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Une leçon anglaise: pourquoi il faut déréglementer les frais de scolarité

Étant moi-même étudiant en Grande-Bretagne, je peux avertir les fédérations étudiantes qu'elles utilisent l'exemple anglais sans s'apercevoir qu'il joue contre elles. En sus, et probablement par inadvertance, elles prennent l'exemple qui démontre le mieux la nécessité de déréglementer les frais de scolarité et non pas seulement de les augmenter.
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Depuis quelques semaines, les fédérations étudiantes du Québec cherchent à convaincre les étudiants de la province de s'opposer au « dégel » des frais de scolarité. Afin de convaincre les étudiants, ils citent fréquemment le cas de la Grande-Bretagne où, suite à la décision du gouvernement d'aller de l'avant avec une réforme bien moins timide, les demandes d'inscriptions ont chuté de 12%.

Ainsi, les fédérations étudiantes estiment que l'expérience anglaise serait répétée au Québec et que l'accessibilité aux études supérieures est en péril. Étant moi-même étudiant en Grande-Bretagne, je peux avertir les fédérations étudiantes qu'elles utilisent l'exemple anglais sans s'apercevoir qu'il joue contre elles. En sus, et probablement par inadvertance, elles prennent l'exemple qui démontre le mieux la nécessité de déréglementer les frais de scolarité et non pas seulement de les augmenter.

Rectifier les faits

Comprenons tout d'abord que les frais de scolarité pour les résidents québécoiss sont plafonnés, tout comme ils le sont en Grande-Bretagne, non seulement pour les Britanniques, mais aussi pour les étudiants de l'Union Européenne. Tant au Québec qu'en Grande-Bretagne, les récentes réformes ne font qu'augmenter ce plafond, elles ne permettent aux universités de les fixer librement. En Grande-Bretagne, les frais de scolarité ont été haussés à plusieurs reprises dans les années récentes. En 2006, ils furent haussés de 1,000 livre sterling à 3,000 livres sterling et l'année passée, le gouvernement fit passer ce plafond à 9,000 livres sterling (ou 14,200 dollars canadiens en février 2012). Tout cela n'est pas sans rappeler le Québec qui a annoncé une première hausse en 2007 et une nouvelle hausse lors du dernier budget.

De l'avis des fédérations étudiantes, le cas anglais illustre qu'il est inévitable qu'une hausse aussi rapide diminue l'accès aux études supérieures -- particulièrement pour les plus pauvres. Malheureusement, il est impossible d'affirmer que les changements des frais de scolarité affectent les plus démunis. À l'égard de la plus récente hausse, une étude récente démontre que la diminution des admissions se fait ressentir davantage chez les mieux nantis que chez les plus démunis. De plus, si on se fie à l'histoire, la baisse ne sera que temporaire. Après la première augmentation des frais de scolarité en 2006, les demandes d'inscriptions par des étudiants britanniques ont tout d'abord diminué de 4,5 % pour ensuite croître de 7,1 % et de 10,1 % dans les années qui ont suivies.

Les leçons du cas anglais

Les hausses récentes de frais de scolarité permettront aux universitaires de mieux refléter les coûts de la formation et elles pourront aussi investir davantage dans la qualité de celle-ci au bénéfice des étudiants. Toutefois, le système britannique contient une particularité unique qui est problématique. Le gouvernement impose un quota sur le nombre de places qu'une université peut offrir à des étudiants britanniques ou européens afin qu'elle ne recrute pas trop. L'offre de places universitaires est donc contrôlée.

Or, depuis plusieurs années, la demande de places universitaires augmente plus vite que l'offre de places universitaires. Pourquoi donc faire concurrence si on est assuré d'avoir un montant plus important sans rien faire et en chargeant tout simplement les 9,000 livres sterling par étudiant autorisés? En gros, le gouvernement de Grande-Bretagne limite la concurrence entre les universités, au détriment des étudiants qui, eux, doivent se faire concurrence pour des places limitées!

Au Québec avec le plafond sur les frais de scolarité, les universités peuvent difficilement investir pour augmenter la qualité de l'éducation. La prochaine hausse règlera en partie ce problème. Toutefois, le gouvernement empêche les universités de différencier les frais selon les programmes. En somme, un étudiant en pharmacologie paiera autant de frais de scolarité qu'un étudiant en sciences humaines alors que ce montant représente une fraction bien plus petite du coût total de la formation. Le résultat est le même qu'en Grande-Bretagne : les universités n'ont aucune incitation à se faire concurrence. En pratique, les universités anglaises et québécoises chargent un prix relativement uniforme sans égard aux programmes universitaires suivis. Dans les deux cas, on n'observe aucune concurrence sérieuse. Toutefois, ceci va changer très bientôt pour la Grande-Bretagne puisque récemment, le gouvernement a annoncé un assouplissement du système des quotas.

Grâce à l'introduction de la concurrence, les intérêts des étudiants deviennent ceux des universités. Pour les attirer et les retenir, celles-ci devront innover en développant de nouveaux créneaux, en chargeant des prix différents pour différents programmes et en augmentant la qualité de l'enseignement. Tout cela afin de se démarquer entre elles!

Au Québec comme en Grande-Bretagne, la solution est la même : il faut déréglementer les frais de scolarité et permettre aux universités de se faire concurrence pour que celles-ci développent de nouvelles manières d'augmenter la qualité de l'éducation. Lorsque les universités se font concurrence pour des étudiants, ces derniers seront toujours gagnants!

J'espère que les fédérations étudiantes réaliseront qu'elles doivent soit trouver un autre exemple que l'Angleterre, soit changer de position en tirant les leçons qui s'imposent du cas britannique.

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