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À compétence égale, les inégalités persistent

Malgré les préjugés subis dans ma carrière, je reste optimiste pour un meilleur avenir pour les femmes en informatique. Cela ne pourra se concrétiser que si nous sommes plus nombreuses à entrer dans ce domaine.
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J'ai grandi dans une petite ville en Iran et j'ai toujours été l'une des meilleures étudiantes de ma ville natale. Aujourd'hui encore, chaque fois que j'y retourne, les gens me voient comme «la petite fille pleine de potentiel». Mais toute personne qui réussit, homme ou femme, iranien(ne) ou canadien(ne), vous dira que le potentiel seul ne suffit pas pour réussir. Il faut aussi être passionné et travailler fort!

Être loin de ma famille pour la première fois pendant mes études universitaires m'a apporté des défis. Mais cela m'a aussi aidé à développer un caractère fort et indépendant.

Contrairement à l'Amérique du Nord, en Iran, il y a beaucoup plus d'équilibre entre les sexes parmi les étudiants en informatique. Dans la plupart des classes, on retrouve même plus d'étudiantes que d'étudiants. 70% des étudiants en sciences et en génie originaires d'Iran sont des femmes.

C'est aussi pendant ces années de formation que j'ai rencontré mon mari. Celui-ci a toujours été formidable avec moi. Nous sommes tous les deux diplômés de la même université. Nous avons tous deux rapidement trouvé un emploi dans l'industrie des télécommunications et dans la même entreprise. J'ai travaillé là-bas comme ingénieur logiciel puis après quelques années, j'ai eu une promotion comme gestionnaire de projet.

Lorsque mon mari et moi passions les entretiens d'embauche là-bas, je me souviens avoir eu une entrevue très technique et difficile avec un gestionnaire homme. Mon mari a quant à lui passé une entrevue très directe et beaucoup moins difficile avec cette même personne, malgré que nous ayons le même diplôme de la même université, et des CV et des compétences similaires.

Bien que l'entreprise dans laquelle on travaillait offrait un environnement de travail très amical, les stéréotypes de genre homme-femme étaient clairement présents et apparents, comme cela peut être le cas dans d'autres endroits. En fait, les clients ne s'attendaient pas à voir une femme comme moi mener une équipe technique. Pour beaucoup de gens, c'était surprenant. Même si j'étais le chef de projet, et donc responsable d'un dossier, bien souvent c'était mon homologue masculin en marketing qui était choisi pour représenter le projet face au client.

Découragée par la critique au sein de mon environnement professionnel, j'ai parfois douté de mes compétences et de mes capacités, me disant que je n'étais pas censée être une personne technique.

De temps en temps, j'entendais des rumeurs disant que mon succès était en partie grâce à l'aide de mon mari. Évidemment, mon mari était mieux payé que moi pour un travail et un parcours identiques.

Mon mari m'a toujours soutenu et encouragé à me faire confiance et à persévérer. Pendant la période où lui et moi avons travaillé dans la même compagnie, il nous est arrivé de travailler sur le même projet. Mon mari m'a alors encouragé à changer de projet afin que je puisse montrer que j'étais capable d'obtenir des résultats performants sans lui dans mon équipe. Ça a fonctionné!

Malgré tout, les préjugés sexistes étaient toujours là et même si mon mari et moi avons suivi la même carrière au sein de l'entreprise, mon mari s'est toujours vu offrir une promotion avant moi. Moi, je devais toujours en faire la demande.

Après ces cinq ans d'expérience professionnelle, mon désir d'apprendre plus m'a donné l'envie de relever un nouveau défi. J'ai donc décidé de poursuivre mes études doctorales. Peu après, nous sommes déménagés en Europe ou j'ai commencé mon doctorat avec une bourse d'études à l'Université de Technologie de Vienne.

Malgré l'éloignement de ma famille et de tous nos amis restés à Téhéran, nous avons vécu ce changement comme une nouvelle aventure.

En tant que chercheuse technique dans le domaine du cloud computing, j'ai parfois trouvé le travail plus difficile que mes homologues masculins.

J'ai rencontré d'autres défis dès le début de mes cours. Il y avait seulement quelques femmes suivant cette formation en Autriche. Je me souviens d'avoir été dans une classe de soixante étudiants, dont cinquante-neuf étaient des hommes! J'ai été très étonnée du faible nombre de femmes dans ce programme. En tant que chercheuse technique dans le domaine du cloud computing, j'ai parfois trouvé le travail plus difficile que mes homologues masculins.

Je devais constamment prouver que j'appartenais à leur cercle encore et encore, en mettant en valeur mes connaissances techniques devant toute nouvelle personne que je rencontrais.

Cependant, mes compétences et ma détermination ont fini par impressionner les chercheurs avec qui j'ai établi une collaboration étroite et solide.

Une fois mon doctorat terminé au bout de trois ans, mon mari et moi étions maintenant prêts à passer à la prochaine phase de notre vie ... cette fois encore plus loin de la maison.

Confiante dans mes compétences et avec mon nouveau doctorat, je voulais faire quelque chose de différent. Une de mes amies avait fondé une startup au Canada à l'incubateur TandemLaunch. Grâce à ces encouragements, j'ai suis entré en contact avec TandemLaunch et j'ai été accepté dans leur programme d'Entrepreneur en Résidence.

Lancer ma propre entreprise en technologie avait toujours été un rêve pour moi.

J'ai découvert l'histoire de femmes comme Sheryl Sandberg, la CFO de Facebook, dans son livre intitulé «Lean In: Women, Work and Will to Lead». Des histoires comme la sienne ont eu un impact important sur moi. J'étais déterminée et très motivée à devenir une entrepreneure et chef de la technologie.

Chez TandemLaunch et grâce à leur support, j'ai cofondé C2RO, une startup spécialisée en robotique et Cloud computing avec mon cofondateur, un expert en robotique. Basé sur notre modèle d'affaires, j'ai développé la feuille de route, établi des partenariats technologiques avec des universités prestigieuses et mis en place le technical board de l'entreprise. Je suis maintenant chef de la technologie et je gère une équipe d'ingénieurs en machine learning, en cloud computing, en vision par ordinateur et en robotique. Nous avons déjà fait des progrès remarquables et le ciel est vraiment la limite pour moi en ce moment!

J'ai tellement de chance d'avoir un mari qui m'a encouragé et supporté tout au long de mon parcours. En tant que femme entrepreneure dans le domaine de la technologie, je suis très heureuse d'avoir commencé ma carrière d'entrepreneuriat à TandemLaunch, où Helge Seetzen, PDG de TandemLaunch, a été une grande source d'inspiration pour moi. C'est un leader unique et un mentor, qui comprend l'importance d'avoir plus de dirigeantes féminines, en particulier dans le secteur de la technologie. Jusqu'à maintenant, TandemLaunch m'a beaucoup aidé à suivre mes passions pour devenir le futur CTO de mon entreprise, un rôle qui est rarement occupé par les femmes, surtout ici au Québec.

Je tiens donc à remercier le Huffington Post de m'avoir permi de partager mon histoire avec vous, et je terminerais avec ce message pour les femmes dans le domaine de la technologie, ou dans tout autre secteur dominé par des hommes... Malgré les préjugés subis dans ma carrière, je reste optimiste pour un meilleur avenir pour les femmes en informatique.

Cela ne pourra se concrétiser que si nous sommes plus nombreuses à entrer dans ce domaine. Celles qui m'ont précédée ont facilité ma réussite, tout comme je facilite les choses à celles qui me suivront. Nous ne devons pas avoir peur de relever ces défis. Au contraire, la seule façon de les surmonter est d'y faire face directement.

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