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Un capitalisme éthique? Ça vaut la peine d'essayer

Après la crise financière de 2008, le mot "capitalisme" ressemblait à un gros mot. Selon moi, l'hypothèse que le "capitalisme" serait fondamentalement contraire à l'éthique est non seulement fausse d'un point de vue philosophique, mais également réfutable d'un point de vue factuel.
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Après la crise financière de 2008, le mot "capitalisme" ressemblait à un gros mot. Il est facile de comprendre pourquoi. Cette manière de penser court terme et profit personnel, qui a mené à la crise et à la récession qui s'en est suivie, a également allongé la longue liste des tragédies humaines : des milliers de travailleurs sur le carreau suite à la faillite de leur usine, une inégalité croissante des revenus tandis qu'un milliard de personnes survivent avec moins de 1 dollar par jour et de dangereux changements climatiques qui font pression sur l'approvisionnement en denrées de base.

Certains attribuent ces problèmes au "capitalisme" et estiment, par extension, que le capitalisme est fondamentalement contraire à l'éthique.

Lors du Forum économique mondial de Davos cette année, un groupe d'entreprises, d'ONG et de responsables gouvernementaux ont débattu de cette question dans le cadre d'une table ronde intitulée "Capitalisme éthique - cela vaut-il la peine d'essayer?": J'ai eu le privilège de participer à cette table ronde animée par Zanny Minton Beddoes, rédacteur économique de "The Economist", Peter Brabeck-Letmathe, président du Conseil d'administration de Nestlé SA, Sir Martin Sorrell, directeur général de WPP Plc, Ignazio Visco, gouverneur de la Banque d'Italie, Jasmine Whitbread, directrice générale de Save the Children International, et Muhammad Yunus, président du Yunus Centre et prix Nobel de la paix.

Selon moi, l'hypothèse que le "capitalisme" serait fondamentalement contraire à l'éthique est non seulement fausse d'un point de vue philosophique, mais également réfutable d'un point de vue factuel. Le problème ne vient pas du capitalisme ; il vient davantage des capitalistes qui se focalisent uniquement sur le présent et ne se soucient aucunement de l'avenir.

Prenons en considération l'extraordinaire progrès humain des deux siècles passés. Comme nous le rappelle John Mackey dans son livre Conscious Capitalism ("Capitalisme conscient"), 85% du globe vivait dans la plus grande pauvreté il y a tout juste 200 ans. Aujourd'hui, ce chiffre a été réduit à 16 pour cent. L'espérance de vie a plus que doublé, la liberté individuelle a considérablement évolué dans le monde entier et une innovation extraordinaire sous l'impulsion du capitalisme a révolutionné changé notre vie quotidienne. Aucun autre système économique n'est parvenu a créer un changement aussi positif.

Le cœur du problème est le suivant : le capitalisme est bon si les capitalistes sont bons.

Pour qu'un système soit maintenu - politique, gouvernemental, social ou économique - ses leaders doivent faire preuve d'un comportement éthique. Qu'est-ce que cela signifie ? Un capitalisme éthique doit être composé d'au moins deux éléments : il doit se concentrer sur des valeurs économiques et sociales à long terme et enjoindre les entreprises à jouer un rôle de catalyseur entre l'ensemble des éléments constitutifs : clients, employés, fournisseurs, investisseurs et la société. Le capitalisme éthique cherche à établir des relations profondes et fondées sur la confiance, au service de la société, ainsi que sur les résultats financiers. Autrement dit, c'est un modèle économique doté d'un "idéal noble".

Les bienfaits sont réels et durables. Les entreprises qui s'engagent à rester fidèles à ce noble idéal attirent davantage de clients, réduisent leurs frais d'exploitation grâce à une efficacité énergétique et à une réduction des déchets, améliorent le taux de maintien de leurs employés et bénéficient d'une main-d'œuvre expérimentée qui a intérêt à la réussite à long terme de l'entreprise.

Le capitalisme éthique n'est pas une sorte d'utopie ; c'est un moteur puissant qui permet une création de valeur à long terme. Nous en sommes un exemple. Chez Henry Schein, notre engagement à trouver un équilibre entre les besoins de nos cinq composantes -membres de l'équipe Schein, nos clients, nos fournisseurs, nos investisseurs et la société- a toujours été essentiel à notre succès. Notre valeur sur le marché, actuellement de 10 milliards de dollars, a augmenté à un taux de 23% composé annuellement depuis notre entrée en bourse en 1995. Nous sommes également fiers de notre contribution à la société, en particulier de nos efforts en vue d'améliorer, par le biais d'Henry Schein Cares, les soins de santé pour les personnes défavorisées et de notre programme mondial de responsabilité sociale des entreprises. Par exemple, depuis 2003, nous avons aidé près de 4,5 millions d'enfants à bénéficier de soins buccaux-dentaires gratuits en tant que partenaire du programme "Give Kids a Smile" (Donnez le sourire aux enfants) de l'Association dentaire américaine. "Fortune" nous a désignés comme l'entreprise "La plus admirée au monde" ces douze dernières années: voilà pour nous une preuve incontestable qu'une entreprise est parfaitement en mesure de "réussir en faisant le bien".

Nous ne sommes naturellement pas les seuls. Des études récentes de la Harvard Business School, du Babson College et d'autres ont démontré que les entreprises qui privilégient l'engagement des parties prenantes et qui disposent d'objectifs à long terme obtiennent de bien meilleurs résultats sur la durée que leurs homologues en Bourse.

Le capitalisme est loin d'être parfait ; aucun système ne l'est. Le capitalisme est en revanche le meilleur système dont nous disposons à présent et lorsqu'il est éthique, il offre à la société les meilleures chances pour créer de la richesse et sortir la population de la pauvreté. En tant que chefs d'entreprises, nous devons faire plus encore. Notre tâche, de concert avec les gouvernements, le monde universitaire, les ONG et les sociétés civiles est d'œuvrer ensemble pour étayer le modèle capitaliste d'une base éthique solide. Nous devons insuffler au débat public la notion que l'intérêt individuel et l'intérêt général sont intimement liés. C'est aussi simple que cela : la réussite des entreprises repose sur la santé et la prospérité de la société.

Le Forum économique mondial de cette année a commencé avec un message du pape François délivré par le cardinal ghanéen Peter Turkson. Le pape a exhorté les dirigeants d'entreprise du monde entier à "s'assurer que la richesse sert l'humanité, mais ne la régit pas".

C'est l'essence même du capitalisme éthique. Nous n'avons pas d'autre choix que d'essayer.

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