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La vérité sur les vraies salopes

Je suis une vraie de vraie salope. Ils sont beaucoup à le dire. Les femmes qui pensent que le sexe est répugnant. Les types qui veulent des femmes bonnes à présenter à leurs mères et se disent que je n'aime pas les dîners familiaux...
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Je suis une salope. Une vraie de vraie salope. Ils sont beaucoup à le dire. Ceux qui lisent mon blog et sont en désaccord avec son contenu. Ceux qui ne m'aiment pas. Les femmes qui pensent que le sexe est répugnant. Les types qui veulent des femmes bonnes à présenter à leurs mères et se disent que, parce que je parle ouvertement de sexe, je n'aime pas les dîners familiaux ou les mamans.

Ils ont de multiples raisons de penser ce qu'ils pensent. J'ai couché avec pas mal d'hommes. Plus de dix. Plus de vingt. On continue sur la lancée ? J'ai beaucoup écrit à propos de ma vie sexuelle. J'ai partagé des histoires personnelles parce que je pensais et pense encore que non seulement j'écris bien, mais j'écris une bonne histoire. Une histoire qui, j'en suis encore persuadée, aura un "happy ending" quelque part dans ce pathétique bordel, entre les mails injurieux et le papier que quelqu'un a déposé dans la voiture de ma mère, garée dans le parking d'une gare, sur lequel était écrit : "J'espère que vous êtes fière de la salope que vous avez élevée."

J'ai récemment commencé à regarder la série The newsroom, d'Aaron Sorkin. Au début, je détestais le personnage de Sloan Sabbith. Cette chroniqueuse économique, exceptionnellement attirante, follement intelligente et jamais dépourvue d'une répartie pleine d'esprit.

Attention, "spoiler" si vous suivez la série

J'ai regardé l'épisode diffusé dimanche dernier. Deux moments m'ont captivée plus que tout. Maggie pose une question sur Sandra Fluke : "Qu'y a-t-il de mal à être une salope ?" Le second passage est la situation compliquée dans laquelle se trouve Sloan Sabbith. Elle sort avec un garçon. Il prend des photos d'elle, elle est d'accord, puis elle rompt. Il publie les photos sur internet. Le monde entier voit le corps de la jeune femme. Sa carrière est en danger. Tout le monde le sait. La rumeur court. Elle s'assoit dans une chambre sombre, en pleurs, et dit tout bas : "Je veux mourir."

Je ne pensais pas me sentir un jour aussi reconnaissante envers Aaron Sorkin. Pour tout. Mais j'ai remercié tout bas Aaron Sorkin.

Plus loin dans l'épisode, Sloan Sabbith fait face à son ex, qui a publié les photos, alors qu'il est en pleine réunion. Elle lui met un coup de pied dans les bourses, lui met une droite, et prend une photo de son nez sanguinolent.

La salope a gagné. Et ça, mes amis, c'est magique. Parce que, voyez-vous, la salope ne gagne jamais. Les filles dont on a publié les photos ne gagnent jamais. Elles perdent leur boulot et leur réputation. Elle sont humiliées et forcées à porter leur honte. Honte de leurs corps. Elles doivent s'excuser d'être sexuellement actives dans le cercle privé. Pour ces choses que nous faisons dans l'intimité de nos chambres que nous ne devrions pas faire mais qu'apparemment nous faisons quand même, parce qu'il y a neuf milliards d'habitants sur cette planète et qu'ils sont arrivés ici d'une manière ou d'une autre. Sloane Sabbith s'assoit dans une chambre sombre et dit : "Je veux mourir." Parce qu'elle a laissé son copain prendre des photos, et il les a publiées. Pas des photos d'elle en train de tuer des chiots, de frapper des bambins ou de violer des personnes âgées. Des photos d'elle. De son corps. Cette chose qui vit sous ses vêtements. Les parties de son corps qui sont, d'une certaine manière, plus offensantes que ses orteils.

Puis est arrivée Maggie, avec cette phrase qui résume ce que je m'escrime à dire depuis des années. "Qu'y a-t-il de mal à être une salope ?"

Fin du "spoiler"

Nous sommes toutes effrayées de recevoir cette étiquette. Et l'ironie de cette histoire, c'est que la plupart d'entre nous (et peut-être ai-je tort sur ce point mais je suis quasiment certaine d'avoir raison) faisons ces choses que les vraies salopes font. Nous prenons des photos. Nous envoyons des sextos. Nous couchons avec nos copains. Nos maris. Nous taillons des pipes. Nous nous déshabillons. Nous avons un vagin. Nous l'utilisons. Quelques-unes d'entre nous, parfois, prennent même du plaisir à l'utiliser. Nous avons des seins et des mamelons et des fesses. Dont, de toute évidence, nous devrions toutes avoir honte. Parce que nous sommes les seules à faire ce genre de choses. Tu m'entends, toi, femme du monde entier ? Tu es la seule à faire ce que tu fais avec ce garçon (ou cette fille, ou, pire, LES DEUX). Et c'est si terriblement blessant, mal et honteux. Pardon ? Tu veux savoir pourquoi ? Oh. Parce que... salope ?

On m'a traitée de salope l'autre jour, sur internet, pour ce qui devait être la neuf milliardième fois. A cause d'un article que j'avais écrit sur le métier de barman. Comme si c'était aussi une injure. Je n'ai jamais gagné le prix Pulitzer. Mais savez-vous ce que je suis ? Quelqu'un de bien. Suis-je parfaite ? Pas du tout. Fais-je des erreurs ? Absolument. De grosses erreurs ? Parfois. Ai-je fait des choses que je regrette ? Oui. Ai-je fait des choses que je ne regrette pas mais que, selon certains, je devrais regretter ? Oui. Je suis un être humain. Avec des seins. Et un vagin. Et la manière dont je les utilise ne fait pas de moi quelqu'un de bon ou mauvais. J'ai écrit une fois que si une femme découvrait un vaccin contre le sida, mais le jour suivant des photos d'elle nue avec un gode faisaient surface, cette dernière partie ferait la une des journaux. Parce que, de toute évidence, les godes font du mal aux gens. (Blague à part). De toute évidence, une femme ayant un rapport sexuel blesse les gens. Une femme prenant des photos du truc effrayant sous ses vêtements ? Soyons sérieux, je ne dirais pas que c'est aussi horrible qu'un enfant avec le cancer, mais... en fait, si.

J'ai remercié tout bas Aaron Sorkin, pas parce qu'il a su sortir des sentiers battus et ouvrir un débat sur le sexisme, les femmes et le "deux poids deux mesures". Ce double standard incroyablement frustrant existera jusqu'à la fin de ma vie et encore longtemps après. Désolée de vous briser le cœur, mesdames. Mais j'ai remercié Aaron Sorkin d'avoir donné à la salope "ouverte" le "happy ending". D'avoir rappelé au monde que la salope qui se fait surprendre à faire des choses (que tout le monde fait) que personne n'oserait faire, est quand même quelqu'un de bien. Que même avec internet, les blogs de commérage et le "double standard", les salopes peuvent toujours gagner. Et avoir ce moment où elles frappent un homme dans les bourses et lui faire regretter d'avoir un pénis à ce moment-là, tout comme les femmes regrettent d'avoir un vagin quand une photo dudit vagin est postée sur internet.

Je refuse de m'excuser d'être une vraie salope et d'écrire à ce sujet si cela peut éviter à une fille, dans ce pays, de s'asseoir dans une chambre sombre en disant qu'elle veut mourir parce qu'on l'a traitée de salope. Pour rappeler au monde que les salopes peuvent accomplir de bonnes actions. Elles font du sport, gagnent des trophées et viennent en aide aux malades. Elles gagnent des procès et des élections. Elles aiment leurs familles. Elles peuvent être de bonnes amies qui travaillent bénévolement dans un refuge pour animaux et envoient des colis aux soldats en poste à l'étranger. Elles peuvent donner 10$ à un sans abri auquel personne ne prête attention. Et elles ne font pas cela pour se faire pardonner d'être des salopes. Elles le font parce qu'elles sont de bonnes personnes.

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