droit reconnu au savoir si cela permet de «préserver leur héritage culturel». Il faut une bonne dose de mauvaise foi pour ne pas en déceler les relents ethnocentristes.

Tout bien considéré, que nos élites médiatiques et intellectuelles s'intéressent autant au racisme du gouvernement libéral qu'au «virage identitaire» de l'opposition serait donc non seulement souhaitable, mais normal. Nous sommes pourtant toujours et peut-être de plus en plus loin du compte. C'est inquiétant.

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