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Le vote afro-américain, une carte maîtresse dans le jeu démocrate

Sept ans après l'élection du premier président noir des États-Unis, la question raciale reste une épine dans le pied de l'Amérique.
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Sept ans après l'élection du premier président noir des États-Unis, la question raciale reste une épine dans le pied de l'Amérique. La mobilisation populaire contre les violences policières et la tuerie de Charleston semblent avoir agi comme un révélateur de l'état de la société américaine, plus que jamais rappelée à un passé raciste et ségrégationniste que l'on croyait révolu. La presse n'a pas manqué de révéler au grand jour que le drapeau confédéré de l'ancien Sud esclavagiste flottait encore dans certains États, comme un témoignage des tensions raciales qui, 51 ans après la fin de la ségrégation, divisent encore les États-Unis. Dans l'arène politique, Donald Trump n'hésite pas à utiliser le scepticisme de certains Américains ultraconservateurs à l'égard de la religion et de la nationalité de Barack Obama dans sa stratégie électorale. Favori des sondages pour la primaire républicaine, Donald Trump est depuis 2011 le chef de file du mouvement des «birthers», qui avait mené le président à rendre public son extrait de naissance afin de prouver qu'il était bien né citoyen américain. Lors d'une rencontre dans le New Hampshire le 17 septembre dernier, Donald Trump s'est bien gardé de contredire un membre du public qui affirmait qu'Obama «était musulman» et que «le problème de ce pays, ce sont les musulmans.»

Or, c'est précisément auprès de la communauté noire américaine qu'Hillary Clinton a une carte à jouer. Historiquement, le vote des Noirs américains n'a rien d'une inconnue : depuis des décennies, les Afro-Américains votent majoritairement pour le parti démocrate. La présence et la médiatisation de candidats noirs aux dernières primaires républicaines, comme l'homme d'affaires Herman Cain en 2012 ou le neurochirurgien Ben Carson, numéro deux des sondages actuels, n'a pour ainsi dire rien changé à la donne. L'une des forces d'Hillary Clinton est justement d'être l'ultra-favorite de cet électorat, alors que son principal concurrent Bernie Sanders multiplie les opérations séduction auprès de ce groupe d'électeurs, sans grand succès. En juillet, l'ex-Secrétaire d'État de Barack Obama affichait un taux d'opinion favorable de 80% au sein de la communauté noire, contre 23% pour Bernie Sanders. Hillary Clinton a donc une carte à jouer pour mobiliser cet électorat afin de transformer ces opinions favorables en votes. Alors que sa campagne s'enlise dans le scandale des courriels et que les sondages en sa faveur sont en chute libre, la candidate démocrate ferait bien d'exploiter sa popularité auprès des Afro-Américains afin de redorer son parcours électoral.

Proche du révérend Jesse Jackson, leader emblématique du mouvement pour les droits civiques et candidat afro-américain malheureux à l'investiture démocrate en 1984 et 1988, Hillary Clinton doit également cette popularité à son histoire personnelle. Ayant commencé sa carrière comme avocate de familles défavorisées, notamment noires, à Chicago, elle peut compter sur l'image de son mari Bill qui a pu passer, selon le prix Nobel de littérature Toni Morrison en 1998, pour «le premier président noir des États-Unis». Élevé dans une famille monoparentale pauvre dans l'État rural et sudiste de l'Arkansas, Bill Clinton a toujours bénéficié de la sympathie de la communauté afro-américaine.

Pourtant, il y a fort à parier qu'Hillary Clinton se devra d'articuler un message clair à l'attention de la communauté afro-américaine. Un peu plus d'un an après le drame de Ferguson et à l'issue d'une année 2015 marquée par les brutalités policières et la tuerie raciste de Charleston, Hillary Clinton ne pourra se contenter de ses amitiés et du souvenir de son engagement passé afin de conforter sa popularité traditionnelle auprès des Afro-Américains. L'activisme du mouvement social «Black Lives Matter», qui a pris forme sur les réseaux sociaux en réaction aux violences policières contre les Noirs américains, promet particulièrement de la pousser dans ce sens. Fin août, en marge d'un rassemblement de campagne, elle a notamment été prise à partie par de jeunes représentants du mouvement sur son bilan législatif des années 1990, notamment au sujet de son soutien de la loi pénale de 1994. Cette loi prévoyait des périodes d'emprisonnement plus longues et plus fréquentes, notamment pour les petits délits, et est largement considérée comme l'un des facteurs de l'explosion du nombre de détenus noirs dans les prisons américaines depuis le milieu des années 1990. Dans une interview de juin 2015, Bill Clinton n'a d'ailleurs pas hésité à exprimer ses regrets par rapport aux conséquences dramatiques de cette loi sur la situation carcérale des Afro-Américains.

La réforme pénale prévue par Barack Obama à l'automne pourrait être une occasion législative idéale pour Hillary Clinton, lui permettant de désavouer cet héritage qui menace de la desservir. Elle aurait tout intérêt à exprimer à cette occasion une prise de position ambitieuse et libérale afin de multiplier les signaux en direction de la communauté afro-américaine. Alors que la presse n'a de cesse de titrer sur la perte de vitesse de sa campagne, Hillary Clinton a en effet tout intérêt à mobiliser un électorat qui pourrait bien faire pencher la balance en sa faveur en 2016.

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