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L’élection présidentielle de 2020 et le syndrome des deux mandats consécutifs

Une victoire du parti républicain semble se profiler, vraisemblablement avec Trump à sa tête. Une victoire démocrate constituerait une surprise de taille.
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On ne répètera jamais assez à quel point il est important de porter un regard historique au-delà des gaffes et de l’incompétence de Donald Trump au quotidien.
AP Photo/Susan Walsh
On ne répètera jamais assez à quel point il est important de porter un regard historique au-delà des gaffes et de l’incompétence de Donald Trump au quotidien.

Si on regarde les données historiques des élections présidentielles américaines depuis 1860, soit depuis le début de la domination des partis démocrate et républicain, un constat s'impose: chaque parti est demeuré au moins deux mandats consécutifs à la présidence, mais pas nécessairement toujours avec le même président.

À part à l'élection présidentielle de 1888 où le parti démocrate aurait normalement dû conserver le pouvoir pour un second mandat consécutif (il a dû s'avouer vaincu, car il perdit le vote du collège électoral), il n'y a qu'une seule exception où on note une défaite claire du parti sortant —tant au niveau du vote populaire que du collège électoral — après un seul mandat: 1980.

Quelle était la situation en 1980?

Il régnait un contexte international historiquement difficile marqué par la crise des otages américains en Iran, très embarrassante pour le président d'alors, Jimmy Carter. Aux États-Unis, la situation était encore plus difficile avec une stagnation économique jumelée à une inflation et des taux d'intérêt élevés (stagflation) et des pénuries de carburant qui causaient de longues files d'attente aux stations-service dans les mois précédant l'élection.

La cote de popularité de Carter atteignit même un creux de 28%. Par ailleurs, l'élection de 1980 marquait l'entrée en scène d'un candidat républicain hors norme, Ronald Reagan, ex-gouverneur de la Californie, le plus gros État de l'Union. Bref, il y avait une convergence de facteurs exceptionnels qu'on ne rencontre pas souvent. C'est sans doute ce que ça prenait pour limiter un parti à un seul mandat à la présidence pour la première fois depuis 1860.

Qu'en est-il pour les élections de 2020?

On est à des années-lumière de 1980: l'économie américaine affiche une croissance soutenue, le taux de chômage est à son plus bas depuis 1969, il n'y a ni inflation ni instabilité, comme lors des tensions raciales des années 60, avec des eaux plutôt calmes à l'international.

Bref, rien pour perturber de façon significative une majorité d'Américains, contrairement à ce qui se passait en 1980. Cela ne signifie pas pour autant que la société américaine est exempte de problèmes. Il n'y a tout simplement pas de problèmes criants ou de mécontentement généralisé susceptibles d'alimenter un ardent désir de changement.

Les excès du président de Donald Trump, bien que dérangeants pour certains journalistes et experts, représentent bien peu pour l'Américain moyen comparé à la situation sous la présidence de Jimmy Carter. À l'époque de ce dernier, pratiquement tous les Américains étaient touchés par les problèmes économiques et le choc pétrolier de 1979.

Si les Américains vivaient un niveau de mécontentement ou de détresse semblable à celui de nombreux Français qui, à l'heure actuelle, peinent à joindre les deux bouts, on observerait l'équivalent des manifestations récurrentes des gilets jaunes. Or, rien de tel ne se produit chez nos voisins du sud depuis le début du mandat de Trump. D'ailleurs, le taux d'approbation du président Trump se porte plutôt bien, soit autour de 40-45% et avoisine celui de son prédécesseur, Barack Obama.

Si la situation économique (ou à l'international) ne se dégrade pas de façon rapide et marquée d'ici novembre 2020, il apparaît hautement probable que peu importe le ou la candidat(e) démocrate choisi(e), Trump sera réélu, et ce, sans égard à l'efficacité de la campagne qu'il ou elle mènera. Même un Obama avec la campagne électrisante de 2008 n'y parviendrait vraisemblablement pas. De plus, Trump a encore de bonnes chances de remporter le collège électoral tout en perdant le vote populaire comme en 2016, rendant encore plus probable sa réélection.

Certains argueront que la victoire démocrate à la Chambre des représentants en novembre 2018 annonce une défaite pour Trump en 2020. Là encore, un regard sur les élections passées montre que ce n'est pas nécessairement un indicateur fiable. Pour preuve, en 2010, le parti démocrate a subi une sévère raclée aux élections de mi-mandat avec une perte de 63 sièges. Cela n'a pas empêché Obama de remporter un second mandat en 2012 avec un résultat proche de celui de 2008.

Plusieurs évoquent régulièrement que Trump risque d'être destitué. D'une part, à moins d'une d'un acte criminel très grave, les chances d'une destitution sont plutôt minces. Pourquoi? Parce que cette procédure requiert l'appui des deux tiers du Sénat.

Avec le niveau historiquement élevé de l'appui de la base républicaine envers Trump (entre 80 et 90%), on voit mal une vingtaine de sénateurs républicains, le minimum requis pour la destitution, se mettre à dos leur propre électorat. D'autre part, advenant le départ de Trump et son remplacement par le vice-président Mike Pence, ce dernier n'aurait pas nécessairement moins de chances d'être élu président en 2020, bien au contraire. M. Pence jouit d'une bonne popularité auprès des électeurs républicains et indépendants. Rappelons qu'entre 1920 et 1932, le parti républicain est parvenu à conserver la présidence avec trois présidents différents.

Malgré le côté hasardeux que revêt toute prédiction d'un phénomène aussi complexe qu'une élection, je suis d'avis que des conditions exceptionnelles comme celle de 1980 doivent impérativement être réunies pour cantonner un parti à un seul mandat à la présidence, comme le démontrent les données depuis 1860.

À l'approche du scrutin de 2020, de telles conditions sont inexistantes. Plusieurs semblent croire (et espérer) que les Américains ne rééliront jamais un président aussi incompétent, calamiteux et indigne que Trump, qu'une victoire démocrate ne constitue qu'une simple formalité. On ne répètera jamais assez à quel point il est important de porter un regard historique au-delà des gaffes et de l'incompétence de Donald Trump au quotidien.

En somme, une victoire présidentielle du parti républicain semble se profiler, vraisemblablement avec Trump à sa tête. Une victoire démocrate constituerait une surprise de taille.

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