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«Das Rheingold» de Wagner: une oeuvre d'une qualité impressionnante

Les chanteurs sont de très bons acteurs qui se déplacent beaucoup et adoptent une gestuelle adaptée, en plus de déployer leurs voix magnifiques.
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Dans la belle mise en scène conçue par Brian Staufenbiel, «Das Rheingold» de Wagner devient un spectacle en parfaite concordance avec le théâtre contemporain.
Yves Renaud
Dans la belle mise en scène conçue par Brian Staufenbiel, «Das Rheingold» de Wagner devient un spectacle en parfaite concordance avec le théâtre contemporain.

Dans la belle mise en scène conçue par Brian Staufenbiel, Das Rheingold de Wagner devient un spectacle en parfaite concordance avec le théâtre contemporain. Notamment grâce à l'écran transparent géant et rétractable, la vidéo en direct et les autres effets spéciaux qui se combinent à la gestuelle, aux voix et à la musique bien sûr, dont les musiciens sont déplacés de la fosse à la scène. En effet, les 85 artistes (c'est beaucoup) de l'Orchestre Métropolitain se retrouvent face au public comme à l'occasion d'un concert classique, ce qui est déjà spectaculaire en soi.

Personnellement, j'ai toujours trouvé un peu frustrant de ne pas pouvoir admirer en même temps les musiciens et les chanteurs à l'opéra. C'est que la mise en scène du livret se doit de justifier ce choix, ce qui est parfaitement le cas pour L'or du Rhin, qui présente les trois niveaux bien tranchés de la cosmologie présente dans la mythologie germanique et nordique: le monde souterrain (ou plutôt celui du fleuve avec ses ondines, ses nains et ses esclaves), le monde terrestre des géants, et le monde supérieur peuplé de ses divinités.

Pendant deux heures et trente minutes de spectacle sans entracte, Wagner propose dans ce premier temps, prologue de sa Tétralogie (15 heures au total si on y joint les trois opéras suivants: La Walkyrie, Siegfried et Le Crépuscule des dieux), une histoire extrêmement compliquée, peuplée de personnages surnaturels dont certains symbolisent les quatre éléments (air, terre, eau et feu), avec des vols de richesse, des objets magiques, des métamorphoses, des ruses, des trahisons, des transferts de pouvoir, des retournements de situation...

Les personnages eux-mêmes sont remplis de contradictions. Le dieu Wotan, le plus grand de tout cet univers, se retrouve entravé par les autres dans son insatiable volonté de puissance, voire par ses propres lois. Il est borgne, vulnérable, hésitant parfois et il possède des habiletés aussi opposées que la force au combat, l'art de la poésie ou celui de la magie.

On peut presque visiter le Walhalla, le château que s'est fait construire Wotan et qu'il doit maintenant payer grâce à l'or du Rhin ou en offrant Freia, qui cultive les Pommes d'or empêchant de vieillir.

On peut facilement se perdre dans le déroulement des actions et dans toutes les situations qu'a imaginé Wagner, le concepteur et le rédacteur de son propre livret. Plus précisément, dans la tripartition des espaces: la fosse de l'orchestre pour le Rhin, la scène pour les géants transformés en direct en beaux personnages d'animation grâce à une caméra, et le pont suspendu au-dessus de l'orchestre pour représenter l'univers des dieux. Cette répartition des espaces aide énormément à s'y retrouver, sans parler des vidéos projetées sur un écran-rideau transparent ou en fond de scène, les éclairages magnifiques et les médaillons qui amplifient certains détails.

On peut presque visiter le Walhalla, le château que s'est fait construire Wotan et qu'il doit maintenant payer grâce à l'or du Rhin ou en offrant Freia, qui cultive les Pommes d'or empêchant de vieillir. On peut voir comment le dieu Donner produit un orage, les éclairs et le tonnerre avec son immense marteau, et aussi l'arc-en-ciel qui s'ensuit et qui sert de sentier pour se rendre au château.

Les chanteurs sont de très bons acteurs qui se déplacent beaucoup et adoptent une gestuelle adaptée, en plus de déployer leurs voix magnifiques.

Tout devient visible, presque réel, des actions des personnages aux costumes et aux coiffures improbables d'êtres surnaturels. Tout est très beau et en grande harmonie avec l'histoire et la musique puissante, heureusement plus douce par moments. Les chanteurs sont de très bons acteurs qui se déplacent beaucoup et adoptent une gestuelle adaptée, en plus de déployer leurs voix magnifiques.

En somme, le travail de la mise en scène de cette œuvre se situe dans la continuité du Gesamtkunswerk, l'art total qu'ambitionnait Wagner dans sa propre volonté de puissance artistique. À la fin du spectacle, le public s'est immédiatement levé pour ovationner tous les artistes, preuve qu'il a apprécié cette intégration des outils que la technologie permet sur la scène contemporaine.

Das Rheingold de Richard Wagner, du 10 au 17 novembre 2018, à la Salle Wilfried Pelletier de la Place-des-Arts à Montréal.

Cet article a aussi été publié sur info-culture.biz

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