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Lundi matin. Dixième semaine de la grève étudiante contre la hausse des frais de scolarité. Dans le métro, des sacs sur la voie, des freins de secours actionnés, simultanément, sur plusieurs lignes. Ça se durcit. Je suis bloqué. Dedans. Il fait chaud, trop chaud. Les usagers sont enragés, moi aussi. Certes nous sommes habitués, en échange d'une coquette contribution, à voyager comme des bestiaux résignés, mais au moins, on voyage. Ce matin, on est des veaux, mais à l'arrêt.
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Lundi matin. Dixième semaine de la grève étudiante contre la hausse des frais de scolarité. Dans le métro, des sacs sur la voie, des freins de secours actionnés, simultanément, sur plusieurs lignes. Ça se durcit. Je suis bloqué. Dedans. Il fait chaud, trop chaud. Les usagers sont enragés, moi aussi. Certes nous sommes habitués, en échange d'une coquette contribution, à voyager comme des bestiaux résignés, mais au moins, on voyage. Ce matin, on est des veaux, mais à l'arrêt. À cette vitesse, ça peut durer toujours. Dans notre nouvelle et inconfortable condition de veaux éternels, on beugle : "Tout ça c'est la faute à l'autre là, le petit criss d'agitateur, le furieux, le petit blond là !" Et je vous fais grâce de l'écho du wagon et de ses bêtes haletantes.

Moi aussi j'ai le veau suant et rebelle. En plus c'est lundi. Et de m'en prendre, moi itou, au mobilier clérical, mais je vous l'épargne, on peut être veau et élégant. Oui c'est sa faute au petit blond, oui. Tabarnak.

Pardon.

Le petit blond. Non il ne mérite même pas qu'on le nomme. De toute façon, quand tu portes un nom avec un risque aussi élevé de fautes de frappe, tu es déjà suspect à mes yeux. Ce sera le petit blond, pis c'est toute.

Le petit blond donc, leader arrogant et teigneux de cette organisation radicale et violente, qui prétend parler au nom des siens, au nom d'une prétendue majorité, qui prétend vouloir le bien des étudiants et de leur avenir, mais qui ne fait que, avec une fourberie éloquente, provoquer, bloquer, durcir et contribuer, avec son air de ne pas y toucher, au désordre social en encourageant sournoisement une violence qu'il justifie par son silence.

Phrasé monotone et air faussement doux, le regard fuyant, le cheveu incompréhensible, il porte la tête avec l'insolence du mépris. Il n'aura aucune excuse. Il sait son échec. Dans son entreprise de défaite, il a décidé d'emmener avec lui une génération d'étudiants toute entière. Une génération dont il se fout éperdument, une génération qu'il sacrifie sur l'autel de son orgueil sans Classe.

J'ai fini par sortir de mon étable souterraine, bien plus tard, avec le troupeau. De retour à la surface, épuisé de colère, mais libre, j'ai fini par me raisonner; il est condamné à disparaitre, de toute façon. C'est la lutte finale de l'austère, le chant de cygne du cabochon, le baroud de déshonneur du vaincu.

Demain, bientôt, d'autres rêves plus grands nous envahiront, et on ne se rappellera plus du petit blond. Frisé.

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