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La folie « ramadanesque »

Pendant trois jours, les choses s'étaient bien passées, les apparences étaient sauves bien que je n'ai pas jeûné un seul jour. J'ai même bien mangé.
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Alors que le calendrier grégorien est solaire, le calendrier musulman est lunaire. Il est composé de douze mois comme son homologue grégorien. Chaque mois a une durée qui varie entre vingt-neuf et trente jours. L'année dure 355 ou 356 jours et il est fondé sur les rotations de la Lune autour de la Terre.

Si le calendrier grégorien commence avec la naissance du Christ, le calendrier musulman débute, lui, avec l'Hégire (l'émigration), événement représentatif de la fuite du prophète Mohammed et de ses compagnons, en l'an 622, de la Mecque vers l'oasis de Yathrib, devenue plus tard, Médine, pour échapper à la persécution des Quoraïchites, qui ont rejeté l'Islam comme pour le calendrier.

C'est sous le règne du second calife de l'Islam, Omar Ibn Khattab (qui régna de l'an 13 à l'an 23 de l'Hégire) que le calendrier arabe fut officiellement adopté, sous le nom de calendrier de l'Hégire. L'an 1 de l'Hégire étant la première année de l'établissement du prophète Mohammed et de ses compagnons à Médine, qui correspond à l'an 622 du calendrier grégorien.

Ramadan, qui est le neuvième mois de l'année de l'Hégire, est un mois sacré, pendant lequel, selon la tradition, le Coran fut révélé au prophète Mohammed lorsqu'il se trouvait dans la grotte de Hira située sur la montagne al-Nour, par le truchement de l'ange Gabriel. Un mois pendant lequel les musulmans font fructifier leur crédit céleste par les bonnes actions, où chaque bonne action en vaut dix et peut être récompensée jusqu'à sept cents fois.

Le mien, mon «compte courant», je l'ai clôturé le jour où j'ai renié l'Islam. Dorénavant, j'aide les autres et je fais du bien en n'attendant aucune récompense dans un prétendu Au-delà, non pas par peur de Dieu, mais par choix personnel, ce qui me procure un véritable bien-être.

Du lever au coucher du soleil, le musulman ne doit ni boire ni manger, et encore moins avoir des rapports sexuels. Il doit redoubler d'efforts dans la prière, et penser plus à la souffrance des pauvres qui jeûnent durant toute l'année et non par obligation religieuse et pour un mois seulement. En jeûnant, il se repent et se rapproche de Dieu. Selon la Tradition, pendant le ramadan les portes du Paradis s'ouvrent et ceux de l'Enfer se ferment. Même les démons, avec Satan à leur tête, se retrouvent enchaînés.

L'obligation du jeûne est prescrite par le verset 184 de la deuxième Sourate : « Ô vous qui croyez, le jeûne vous est prescrit tout comme il a été prescrit à vos devanciers, afin que vous adoptiez la piété.».

Ce verset s'adresse aux croyants. Je n'en suis pas un. Je suis sauvé! Pas de jeûne pour moi cette année ! J'ai jeûné quatre ramadans successifs depuis l'année 2011, année de ma puberté. 2015 sera peut-être la dernière où j'ai jeûné.

Mais non, je vais devoir jeûner, non par conviction, mais par peur que quelqu'un me dénonce à la police et de risquer six mois en prison à l'aube de mes dix-sept ans ou de payer une amende qui varie entre 1 à 100 euros, ou même pire, que ma mère sache que je ne jeûne pas, l'apocalypse non pas selon Saint Jean, mais l'apocalypse, d'après mon père pour de vrai! Il m'avait raconté que si ma mère venait à le savoir ce serait la fin pour moi, qu'elle ne sera plus ma mère et moi plus son fils, elle avait pleuré plusieurs jours de suite lorsqu'elle avait su que j'avais quitté la religion musulmane et que j'avais choisi l'athéisme.

Quitter l'islam, pour ma mère, est un signe d'échec social, alors que comme toutes les mères marocaines et musulmanes, elle souhaitait donner une image idéalisée de sa petite famille aux autres ; la religion étant l'un des points essentiels de cette hypocrisie sociale où les apparences comptent plus que la réalité des choses, et qui est marquée par la règle des trois H, Haram (interdit), Halal (permis) et Hchouma (la honte) ! Alors que pour moi, être libéré des croyances religieuses était une véritable renaissance.

C'est alors que mon père m'avait demandé de jouer la comédie, chose que je sais bien faire, en faisant croire à ma mère que je suis redevenu musulman, je pense que ça avait marché, mais quand j'ai commencé à écrire ce texte, ma mère pénétra en furie dans ma chambre en m'interpellant : « Vas-tu jeûner ou pas cette année ? » J'aurais préféré dire non, mais j'avais dit le contraire de ce que je pensais en rétorquant malgré moi que: « Quand même...! Je ne suis pas un mécréant. » Elle m'avait dévisagé un long moment et puis elle quitta ma chambre et alla rappeler à ma sœur de ne pas oublier de bien manger lors du shour (moment important pour un jeûneur qui lui permet de bien manger avant le lever du soleil).

Pendant trois jours, les choses s'étaient bien passées, les apparences étaient sauves bien que je n'ai pas jeûné un seul jour. J'ai même bien mangé. Pas sur la place publique, ni devant ma mère ou ma sœur, mais tout seul, dans ma chambre ou bien aux toilettes, et malgré le témoignage de certains ex-musulmans, qui me disaient que j'allais culpabiliser les premiers jours du ramadan où je ne jeûnerai pas. Et pourtant, ce fut des jours comme les autres.

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Mai 2017

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