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La lettre de la mère d'un adulte intersexe

La mère d'un individu intersexe, qui désire demeurer anonyme, a réagi à cet article dans lequel une place importante était faite à la voix des médecins qui recommandent, encore en 2014, de procéder à des chirurgies afin que les organes génitaux des enfants intersexes soient conformes aux attentes de la société envers ceux-ci. Peu importe le moyen.
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Un article de la revue Enfants Québec de novembre 2013 portait sur les enfants intersexes, c'est-à-dire dont la société porte un jugement d'ambiguïté sur ses organes génitaux. L'article est passé plutôt inaperçu à ce moment, mais la mère d'un individu intersexe, qui désire demeurer anonyme, a réagi à cet article dans lequel une place importante était faite à la voix des médecins qui recommandent, encore en 2014, de procéder à des chirurgies afin que les organes génitaux des enfants intersexes soient conformes aux attentes de la société envers ceux-ci. Peu importe le moyen.

Depuis les réactions qu'a suscitées cet article, certaines corrections y ont été apportées (par exemple, la correction de la graphie du mot «intersectualité», dont la lettre fait mention). La place qui est faite aux médecins reste encore très problématique.

Laissons donc la parole à cette mère. (2)

Je suis l'heureuse maman d'un enfant extraordinaire.

Certes, ce que toutes les mères disent à propos de leurs enfants, c'est qu'il est beau, fin, intelligent. Mon enfant est né au début des années '70.

C'était mon deuxième accouchement. Si aujourd'hui je prends la parole, c'est surtout pour vous faire part de l'horreur et de la nausée que me cause votre article ce matin.

Je vis depuis 40 ans un enfer surmonté d'une très grande culpabilité. Les soi-disant bons médecins penseurs m'avaient très mal guidée et informée. Je ne connaissais pas la réalité intersexe, ni de près ni de loin.

Je souligne ici que mon enfant n'est pas un insecte! Quel est ce mot immonde? Donc intersexe, mon enfant a dû subir des chirurgies innommables pour une mère. Il est né avec un testicule, un ovaire, une cavité vaginale très étroite, et un clitoris plus gros que la norme (mais qui a décidé de cette norme?).

Dès son jeune âge, j'ai dû l'éduquer dans le rôle attribué par sa réassignation sexuelle : en fille. Les médecins m'ont dit de ne jamais lui dire, car cela aurait compromis son éducation, son identification au système binaire.

Quelle supercherie! J'ai dû introduire, sous les recommandations du médecin, un dilatateur dans la petite cavité vaginale de mon enfant. Imaginez-vous donc à ma place, à la place d'une mère qui voit son enfant souffrir à cause des soi-disant soins pour son bien?? De plus, il ne s'est jamais senti comme une fille. Rendu à l'âge adulte, il est maintenant sous hormonothérapie, a subi d'autres chirurgies pour être un homme. Mon enfant a choisi son propre sexe, mais je souligne que si j'avais été bien informée dès le départ, j'aurais su le soutenir dans sa belle différence... Je suis convaincue qu'il aurait simplement vécu très heureux dans son corps intact et n'aurait jamais eu à subir d'autres chirurgies de réassignation.

De plus, ce qui m'attriste, c'est qu'il me pardonne le fait que moi, je n'étais pas bien informée. Nous sommes maintenant en 2014 et non en 1973! Cet article passe dans une revue pour futurs parents, c'est scandaleux. Aujourd'hui, je me tiens debout face à la dictature des médias et des médecins. Bravo mon fils, et à vous tous, personnes intersexes de la planète. Vous êtes beaux et belles, je vous aime.

Un cœur de maman

(2) Seules certaines corrections d'ordre grammaticales ont été effectuées pour faciliter la lecture.

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Avril 2018

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