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La décapitation programmée d'un poète

Ashraf Fayadh, condamné à mort pour apostasie, n'est pas coupable. C'est plutôt l'Arabie saoudite qui l'est, une fois de plus, en ignorant et en violant les droits humains élémentaires.
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Le 14 janvier 2016, un peu partout dans le monde, depuis Hong Kong jusqu'à Santiago au Chili, en passant par l'Allemagne, la France, l'Italie, l'Autriche, le Danemark, l'Irlande, la Grèce, Chypre, la Hollande, la Norvège, la Serbie, la Russie, le Portugal, l'Espagne, la Suisse, l'Égypte, la Palestine, la Turquie, la Grande-Bretagne, Singapour, le Canada et les États-Unis, se tenait en même temps un événement unique en son genre. Une soirée de lecture de poésie en solidarité avec Ashraf Fayadh, poète condamné à mort à cause d'un poème par le régime absolu de l'Arabie saoudite.

Répondant à l'appel lancé par le Festival international de littérature de Berlin (ILB) pour une lecture de solidarité à travers le monde le 14 janvier 2016, l'association des auteurs de la diaspora arabe et berbère du Canada (ADAB) et les éditions Beroaf, en collaboration avec le Centre québécois du P.E.N. international, ont organisé une soirée de poésie et de musique avec des auteurs du Québec pour exprimer leur solidarité avec le poète condamné à la peine capitale.

La soirée a eu lieu au CEDA (Comité d'éducation aux adultes) et était animée par la représentante du P.E.N., Claudine Bertrand, et par le représentant d'ADAB Canada, Salah Beddiari. Les participants ont tous lu des extraits du recueil du poète Ashraf Fayadh, puis ils ont déclamé des poèmes de leur cru. Étaient présents à cette soirée les poètes Jeanne Painchaud, Vicky Laforce, Yvon D'Anjou, Soheir Fouzat, Ehab Lotaif et les musiciens Alden Chorush et Adham Bozart.

Les poètes participants, endossant la déclaration du Festival international de littérature de Berlin, demandent aux gouvernements des pays occidentaux et plus particulièrement au Canada, qui entretient des relations privilégiées avec la monarchie, de dénoncer cette condamnation et d'exiger la libération immédiate de Ashraf Fayadh.

Il faut rappeler que Ashraf Fayadh, poète et conservateur d'art d'origine palestinienne, est condamné à mort par un tribunal saoudien le 17 novembre 2015 pour apostasie: renoncement public à une religion. Selon le quotidien britannique The Guardian:

«Le jeune poète de 35 ans est né en Arabie saoudite, il est membre du collectif artistique anglo-saoudien Edge of Arabia, et il a organisé des expositions d'art à Djeddah et à Venise. Il avait représenté l'Arabie saoudite lors de la Biennale de Venise en 2013. Il a été arrêté en référence à une causerie culturelle tenue dans un café d'Abha (sud-ouest) en 2013, et maintenu en détention au poste de police pendant 27 jours avant d'être transféré en prison.»

Il s'est retrouvé par la suite accusé de blasphème et d'apostasie. Outre ses paroles, ses écrits sont également visés. Dénoncés comme des poèmes «athées», ils figuraient dans un recueil datant de 2008, Instructions internes. Le 26 mai, le tribunal d'Abha l'a ainsi condamné en première instance à quatre ans de prison et 800 coups de fouet, puis condamné à mort le 17 novembre 2015, après appel de la décision par le procureur. Celui-ci estimait que «le repentir, c'est pour Dieu», propos rapportés par Human Rights Watch (HRW).

Ces accusations, conjuguées à l'absence de procédures légales, montrent que Fayadh n'est pas coupable, mais c'est plutôt l'Arabie saoudite qui l'est, une fois de plus, en ignorant et en violant les droits humains élémentaires.

C'est un pays réputé pour les violations systématiques des droits de l'homme, selon Human Rights Watch, qui souligne que les lois de l'Arabie saoudite criminalisent la liberté d'expression, sont de plus en plus répressives, et donnent aux autorités policières des pouvoirs excessifs qui ne sont soumis à aucun contrôle judiciaire.

L'Arabie saoudite est en ce moment à la tête d'une commission consultative du Conseil des droits de l'homme de l'ONU, un organisme dont les membres sont censés défendre les normes les plus élevées des libertés civiles.

Le Festival international de littérature de Berlin (ILB) déclare qu'«avec cette lecture dans le monde entier, nous exigeons que les gouvernements britannique et américain interviennent en faveur de la libération d'Ashraf Fayadh. Nous demandons en outre que l'Organisation des Nations unies suspende l'Arabie saoudite de son Conseil des droits de l'homme.»

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