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Quand la recherche permet aux femmes d'améliorer leur vie

La recherche peut aider à cerner et développer les innovations permettant aux femmes d'ajouter de la valeur à leurs produits et d'augmenter ainsi leurs revenus.
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La recherche peut trouver des moyens de réduire les tâches fastidieuses de production et de transformation des aliments pour les femmes.
A. Davey
La recherche peut trouver des moyens de réduire les tâches fastidieuses de production et de transformation des aliments pour les femmes.

Ce billet du blogue Un seul monde, une initiative de l'AQOCI et du CIRDIS, a été écrit par Jemimah Njuki, spécialiste de programme principal pour le Centre de recherche pour le développement international (CRDI).

Lors d'une récente rencontre sur la sécurité alimentaire à Ottawa, Winnie, une entrepreneure ougandaise, a parlé de sa fabrication de yaourt probiotique, vendu à d'autres entreprises et à des écoles. Winnie et sa famille ont toujours élevé du bétail, mais la plus grande partie du lait produit était destiné à la consommation familiale.

En 2014, Winnie a suivi une formation sur l'utilisation des bactéries lyophilisées pour produire du yaourt probiotique à partir du lait de vache. L'utilisation de bactéries lyophilisées pour la fabrication de yaourt est courante aux Pays-Bas, mais pas en Afrique. Winnie a commencé à vendre le yaourt aux voisins et au centre commercial local.

Avec l'augmentation des ventes, le lait produit par sa famille ne suffisait plus et elle a commencé à acheter du lait auprès d'autres agricultrices de son quartier. Peu après, elle a fait équipe avec quelques autres femmes pour démarrer le site de production du Groupe de femmes de Kiboga Ikamiro.

Utilisant la nouvelle technologie bactérienne lyophilisée, elles produisent actuellement 150 à 200 litres de yaourt par jour, pour un gain de 3500 $US par mois. Elle a porté son troupeau à 20 vaches laitières, construit une meilleure maison pour sa famille, et emploie 27 femmes et jeunes sur le site de production.

Winnie est l'une des millions de petites exploitantes que nous célébrons à l'occasion de la Journée internationale des femmes rurales. Elle fait partie des 700 000 femmes qui ont participé au Fonds canadien de recherche sur la sécurité alimentaire, un programme mis en œuvre dans 24 pays au cours des quatre dernières années par le Centre de recherches pour le développement international du Canada et Affaires mondiales Canada.

Du chemin à faire

En Afrique, les femmes fournissent plus de 50% de la main-d'œuvre dans la production agricole et la transformation des aliments, elles possèdent et gèrent des entreprises, et participent souvent au commerce agricole. Cependant, des obstacles importants subsistent pour les femmes.

Il existe encore d'importantes disparités entre les sexes dans la manière dont les ressources clés, essentielles au succès de l'agriculture, sont réparties dans toute l'Afrique.

L'accès à la terre, aux intrants, aux actifs, aux marchés, à l'information et au savoir, au temps, au pouvoir décisionnel et aux revenus reste un défi pour les femmes dans ce secteur.

L'une des questions que l'on pourrait se poser est la suivante: comment la recherche peut-elle contribuer à la prospérité des femmes rurales travaillant dans l'agriculture et l'agroalimentaire? Quand les gens entendent parler de recherche, ils pensent souvent à des expériences complexes effectuées dans des laboratoires par des scientifiques à l'air sérieux en blouses blanches, qui travaillent sur des choses qu'ils ne comprennent pas.

Mais la recherche peut avoir des implications très pratiques dans la vie des gens. Je suis chercheuse depuis maintenant 20 ans, et j'ai pu constater le pouvoir de la recherche et de l'innovation dans la transformation de la vie des femmes.

Le pouvoir de la recherche, en quatre temps

Premièrement, la recherche peut aider à cerner et développer les innovations permettant aux femmes d'ajouter de la valeur à leurs produits et d'augmenter ainsi leurs revenus. Au Nigeria et au Bénin, la production de légumes indigènes a été entravée par une faible consommation et le manque de marchés pour les petits exploitants agricoles.

Après plusieurs années de recherche, les chercheur.euse.s ont trouvé de nouveaux moyens et technologies pour la production de vin et de sirops, en plus des produits plus traditionnels tels que le pain, pour ajouter de la valeur à ces légumes. Les femmes ont augmenté leurs revenus tirés des légumes indigènes de plus de 120%.

La recherche peut trouver des moyens de réduire les tâches fastidieuses de production et de transformation des aliments pour les femmes.

Deuxièmement, la recherche peut trouver des moyens de réduire les tâches fastidieuses de production et de transformation des aliments pour les femmes. Sur les 250 millions de tonnes de cultures amassées en Afrique subsaharienne en 2012, 75% au total ont été produites par de petits exploitants agricoles et ont été désherbées à la main. Entre 50% et 70% du temps de ces agriculteurs a été consacré au désherbage, et 90% des petites exploitantes agricoles effectuent cette tâche elles-mêmes.

En Inde, la transformation d'un sac de millet peut prendre jusqu'à deux jours. En conséquence, le millet, une culture susceptible de contribuer à une meilleure nutrition, est rarement consommé en Inde. Grâce à la recherche, les scientifiques ont mis au point une batteuse permettant de réduire à 2-3 heures le temps nécessaire pour battre un sac de millet. En conséquence, les entrepreneures qui utilisent cette technologie ont vu leur revenu passer de 1800 à 4500 $US par an, soit près de trois fois plus.

Les innovations issues de la recherche peuvent améliorer la nutrition et la santé des femmes.

Troisièmement, les innovations issues de la recherche peuvent améliorer la nutrition et la santé des femmes. Dans l'État indien d'Uttar Pradesh, 50 millions de femmes et 15 millions d'enfants souffrent d'anémie. Une nouvelle technologie qui encapsule le sel avec du fer et de l'iode a conduit à la production locale de sel doublement enrichi dans l'État. Entre 2014 et 2017, 40 000 tonnes métriques de sel doublement enrichi ont été distribuées par l'entremise du système de distribution public indien, 85% des ménages ciblés achetant et utilisant le sel régulièrement. L'utilisation du sel doublement enrichi a entraîné une baisse de la prévalence de carence en fer de 23% à 9%.

Enfin, la recherche peut aider à comprendre les besoins financiers des entrepreneures et petites exploitantes agricoles, et faciliter le développement de produits appropriés et l'accès à ces produits. En Bolivie, des chercheurs travaillant avec le CIDRE IFD (institución financiera de desarrollo) ont permis à la société financière de mieux comprendre le secteur de la pêche, ce qui a abouti à l'élaboration de produits financiers adaptés aux besoins des femmes dans ce secteur. Entre 2015 et 2017, 1,9 million de dollars américains a été prêté à des entrepreneures du secteur, pour un montant de prêt moyen de 6000 $US.

Pour que la recherche fonctionne pour les femmes, celles-ci doivent être impliquées en tant que chercheuses, productrices, chefs d'entreprise et consommatrices, afin qu'elles puissent définir leurs priorités et contribuer au développement d'innovations qui répondent le mieux à leurs besoins et priorités.

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