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En bon soldat, Bachar al-Assad mène la bataille médiatique

Nous avions tous pensé et désiré que les peuples, débarrassés de l'autoritarisme, auraient la maturité de se choisir des voies démocratiques. Il n'en fut rien, bien au contraire.
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Dans une interview accordée à la chaîne Al-Manar et diffusée mardi le 25 août 2015, le président syrien Bachar al-Assad a longuement analysé la situation politique et militaire interne, a défendu ses alliances (notamment avec la Russie et le mouvement Hezbollah, le qualifiant de «résistance fraternelle») et s'est montré ouvert face aux nouveaux changements géopolitiques de la région.

La guerre en Syrie continuera tant et autant que les Occidentaux ne freinent pas la livraison d'armes aux jihadistes. Oui, l'Occident arme directement les jihadistes du même type que le groupe État islamique et leur offre un soutien logistique via leurs alliés.

Convaincu et décidé d'avoir la tête d'Assad, les chancelleries occidentales ont misé sur les mauvais chevaux et ils s'en rendent compte après l'éclosion du terrorisme domestique et international au sein de leurs foyers. D'ailleurs, le coq français, François Hollande, continue de chanter sans réel pouvoir sur le terrain, hormis d'armer les tueurs jusqu'aux dents. Normal, d'un président qui cherche à «neutraliser» un autre président, ce terme mafieux signifie implicitement assassiner. Cette déclaration sera ajoutée à celle de son ministre Laurent Fabus, qui a dit haut et fort qu'Al-Qaeda en Syrie fait du «bon boulot», sans négliger son souhait de voir le président syrien assassiné lui aussi. On se demande si ce sont des ministres ou des malfrats dans un malheureux film de Taratino!

Sur la même lignée, le président Assad s'est exclamé de la turpitude logique des stratèges euro-américains, de croire défaire des régimes stables, ayant une base populaire solide, comme en Syrie, et les remplacer par des régimes à leur solde comme on changerait une boite de mouchoirs. Cette logique néocoloniale a surement porté une disgrâce, un coup dur et une ignominie à tous ceux et celles qui désiraient un réel changement politique aux régimes arabes.

«Quand les pays conspirateurs contre la Syrie et impliqués dans l'effusion de sang dans ce pays, cessent d'apporter le soutien au terrorisme, on peut dire que nous sommes parvenus au dernier quart d'heure de la crise, vu que tous les autres détails, tels que le règlement politique, le volet politique ou toute autre mesure seront faciles, même si la lutte contre les terroristes se trouvant en Syrie», a dit le président Assad.

Le cas de l'Irak de Saddam Hussein, puis celui de la Libye de Kadhafi, ont plus contribué à l'insécurité de la région, à la circulation des armes, à la formation de groupes armés et mafieux, et à une corruption générale de tous les appareils de l'État et paraétatique. En fait, dès lors que le pays devient un «no man's land», les populations ont été abandonnées sans services sociaux, ni sécurité.

Pire, les jihadistes ou groupes paramilitaires (affiliés ou non avec le terrorisme mondial) font la loi, extorquent les citoyens, commercent la drogue (notamment le captagon en Syrie et dans les zones de combat), imposent des règlements plus ou moins éthique... Sans oublier, la vraie terreur des exécutions en public. Hélas, le groupe État islamique n'est pas le seul à maîtriser cet art.

Le président Assad a par ailleurs fustigé ces chancelleries interventionnistes et rappelle que le destin de la Syrie, et le sien en passant, doit être décider en Syrie par les Syriens, et non à Washington ni à Tel-Aviv, et encore moins à Riyad.

Il a réitéré sa satisfaction de voir son allié le plus proche, la république islamique d'Iran, sortir gagnant politiquement, herculéen financièrement et en effervescence idéologiquement. C'est tout de même grâce au soutien tacite de cette puissance en devenir que la Syrie et son armée régulière aient pu résister, pendant quatre ans, au plus virulent plan de déstabilisation contre un pays souverain.

Malgré tout, la Syrie résiste. Avec beaucoup de pertes, mais elle résiste tout en démentant tous les pronostics des stratèges et fantasmes des pays sunnites du golfe persique. Qu'Assad, le président Bachar Al-Assad, puisse encore tenir ne relève pas du miracle si l'on considère sa popularité chez les Syriens et du respect que ces derniers portent à l'État qui les nourrit, soigné, éduqué, protégé...

Est-ce que le président Assad a usé de machiavélisme?

Certainement, comme tout politicien cherchant le bénéfice de son pays.

L'Histoire retiendra qu'il a affronté la plus grande invasion de jihadistes étrangers, le complot et le financement des émirs corrompus et sectaires du Golfe wahhabite. Bien au contraire, la tempête a emmené ceux qu'ils l'ont créé, comme les Frères musulmans d'Égypte ou de Tunisie, malgré les immenses moyens déployés pour démanteler l'axe Hezbollah-Damas-Téhéran.

Justement, le président a salué les ouvertures diplomatiques que la Russie a créées pour favoriser un débat franc, sans hégémonie, et préférant négocier avec les acteurs ayant une influence sur le terrain. Aussi, il a décoché un tir envers la diplomatie américaine, la traitant «de peu fiable et d'infidèle, qui laisse tomber ses meilleurs alliés», contrairement à la diplomatie russe qui selon ses propres termes est «constante, fiable et respectueuse de la souveraineté nationale».

Répondant au journaliste Amr Nassif, d'Al Manar, le président Al-Assad avoue que la relation avec l'Égypte n'a jamais été interrompue, même au temps de Morsi et sa confrérie qu'il qualifie depuis toujours de «la confrèrie des frères criminels». Il est aussi conscient que la Syrie a beaucoup à apporter à l'Égypte dans sa lutte contre les Frères musulmans mais, avant tout, contre le groupe armé État islamique, et vice-versa.

Est-ce que l'Égypte osera un rapprochement avec la Syrie d'Assad et se met à dos la puissance financière saoudienne et son service secret?

Pour le moment, cela ne peut se passer que par un grand brassage des alliances, c'est-à-dire, avec l'accord des puissances mondiales et régionales qui tiennent une transfusion de devises et de produits alimentaires afin d'éviter et une quasi-famine du peuple et une faillite financière de l'État égyptien.

Cette dépendance du plus grand pays arabe, c'est-à-dire l'Égypte, à des acteurs favorisant le terrorisme pour atteindre leurs buts politiques ou militaires, met en évidence le véritable problème, celui du téléguidage.

Répondant à une question sur l'implication de la Jordanie dans la création d'une possible zone tampon au sud de la Syrie et la création d'une «war land» (qui servira de base, et sert déjà de base, pour entraîner les jihadistes), le président syrien a candidement répondu et avec son humour habituel: «Est-ce que la Jordanie décide? ... ou plutôt ils ont décidé pour elle?»

Le vrai problème de la région est le manque d'autodétermination et d'indépendance politique vis-à-vis des puissances mondiales, voire régionales. En aucun cas, les Saoudiens peuvent fâcher l'oncle Sam, ni aller à contre-courant de ses intérêts vitaux de la région puisqu'il est le protecteur de ces régimes féodaux et arriérés.

Nous avions tous pensé et désiré que les peuples, débarrassés de l'autoritarisme, auraient la maturité de se choisir des voies démocratiques, au moins en apparence. Il n'en fut rien, bien au contraire. Nous avons eu la certitude que dès lors la loi de l'État disparaît, les humains deviennent barbares, violents, extrémistes, etc. La cupidité des uns, l'intervention des acteurs étrangers et le manque de conscience collective mènent ces sociétés au chaos.

Donc, entre la destruction de la civilisation par les islamistes violents et un régime, autoritaire certes, mais qui protège les citoyens, qui soigne son peuple et qui favorise la croissance économique et sociale, le choix parait logique, évident et clair.

Dans la réalité, pour Hollande, Obama, Erdogan ou Harper, le sort des Syriens importe peu, car tous cherchent leurs bénéfices et ceux de leurs économies.

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