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La charte et moi: conclusion

S'il y avait déjà une division au sein de la population concernant la présence de symboles religieux dans l'espace public, la charte elle, a semé l'intolérance.
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Ce que j'aimerais ajouter sur le sujet, c'est que ce projet de charte, bien qu'il ait avorté, a fait beaucoup de mal à notre société. S'il y avait déjà une division au sein de la population concernant la présence de symboles religieux dans l'espace public, la charte elle, a semé l'intolérance. Et plus particulièrement envers une communauté religieuse, les musulmans. Et je devrais être encore plus précise: envers les femmes musulmanes. Bien entendu, beaucoup de nos frères en islam se sont aussi frottés au débat et s'en sont même fait un cheval de bataille. Mais les vraies cibles ont toujours été les femmes. Ces femmes qu'on accuse de soumission, d'effacer leur personnalité, d'encourager l'ostracisation de la femme. Ces femmes qu'on a tant voulu libérer de force, elles ont payé cher le prix de cette charte qui n'a jamais vu le jour.

Les esprits étaient échauffés par tout ce débat identitaire qui faisait rage comme un incendie incontrôlable. Tant de témoignages et de dénonciations ont fusé. Je ne la connais pas personnellement, mais pour vous donner un exemple d'une histoire qui m'a frappée, à cette époque, une femme portant le hijab était à la recherche d'un appartement. Elle s'est présentée à un immeuble pour visiter un logement à louer et elle se serait retrouvée encerclée par des locataires qui lui ont hurlé à la tête qu'ils ne voulaient pas d'elle ici. Ne trouvez-vous pas cela d'une violence psychologique inouïe? Tout le monde a le droit d'avoir un toit sur la tête, non? (Bon... en aparté je peux vous dire que ce genre de phénomène n'est pas nouveau même si ça se passe différemment. Je peux vous dire que j'ai déjà cherché un logement, il y a longtemps, avec un ex-conjoint qui était arabe. Deux fois, il nous est arrivé de téléphoner pour prendre rendez-vous pour visiter un logement, on se présente dans les minutes qui suivent et on refuse de nous laisser entrer sous prétexte que c'est loué depuis deux semaines! En passant, refuser l'accès au logement à une personne sous prétexte racial, sexuel ou religieux est totalement illégal, pour votre information.) Revenons à nos moutons.

Ces femmes voilées, elles sont des dizaines, voire des centaines à pouvoir vous raconter ce que c'est que de vivre avec des regards braqués sur soi.

Ces femmes voilées, elles sont des dizaines, voire des centaines à pouvoir vous raconter ce que c'est que de vivre avec des regards braqués sur soi. Elles pourraient vous répéter toutes ces phrases soufflées avec haine qui sont venues frapper notre cœur comme une flèche, droit dans la cible. Elles pourraient vous parler des rejets qui s'accumulent lors de recherches d'emploi. Elles pourraient vous parler de ces gens sans gêne qui ont essayé de les dévoiler de force. Ces femmes ont vécu et vivent encore (même si dans certains secteurs je vois un peu d'amélioration) beaucoup d'humiliation. Mais quand elles parlent, on leur dit d'arrêter de se plaindre et de respecter leur terre d'accueil...

Ce que je retiens de cet épisode de notre histoire, c'est, qu'on le veuille ou non, cette situation que l'on a vécue collectivement d'une manière ou d'une autre, elle a fait pointer le doigt sur une série de questions dont la réponse, claire pour chaque individu, est floue quand on essaie de l'interpréter collectivement: à savoir c'est quoi le Québec? Qu'est-ce qu'un Québécois? Qu'est-ce que la laïcité, où commence-t-elle et où doit-elle s'arrêter? Et surtout, c'est quoi notre projet de société?

Comme je le dis, je suis convaincue que chaque citoyen a une vision claire de tout cela, mais de toute évidence, nous ne partageons pas la même, ce qui me mène à la conclusion que nous devons, encore et encore, faire l'effort d'aller l'un vers l'autre, à la rencontre de l'autre. Non pas pour confirmer ce que l'on sait déjà à propos de ce qui nous divise, mais plutôt pour chercher tous ces petits trésors d'information qui nous feront trouver en l'autre des points communs qui seront la base de notre paix sociétale. Trouver le moyen de se reconnaître en l'autre malgré les différences.

Et aujourd'hui en 2017, je vois qu'il nous reste beaucoup de chemin à faire. Alors je vous invite à poursuivre la route avec moi, dans l'espoir d'un meilleur vivre ensemble.

Paix.

Avril 2018

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