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Pauline Marois devrait se rappeler que depuis septembre 2012, elle est première ministre avant d'être chef de parti. Elle doit avoir, dans ses décisions, l'envergure d'un chef d'État. Le fait d'être à la tête d'un gouvernement minoritaire semble lui faire oublier cette obligation.
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En 2007, c'était, me semble-t-il, un sondage de l'institut Léger Marketing, mandaté par le Journal de Montréal, le réseau de télévision TVA et la station de radio 98,5FM, qui avait ouvert le bal. On avait demandé aux Québécois s'ils se croyaient racistes et 59% d'entre eux y avaient répondu oui. Il n'en fallait pas plus pour mettre le feu aux poudres. Puis, il y a eu les normes de vie du village d'Hérouxville, document décrétant que la lapidation des femmes y était interdite.

Par la suite, un autre cas attisa un peu plus le feu : la décision de propriétaires de cabane à sucre de retirer le porc de certains plats traditionnels afin d'attirer la clientèle musulmane. L'un d'eux eut même le toupet d'interrompre une danse afin que des musulmans puissent faire leur prière sur la piste. Il désirait accommoder des clients venus en grand nombre.

Puis, il y eut le cas du YMCA de l'avenue du Parc dont la direction a accepté de munir sa salle d'entraînement de fenêtres opaques, accédant ainsi à la demande des membres de la communauté hassidique Yetev Lev, dont un centre communautaire et un dortoir donnaient sur les fenêtres visées. Les femmes qui s'activaient sur des appareils d'entraînement étaient trop légèrement vêtues aux yeux des membres de cette communauté. Enfin, quelque temps après, on apprenait que le service de police de Montréal recommandait aux femmes policières de s'effacer devant un membre de la communauté juive hassidique et de laisser la place à leur collègue masculin, au nom d'une certaine sensibilité à la diversité culturelle.

Est-ce que ce sont des cas semblables qui motivent le gouvernement du Parti québécois à poursuivre son projet de charte des valeurs? Parce que, dans un seul de ces cas, on se retrouve devant une situation concernant les pouvoirs publics. Il est, en effet, inacceptable qu'un membre d'un corps de police municipale se plie à des valeurs qui sont incompatibles avec le principe de l'égalité homme/femme défendu au Québec. Pour le reste, on conviendra qu'il ne s'agit que de décisions un rien douteuses de la part d'entrepreneurs désireux d'accommoder leur clientèle et d'un organisme cherchant à maintenir de bonnes relations avec son voisinage.

La suite de ces événements, vous la connaissez. Il y eut un chef de parti qui vit, dans ces événements, une excellente occasion pour aller chercher la sympathie des électeurs, au risque de nourrir une fracture sociale d'importance. Évidemment, l'occasion d'être élu semblait trop belle pour montrer des scrupules devant le risque de déclencher une crise identitaire.

Est-ce bien différent maintenant? Y a-t-il de réels problèmes d'accommodements et de vivre ensemble qu'une telle Charte amènerait à régler? Les avis juridiques demandés par le gouvernement indiquent-ils comment cette charte passerait le test juridique? Tout cela, on ne le sait pas et le gouvernement ne tient pas à nous le dire. Et comme en 2007, les cas particuliers se succèdent. Tantôt, c'est une communauté aux pratiques extrémistes qui fait les frais des premières pages des journaux. Tantôt, c'est une garderie où des éducatrices portent le niqab, qui intéresse les médias.

Remarquez, dans le lot des dommages collatéraux, il y a celui, certainement apprécié par un gouvernement très partisan parce que minoritaire, des malaises causés dans le camp des adversaires. La perte de crédibilité de Philippe Couillard lors de sa collision frontale avec Fatima Houda-Pepin peut être perçue comme une retombée positive suffisante, pour le Parti québécois, afin de justifier tout le reste. Mais cela, voyez-vous, est malheureux et ne témoigne pas d'une attitude très responsable de la part du gouvernement. Mme Pauline Marois devrait se rappeler que depuis septembre 2012, elle est première ministre avant d'être chef de parti. Elle doit avoir, dans ses décisions, l'envergure d'un chef d'État. Le fait d'être à la tête d'un gouvernement minoritaire semble lui faire oublier cette obligation.

Elle peut, bien sûr, invoquer l'excuse de devoir composer avec des partis qui ne cherchent certes pas à lui faire de cadeaux et qui sont tout sauf portés sur la conciliation. Pour eux aussi, la nécessité de chercher à se positionner auprès de leur clientèle en vue des prochaines élections l'emporte sur tout le reste. Mais aucun d'entre eux n'a, comme le PQ, cherché à provoquer une crise identitaire.

Même Mario Dumont, pour irresponsable qu'il ait pu être en 2007, n'avait rien mis en scène. Il n'avait fait que suivre et amplifier la vague par d'autres créée. Le gouvernement orchestre aujourd'hui une crise dont il espère tirer profit électoralement. Mais, en réalité, sur cette question de la laïcité et des valeurs, où loge-t-il exactement?

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