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« Ivresse », ou le concept de couple est-il encore d'actualité ?

À partir du texte de l'Allemand Falk Richter, adapté et mis en scène par Mireille Camier, la pièce intituléeoffre une double remise en question intéressante : celle du couple et celle du rapport du spectateur au spectacle auquel il assiste.
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La compagnie Productions Quitte ou Double aime l'expérimentation et la remise en question : remise en question du couple (ce désir d'être deux a-t-il encore un sens?), remise en question de la société de consommation (tellement dite et redite qu'elle n'apparaît plus comme très originale et commence même à lasser), remise en question du rôle du spectateur (les tentatives ne sont pas nouvelles, mais, sur ce plan, Quitte ou Double innove bien).

Ivresse © Rachel et Michel www.racheletmichel.com

À partir du texte de l'Allemand Falk Richter, adapté et mis en scène par Mireille Camier, la pièce intitulée Ivresse offre une double remise en question intéressante : celle du couple et celle du rapport du spectateur au spectacle auquel il assiste.

Ivresse est donc d'abord un texte qui entremêle plusieurs histoires de couples. Il y a Stephan qui pour retrouver son calme s'allonge avec son sèche-cheveux sur le sol, tel un cadavre nu incapable de faire face à la vie, et qui laisse sa partenaire dans un grand désarroi; il y a un couple en thérapie dont le psy, très show-biz, pense davantage à ses honoraires qu'à l'aide qu'il leur apporte; il y a un personnage qui ne veut que danser pour se rapprocher des autres; il y a celui qui trouve encore plus épuisant, la gestion de son couple que l'emploi qu'il occupe; il y celui qui panique de ne pas avoir de nouvelles d'une éventuelle partenaire qu'il n'a pourtant vue qu'une seule fois; il y a celui qui cloisonne soigneusement sa vie sur son téléphone intelligent et sa vie de couple; il y a celle qui préfère Facebook au monde réel; il y celui dont les exigences vis-à-vis de l'amour assènent sa partenaire de questions impossibles... il y a en toile de fond l'éventail des insatisfactions que produit n'importe quelle relation amoureuse où, c'est sûr, chacun fait face à bien des doutes, des inquiétudes, des malentendus, des désillusions et autres. Aucune autorité cependant n'oblige à chercher sa moitié ou à vivre en couple. C'est bien qu'il s'agit d'un besoin très humain, même aujourd'hui, à l'heure où l'individualisme semble à son plus haut niveau, par la relation que chacun entretient avec son je-téléphone, son I-phone intelligent et qui déçoit rarement...

Le texte se comprend bien, les effets vidéo pleins d'originalité, et l'expérience générale plutôt intéressante au final.

Et pour monter un tel texte, pas de scène d'un côté et de spectateurs de l'autre, les deux mondes sont intimement liés avec le risque de laisser le spectateur parfois perplexe sur l'attitude qu'on attend de lui. Car il va de soi que nous sommes tous socialisés pour un certain type de comportement lors d'un spectacle. Le spectateur sait qu'il doit s'installer à sa place et ne plus en bouger, se taire au moment où le rideau (réel ou symbolique) se lève, écouter, regarder, applaudir à la fin. Rien de tel dans Ivresse. Les spectateurs sont invités à déposer chaussures (remplacés par de jolis chaussons rouges), manteaux et sacs avant de s'installer sur une des vingt chaises environ réunies en cercle parmi les quatre que contient la salle. Les six acteurs déambulent un peu partout, entre les spectateurs, tout près d'eux parfois jusqu'à en faire participer certains. Ils sont filmés en direct et projetés sur un double toit en bâche blanche qui permet à tout le monde de voir ce qui se passe. Les caméras bougent, elles aussi, sur les épaules des acteurs qui jouent et filment et se filment en même temps; des dessins illustrent les images projetées à partir de plaques transparentes; s'y ajoutent de la musique live et de la danse, sans compter une énorme bataille de vêtements pour clôturer l'ensemble... Tout cela demande un travail très difficile et précis pour les acteurs, qui non seulement interprètent leurs rôles, mais ajoutent performance et improvisation. Ils sont tous excellents. Le texte se comprend bien, les effets vidéo pleins d'originalité, et l'expérience générale plutôt intéressante au final.

Ivresse du 8 au 18 mars 2017, au théâtre La Chapelle à Montréal

Productions Quitte ou Double

Ivresse, Texte : Falk Richter

Traduction, adaptation : Jean-François Boisvenue

Mise en scène : Mireille Camier

Interprétation : Sarianne Cormier, Nicolas Labelle, Catherine-Audrey Lachapelle, Nico Lagarde, Alexis Lefebvre

Concepteurs : Julie-Ange Breton, Jean-François Boisvenue, Maëva Clermont

Conseillers artistiques : Emmanuel Jouthe, Marilyn Perreault

Assistance : Natasha P

Ivresse du 8 au 18 mars 2017, au théâtre La Chapelle à Montréal

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