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L'immigration et le sens des responsabilités de nos gouvernants

Au lieu d'aller vers la recherche de consensus sur des enjeux aussi délicats, on préfère apparemment jouer avec le feu, le nez collé sur l'horizon qui mène aux prochaines élections.
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Le rapport de la vérificatrice générale sur la performance lamentable, selon elle, du ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion a fait couler beaucoup d'encre. Le premier ministre défend l'action de son gouvernement en cette matière en évoquant le cas d'un jeune immigrant syrien, parfaitement intégré dans son nouvel environnement... à Saint-Félicien. On conviendra aisément que l'enjeu de s'adapter dans une région majoritairement francophone n'est pas le même que celui de le faire à Montréal. Où, en passant, s'installent 85% des immigrants. En plus, s'il est si jeune, ce nouvel arrivant doit son intégration probablement plus à son passage dans un des établissements scolaires du coin, relevant du ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur. Et puis, un seul cas ne vient pas infirmer tout ce que la vérificatrice a pu observer.

Le problème, avec ce sujet, c'est qu'il est sans cesse instrumentalisé par les chefs et les membres de leur parti pour se faire du capital politique en s'abreuvant à une certaine insécurité identitaire québécoise face à l'autre, à ces gens-là, comme les appelle François Legault, qui nous arrivent par tous les moyens possibles. Aux questions de Nathalie Roy sur l'état des choses au MIDI, à l'Assemblée nationale, le ministre Heurtel répond en avançant que la CAQ chercherait à expulser les immigrants avant que ceux-ci ne deviennent citoyens canadiens, ce qu'un gouvernement provincial n'a pas le pouvoir de faire. Mais quand on donne dans l'affirmation gratuite et tendancieuse, pourquoi y aller avec le dos de la cuiller?

On me dira que je suis bien naïf, que c'est là la nature même de la game politique, avec des déclarations davantage motivées par le désir de se démarquer de ses adversaires que par celui d'agir avec un sens des responsabilités dont devraient faire preuve les politiciens. Sans parler du ton qu'adoptent certains médias!

C'est par eux que, pour la première fois, j'ai été frappé par cette dérive. Un animateur, réputé par son franc-parler, avait parlé d'une victime de viol en des termes plutôt insultants. Pour se défendre, dans une émission de télé où il est pris à partie, il commence une excuse embarrassée où il évoque la compétition entre les réseaux. Il est interrompu avant d'aller plus loin. Voulait-il dire que c'est cela qui l'aurait amené à dépasser les bornes ou est-ce qu'il croit que ce sont les réseaux concurrents qui s'en prennent à lui et profitent ainsi de la situation? On ne le saura jamais. Mais il semble juger que l'excuse de la compétition entre réseaux lui apparaît suffisante pour expliquer sa conduite.

Sans doute voulait-il dire qu'il ne faisait finalement que jouer la game! Celle de la compétition par l'infotainment!

On se rappellera aussi de ce politicien, chef d'un tiers parti, qui tire profit d'un sondage sur le racisme des Québécois et de quelques cas d'accommodements plus ou moins douteux, pour plonger le pays dans un psychodrame dont naîtra la Commission Bouchard-Taylor! Et dont il espère que son parti bénéficiera aux prochaines élections!

Lui aussi ne faisait finalement que jouer la game!

Que dire de la Charte de la laïcité du Parti Québécois, instrument choisi par celui-ci pour se rallier les nationalistes! Il aurait été simple de faire quelques compromis pour gagner l'adhésion d'autres partis! Mais non! C'est que, voyez-vous, des élections s'en venaient et on a fait le calcul politique que de rester ferme sur cette question aiderait à gagner des voix!

Là aussi, on a choisi de jouer la game!

Sans oublier les excès rhétoriques de notre premier ministre qui accuse la CAQ de souffler sur les braises de l'intolérance quand le parti de François Legault suggère de ramener le nombre d'immigrants acceptés dans la province au niveau où il était sans doute sous la gouverne de Robert Bourassa! En fait, c'est quand lui-même hausse ainsi le ton et donne dans l'outrance verbale, avec un titre de consultation fortement connoté, qu'il souffle, dans un ballet qui l'oppose à ses vis-à-vis et de concert avec eux, sur les braises d'une simplification abusive qui peut ouvrir la porte à l'intolérance.

Ajoutons à cela les propos d'un candidat à la chefferie d'un parti important qui juge utile, pour se faire élire, de casser du sucre sur le dos des musulmans, adoptant une attitude et un ton qui faisaient lourdement contraste avec ses positions jusque-là! Il fallait, là aussi, prendre les moyens pour remporter cette élection!

Lui aussi, comme celui qu'il veut remplacer comme premier ministre du Québec, jouait la game!

Le plus triste dans le cas de ces événements récents, c'est qu'on a rapidement oublié les promesses faites après l'attentat de Québec à la grande mosquée, il n'y pas même pas un an.

Le plus triste dans le cas de ces événements récents, c'est qu'on a rapidement oublié les promesses faites après l'attentat de Québec à la grande mosquée, il n'y pas même pas un an. Il était question d'adopter un ton plus posé sur des questions aussi sensibles. N'était-ce pas là reconnaître que ces excès verbaux pouvaient avoir préparé le terrain à une telle démonstration d'intolérance?

Au lieu d'aller vers la recherche de consensus sur des enjeux aussi délicats, on préfère apparemment jouer avec le feu, le nez collé sur l'horizon qui mène aux prochaines élections.

Avril 2018

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